lundi 31 mai 2021

1659 - La coche et le lion

A cinquante ans, elle était devenue si laide, et en même temps si sotte et si corrompue, qu’elle s’imaginait qu’en changeant simplement de coiffure et en parant son corps obèse d'illusoires et coûteux artifices, elle transformerait la patate qu’elle était en rose.

En réalité les rubans sur sa tête de coche et les atours dorés sur sa flasque carcasse la rendaient encore plus grotesque.

Au lieu de muer la pomme de terre en fleur, elle avait grimé le légume qu’elle incarnait en viande avariée. De la détérioration de son apparence était né une sorte de hachis Parmentier ambulant. Confectionné avec le mélange de la pure hideur et de l’authentique charogne.

Un cauchemar de vulgarité et d’ignominie.

Et c’est avec cette grimace sordide qu’imbécilement la putride quinquagénaire comptait séduire un esthète aussi beau qu’inaccessible et aussi distingué que féroce, plus habitués aux jeunes marquises évanescentes qu’aux truies puantes de son espèce.

Elle alla sonner à sa porte, le coeur battant, l’haleine fétide.

Face à l’odieuse apparition, le sybarite fut pris d’un vomissement de dégoût et lui régurgita le contenu de son dîner en pleine face !

Ironie de la chose, il venait de déguster un somptueux hachis Parmentier.

Venus au secours de leur maître, deux valets surgirent du couloir afin de copieusement bastonner l’intruse couverte d’immondices.

Tout en se pinçant les narines dans des rires irrépressibles mêlés de soupirs d’écoeurement, les deux laquais exigèrent ensuite de la guenuche qu'elle essuyât le sol jonché de dégueulis en se servant de ses vêtements de dentelles comme serpillière.

Avant de la chasser à coups de bottes sur son énorme cul adipeux...

Ainsi elle ressortit de chez son “amant” encore plus repoussante, plus malodorante et plus répugnante que jamais !

Tel est le sort mérité de ces fates carnes physiquement et moralement gâtées qui avec de dérisoires éclats vestimentaires espèrent éblouir des gens de rang, de race et de sang.

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mardi 25 mai 2021

1658 - Les deux mondes

(D'après un tableau du peintre Aldéhy)

- Je suis le Soleil tu es le charbon. Je suis la lumière, tu es l’ombre. Je suis le jour, tu es la nuit. Pourtant toi et moi formons l’éclat du monde. Nous sommes les oiseaux des sommets, les fleurs des chemins, les étoiles du ciel.

- Je suis noire, tu es blanche. Je suis une terre profonde, tu es une écume claire. Mes traits sont tropicaux, ta face est de neige. Et toi et moi, nous sommes belles. C’est la couleur qui nous oppose mais c’est la grâce qui nous réunit.

- Soleil et charbon produisent les mêmes effets : je suis la flamme, tu es la braise. Nous brillons chacune à notre façon. Tu viens des contrées chaudes, je suis née en un pays clément. Toi la fille du Sud, moi la femme du Nord. Toi l’ébène, moi la blême. Toutes deux astres d’un même océan d’azur.

- Je suis foncée, tu es pâle. Cependant nous reflétons les mille visages de la Création, si différentes l’une de l’autre sur terre, si proches dans l’éther... La vérité est que la beauté prend racine dans tous les horizons de l’Univers.

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dimanche 16 mai 2021

1657 - Les coeurs d'or

Les idéalistes pétris de bons sentiments sont des agneaux au coeur vide. Des pigeons à la cervelle creuse. Des poulets bons pour l'abattage.
 
Les romantiques pleins de générosité sont des êtres aussi écoeurants et indigestes que ces barres de guimauve saturées de sucre.
 
Des inadaptés insipides, insignifiants, frileux et flasques aux propriétés hautement vomitives.
 
Ils sont comme les brins d'herbe, les moucherons, les fétus de paille venant se loger au fond de la gueule des loups ou sur la crinière des lions : inutiles et polluants.
 
Des faibles qui importunent les forts : on les écrase d'un simple geste de lassitude.
 
Ces larves des bonnes causes qui se pensent les meilleures âmes au monde, en réalité sont les pires. Ces caniches n'ont que leurs chiots à proposer à l'Univers : ces fruits de leurs pensées encore plus minuscules qu'eux-mêmes... Ce sont des roseaux accouchant de brindilles.
 
Ces fleurs absolument dénuées d'épines, criardes, puantes de douceurs contre-nature, fades à force d'excès sirupeux, sont les parfaites incarnations de la laideur.
 
Ces "mirlitons humanitaires" épris de poésie molle, tiède, plate, ne sont sensibles qu'aux mauvais vers de la vie. Ils ne réclament qu'un beau temps fixe,  invariable, pour la destinée humaine, maudissant les féconds orages et les rédemptrices tempêtes, animés qu'ils sont par leur égoïsme de fats utopistes qui aimeraient imposer aux autres leur dictature du gâtisme, de l'anémie et de l'imbécillité.
 
Les porteurs de bonnes nouvelles indolores sont de dangereux nuisibles pour nous les hommes vrais, car ils sont inspirés par la plus grande bêtise qui soit.

Ils ont l'intelligence des cochons de boucherie.

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samedi 15 mai 2021

1656 - Je suis un méchant

Moi, je suis vraiment méchant.

C'est-à-dire, dur, fort, franc.

Insensible aux pleurnicheries des faibles, aux bobos des gogos, aux malheurs des caniches, je ne supporte que les âmes d'envergure, les coeurs de granit, les corps aguerris.

Je suis une pierre anguleuse, une écorce rêche, une fleur entourée de ronces.

Moi le lion, je me moque des frileux et respecte les loups à mon image. Porteurs de crocs et de crinières sont mes amis, tremblotants et larmoyants sont mes proies.

Ma caresse de feu et mon sourire carnassier se méritent : je ne les destine qu'aux faces vaillantes, ailes d'exception et becs féroces.

Seuls les aigles sont à la hauteur de ma gueule de roi. Tandis que j'écrase tout ce qui rampe sous mes pieds : fourmis, larves, vermine !

Mon amour est de fer, mon sang d'azur, ma poigne inflexible.

Je suis une épée, une épine, un marbre. Fait pour la tempête, non pour la mollesse.

Je ne pleure que de rire. Ne me réjouis que de la grêle. N'aime que le triomphe.

Vos valeurs humanistes ne sont que fumées face à ma justice de roc : quand vous nuancez, je tranche. Vos lois ovines sont aseptisées. Les miennes sont aiguës, saignantes, implacables.

Mais toujours JUSTES car c'est la vertu, l'intégrité, la vérité qui nourrissent ma flamme, non la complaisance.

Je n'entends, n'aime et ne défends que le vrai. Et brûle vos hérésies !

Je ne suis guidé que par le Ciel, moi le coq, moi la plume, moi le cracheur de lumière.

Né pour combattre vos mensonges et vaincre vos bassesses, je mourrai sans larme.

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vendredi 14 mai 2021

1655 - Les manuels

Dans le royaume des grands esprits, ce sont les petites mains qui trônent.

Les maîtres du monde en réalité ne sont pas les théoriciens mais les artisans.

Les intellectuels ne sont que du vent. Ils n'offrent à l'Humanité que leurs postillons. Alors que les manuels sont des charrues qui produisent notre pain quotidien, des cigognes qui fabriquent nos toits, des jardiniers qui embellissent nos existences.

Les penseurs sont des incapables, des bons à rien, des poids stériles, tandis que mon réparateur de vélo est un  artiste, mon plombier le champion de la tuyauterie, mon boulanger le roi de ma table.

L'idéologue, le politique, le philosophe, bref le parleur pour le dire en un mot, n'est qu'un bavard, un baveur, un branleur.

Le vrai savant, c'est l'homme de la matière. Non la bête d'abstraction. L'un sait faire des choses utiles et belles, l'autre ne connaît rien en fait, à part ses idées fixes. Le pragmatique sort des richesses palpables de la glaise, l'oiseux fait naître du néant de son cerveau.

Le raisonneur brasse du vent, le laborieux brasse de la bière. Le parasite nous chante ses salades, le paysan fait pousser du blé tangible. Le cérébral déconstruit le monde, le mécanicien répare ma voiture. La grosse tête met le doigt sur des problèmes imaginaires, l'électricien trouve des solutions réelles.

La lumière véritable surgit des bras du bricoleur. Non de la cervelle inutile du passif.

C'est l'ouvrier qui fait vivre le spéculateur et non l'inverse.

La pogne du travailleur est inventive et féconde. Le crâne du pédant est aussi futile qu'aride.

Dans notre société il y a des sots qui imaginent des âneries et au final ne font pousser aucun fruit comestible de leur unique organe fonctionnel.

Et puis il y a ceux qui, avec leurs pieds bien sur terre, font de l'or de leurs dix doigts.

Par "intellectuels", je veux parler ici de tous ces bavards stériles improductifs, tels que psychanalystes, sociologues, exégètes du vide, pédagogues du mensonge,  etc... Et évidemment pas des ingénieurs qui ont une place de choix dans le monde des gens actifs et indispensables.

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vendredi 7 mai 2021

1654 - Une Turque sidérale

Elle est Turque, elle est brune, elle est de la Lune.

Son flanc maternel est demeuré stérile. Et pour cet autel vide de chair bâtarde mais plein de divine lumière, je ne veux qu'un océan d'étoiles.

Pour sa face exempte de corruption temporelle, je ne destine qu'un baiser de marbre. Totalement désincarné. Ainsi que des caresses de statue. D'un froid sidéral.

Elle est d'Istanbul, loin par là-bas, sur l'autre boule.

Je l'imagine cheminer sur des rivages oniriques, entre écume et nuages, astres et azur, sable et vent.

Ses mamelles infertiles n'ayant nourri aucune progéniture, elle les consacre à la gloire du Cosmos.

Au lieu de se flétrir sous l'appétit des larves, elles se gonflent de l'orgueil de l'inutilité esthétique.

Elle est ottomane, elle est mystérieuse, elle est sélénienne.

Au bord du Bosphore elle est phosphorescente, étrange, pâle comme un soleil dans la brume.

Et ses pas laissent des empreintes éternelles sur la poussière du sol lunaire où elle traîne en réalité.

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dimanche 2 mai 2021

1653 - Une brise

Je l'aimais depuis une éternité.

Certes, mes efforts de conquête étaient vains, l'insensible jeune fille me destinant de tout temps son invariable froideur. Cependant ma flamme ne s'éteignant toujours pas, j'insistais.

Sans illusion mais non sans ténacité.

Je la rejoignis pour la centième fois sur le banc dans le parc. Avec mon silence pour seule éloquence.

Avait-elle au moins deviné ma fièvre à son endroit ? J'en doutais encore...

Bien que je fusse follement épris, je demeurais pétrifié de timidité en m'approchant de l'objet de mes tourments. Et à chaque fois je n'osais rien d'autre qu'attendre. Dans le vide. Espérer un miracle. Voir s'ouvrir le ciel, c'est-à-dire ses bras.

Evidemment, jamais rien ne s'était produit. Juste une immense lassitude dans mon coeur et de la glace dans le sien. Pourtant j'étais là, près d'elle. A recommencer ce manège stérile et déprimant.

Je regardais droit devant moi et celle pour qui je brûlais lisait, comme d'habitude.

A ses yeux je n'existais pas, tandis que pour moi elle était tout.

Mais cette fois une chose extraordinaire brisa le sempiternel rituel de ce navrant immobilisme, tel un coup de canon dans le néant !

Du coin de l'oeil je vis se déployer sa cape et sentis même sa dentelle effleurer ma main.

Je n'osai plus bouger !

Enfin, un geste d'intérêt de sa part ! Enfin une audace !

Une joie indicible m'envahit, des années de solitude et d'espoir gelé allaient se concrétiser par un feu de jours radieux !

Je me tournai alors vers la liseuse, fébrile.

Elle lisait toujours. L'air impassible.

Puis quitta son livre pour me jeter un regard étonné et interrogateur.

En fait elle n'avait bougé ni ses pensées ni le petit doigt.

Et je tombai dans un gouffre de déception en comprenant mon erreur.

Le vent, pour m'offrir ce mirage, avait simplement soulevé un peu de tissu.

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samedi 1 mai 2021

1652 - Le loup

Il aime l'homme, le loup.

Son regard est effrayant, sa dent féroce, mais son coeur est doux.

Il a des nécessités sanguinaires, des fureurs carnassières... Et aussi des rêves de tendresse. 

Sa gueule est pleine d'ombre mais sa tête est remplie de lumière. 

Ses hurlements dans la nuit glacent les os. Pourtant ses pensées sont aussi aimables qu'un brin de soleil.

On le croit méchant alors qu'il est simplement affamé.

Ce n'est pas l'innocent qu'il veut tuer mais l'agneau qu'il doit manger. C'est un prédateur qui nous ressemble, en réalité.

Et s'il dévore de la chair dans les ténèbres, c'est pour mieux s'enivrer d'azur quand vient le jour.

Son but n'est pas la mort de l'enfant : il souhaite juste sentir palpiter la vie sous ses crocs.

Il n'est pas noir, il est vrai. Il n'est point sinistre, il est aussi clair que l'eau vive.

Lui dans sa peau de bête, vous sous vos artifices d'humains.

Quand il sort du bois, celui que vous redoutez et méconnaissez tant, auriez-vous imaginé en le voyant s'approcher qu'en vérité, tout comme vous, il cherche l'amour ?

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