mardi 21 février 2023

1960 - Les tourmentés

Bien qu'elle soit majoritairement peuplée de gens très communs, ternes et très stables, ce que j'appelle des êtres normaux, notre planète scintille de toutes sortes de personnes étranges et mystérieuses.
 
Je veux parler, en effet, des inadaptés de haut vol : artistes torturés, écrivains tourmentés, clowns à l'humeur sinistre, auteurs de légèreté et autres créateurs de joie aux personnalités complexes et cafardeuses...
 
Tous célèbres, adulés, enviés. Mais également, pour certains, affligés d'un terrible mal-être.
 
Ainsi des acteurs de cinéma à l'avenir prometteur se suicident, incapables de vivre en paix avec leur conception sophistiquée et troublée de la vie... Des têtes solaires sombrent dans l'obscurité, emportés par leurs angoisses. Des chanteurs aux idées morbides disparaissent avec fracas et scandale, ne trouvant rien d'autre à faire sur cette Terre pourtant si riche d'éclatantes réalités, de brillantes opportunités et de fécondes évasions...
 
Je ne comprends pas les tempêtes intérieures de cette faune de salons au destin funeste. Je suis hermétique à leurs problèmes de comédiens, de saltimbanques, de peintres, de romanciers, de génies, de penseurs, que j'estime soit imaginaires, soit hors de ma portée.
 
Moi j'appartiens aux esprits simples, aux hommes sans histoire, aux âmes claires qui ne demandent au ciel que le strict minimum : sa lumière ordinaire, des nuages, un peu de pluie et quelques oiseaux, rien de plus.
 
Eux refusent tout ce que le sort leur offre, exigent l'impossible et finalement choisissent le néant. Le cadeau de leur naissance en ce monde ne leur plaît guère. Ni même le surplus qui leur a été octroyé : fortune, succès, renommée. Au nom de je ne sais quels tarabiscotages intellectuels, conceptuels, mentaux, ils ne peuvent marcher comme les autres sur les chemins de  la simplicité, de la clarté et de la sobriété.
 
Il leur faut des gouffres, des désespoirs, des langueurs... Avec plein de séduisantes souffrances. Surtout celles qui sont le plus en vogue. Tels sont leurs feux d'artifices mondains à eux. Rien que des ruines et des misères retentissantes. Sans omettre les mots les plus lustrés pour le dire avec parisienne élégance ou bien sans retouche, avec la brutalité et la franchise des implacables héros de notre temps...
 
Bref, gémir et mourir pour des raisons que le lourdaud de la rue ne saurait concevoir, pour eux c'est l'essentiel.
 
Je les observe s'enfoncer dans la déprime et le nihilisme. Et m'étonne de les voir disparaître de nos écrans, de nos cirques, de nos bibliothèques, de nos journaux et de nos théâtres, incrédule face à tant de mortelle vacuité et de létales stérilités...
 
Je suis déconcerté par la détresse fastueuse de ces inconsolables en dentelles, moi qui aime par-dessus tout les coeurs humbles et limpides de mes semblables heureux !

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