vendredi 18 août 2023

2067 - Mon trou à Clinchamp

Loin du monde dans un village de la Haute-Marne, j'ai mon trou secret.
 
Au milieu de rien, entouré de silence, d'herbes folles et de terres anonymes, je me fais oublier de tous les hommes. Au fond de ces champs de platitudes, aux abords de ces bois banals, au coeur de cette mortelle cambrousse, je m'abreuve de poésie amère, me nourris d'ombre légère et m'enivre de lumière de plomb.
 
Je regarde les vaches chier, le ciel blanchir, les nuages passer. Et laisse bleuir mon âme, lentement.
 
Je passe ainsi mes journées à observer les événements les plus anodins qui soient pour en faire un festin d'heures immortelles. Alors un flot de mélancolie me berce, un océan de rêves me submerge, et puis l'Univers entier se ramasse dans mon antre, là à mes pieds, dans ce coin perdu aussi minuscule qu'une fosse à rats. Le reste de la planète n'existe plus pour moi.
 
Mon paradis terrestre se résume à un carré d'humus, à quelques branchages, à un tapis de feuille sèches là-bas entre les cailloux du sol et le Soleil de l'éternité, quelque part à Clinchamp.
 
C'est depuis ce point zéro du Cosmos que je m'envole, mais guère plus haut que le clocher de la commune, afin de ne pas perdre de vue les pissenlits des chemins, les bouses de bovidés, la faune des fourrés, l'humilité des jours.
 
Même au sommet de mes fulgurances, je ne souhaite pas quitter cette vaste étable peuplée de bêtes et de bipèdes foulant la verdure et respirant l'azur de leur territoire étriqué aux si âpres apparences.

Elle est devenue la plus féconde source de ma plume et ma plus brûlante flamme intérieure.

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