dimanche 24 août 2025

2382 - Flamme verte

Au coeur de la forêt s'ouvrent pour moi des chemins obscurs qui ressemblent à des gueules de loup, à des portes donnant sur je ne sais quelles ténèbres, à des entrées menant vers des rêves noirs.
 
Seul parmi les arbres inquiétants qui m'encerclent, loin des hommes et de la civilisation rassurante, je deviens un animal farouche, un ogre des bois, un hôte des cavernes et je pénètre dans ces voies inconnues de la sylve.
 
Je m'enfonce telle une bête traquée dans ces sentiers sombres apparus soudainement, comme entraîné par une volonté extérieure. Et je cours, je vole même, emporté par des ailes de cauchemar, étreint par des forces majeures...
 
Essoufflé, j'arrive bientôt en un lieu unique, mystérieux, isolé et silencieux. J'ai l'impression de me retrouver nulle part, dans un endroit sans nom, en dehors de l'ordinaire, ailleurs qu'en ce monde d'où je suis parti un instant plus tôt.
 
Les feuilles semblent des flammes vertes, les troncs des patriarches aux pensées folles, les souches des têtes d'ancêtres. Et le sol me paraît semblable aux nues : plein de merveilles, chargé d'histoires passées et à venir, semé de légèretés de toutes natures.
 
Et je me demande si je ne serais pas mort. Ou bien si je n'aurais pas sombré dans un songe profond. Ou si je n'aurais pas franchi le seuil d'un univers régit par d'autres lois.
 
Mais non, je me rends bien compte que je suis demeuré dans la réalité de tous les jours. L'ambiance est inhabituelle cependant. Je sens que tout est différent. L'air, la pénombre, l'espace : rien ici n'est pareil que de là où je viens. J'ai perdu mes repères et j'ai peur de cet asile nouveau où j'ai atterri.
 
Je suis venu m'échouer en ce coin insolite, escorté par un souffle impérieux, sauvage et brûlant, comparable au fracas salutaire de l'orage qui réveille les endormis du quotidien, enlisés dans leur léthargique mollesse et mortelles tiédeurs.

Mais à présent que j'y vois plus clair sous les branches séculaires, je ne crains plus. Finalement je sais où le sort m'a conduit : au royaume salvateur de la tranchante, romanesque, imaginative, céleste et fracassante littérature.

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