mercredi 30 avril 2025

2274 - Mon jardin d'ermite

Dans une retraite comme la mienne, moins l'on possède de choses, plus elles sont essentielles.
 
Ici, loin des villes, tout près du sol et si proche du ciel, mes occupations de solitaire prennent une dimension verticale. Mes besoins les plus rudimentaires et mes appétits les plus frustes deviennent des causes royales, des offices sacrés, des missions supérieures.
 
Ainsi j'apprécie comme un mets divin la moindre patate issue de mon maigre sillon. La denrée horticole est la juste récompense de mon labeur.
 
Quant au fruit récolté dans mon verger sauvage, il est une manne précieuse que je savoure avec reconnaissance envers la terre et le soleil qui les ont fait naître à ma porte. Un cadeau sucré et juteux qui m'est offert à l'opportune saison sans que je ne fasse rien d'autre que d'attendre qu'il tombe de sa branche.
 
Mon existence s'adapte au rythme lent et paisible des germes.
 
Je marche aux côtés des jours, ralentissant le pas quand il le faut, réglant mon allure sur les heures que m'impose la nature. Je prends le temps par la main et chemine avec lui du matin jusqu'au soir. Je ne vais pas plus vite que la sève, le vent, les astres.
 
Les nuages filent au-dessus de mon potager, il me suffit de les observer pour me rappeler la véritable direction de ma vie. C'est dans les nues que tournent les aiguilles de mon cadran.
 
Et mes plantations croissent et mûrissent avec la patience du Cosmos.
 
Là, dans l'humble limon de mon carré cultivé, je puise mille rêveries et plein d'intelligence. Je plonge les mains dans le terreau pour y implanter la graine et faire fertiliser mon esprit de pensées fécondes.
 
Dans le secret de la glèbe, le miracle de la Création se met en oeuvre.
 
Mon clos de légumes me tient en éveil.

A la collecte de mes cultures, je fais plus que simplement me nourrir de banals tubercules : je me délecte des délices de l'Eden.

mardi 29 avril 2025

2273 - La récolte des fagots

Aujourd'hui j'emploie ma journée à la récolte d'une des plus humbles richesses de la forêt : le bois mort.
 
Je m'enfonce sous l'ombre auguste de la sylve en quête de ce trésor de pauvre. Pour moi ce labeur est une joie pure, un âpre plaisir, un travail réjouissant, lent et paisible qui comble mon âme d'un bonheur simple.
 
Je confectionne des fagots, patiemment, au rythme de mes pas sur l'humus. Et porte ces paquets de branches sur mon dos pour les amasser contre un tronc.
 
Mes heures sont légères sous ce fardeau fécond. Le temps devient onirique.
 
Je me sens au centre de l'Univers en me consacrant à cette tâche modeste. Je sais que mon oeuvre peut sembler minuscule, dérisoire vue de l'extérieur, elle est néanmoins nécessaire et apparaît à mes yeux telle une activité majeure, quasi cosmique : en me baissant pour puiser à cette source naturelle d'où la flamme jaillira, je me connecte aux éléments les plus bruts.
 
Je suis comme l'homme originel qui ramène le feu dans sa caverne.
 
Je me retrouve en contact direct avec la terre et ses fertiles scories, faisant fructifier mes jours en tirant profit des plus petites miettes que m'offre la Création.
 
A échelle humaine, étroitement locale, précisément depuis l'espace restreint de mon gîte, mon geste, anachronique, a l'envergure des légendes. Ignoré du reste du monde, là dans ce trou forestier, j'ai conscience de ma place privilégiée au coeur de l'essentiel.
 
Et je me compare au scarabée roulant sa boule, absorbé par cette occupation que lui commande la nature.
 
Tout à ces pensées, je poursuis mon ouvrage.
 
L'atmosphère est feutrée, automnale, comme c'est souvent le cas sous la fraîcheur et l'humidité des frondaisons. La besogne est aisée et prend des allures allégoriques. Je m'investis dûment dans cette opération archaïque consistant à ramasser ces branchages brisés qui allumeront mon âtre.
 
Le crépuscule arrive et, satisfait de mon affaire, je retourne à mon foyer entreposer ma moisson, fatigué, la tête pleine de rêves.

Ce soir ma cheminée sera illuminée d'étoiles.

lundi 28 avril 2025

2272 - Un étrange visiteur

Un matin, très tôt, on toqua à ma porte.
 
Je me levai à la hâte, un peu inquiété par une si matinale surprise au fin fond de ma forêt... D'habitude nul ne vient jamais frapper à mon huis. C'est même la toute première fois que cela arrive.
 
D'une voix que je m'efforçai de paraître assurée, je demandai qui était là. Aucune réponse. Je n'osai répéter ma question.
 
Mais après tout, qu'avais-je véritablement à craindre, bien loin des fracas des villes ? Excité par la curiosité, je décidai d'ouvrir à l'étranger. Peut-être n'était-ce qu'un mauvais farceur... Et puis en bon ermite que je suis, je me dois de toujours faire accueil honorable aux oiseaux de passage !
 
Lentement j'entrebâillai l'entrée de ma demeure, laissant pénétrer la lumière du jour dans la pièce.
 
Et là, une chose effrayante m'apparut.
 
Un épouvantail.

Ou plus exactement, un bonhomme hirsute au front ridé, vêtu de guenilles et portant un chapeau de paille rapiécé. Une sorte de spectre de chair et haillons.

Je lui adressai poliment la parole : 

— Bonjour Monsieur, soyez le bienvenu chez moi.

Il avait le regard profond des vieux sages, l'allure augurale des grands voyageurs, la majesté des messies. Mais ses propos contrastaient avec son apparence de mage :

— Je viens apporter les rêves de l'homme. Je vends les trésors de l'esprit au prix de la pauvreté du loup. Si vous voulez acheter les richesses du ciel, je vous les cède en échange de quelques cailloux.

En prononçant ces mots sibyllins, ses yeux s'écarquillèrent comme ceux d'un hibou et je ne savais pas si j'avais affaire à un messager céleste ou à un fou. Il se dégageait pourtant une réelle aura de ce curieux visiteur au visage biblique. Mais comment être sûr que ce n'était point un simple égaré, un mendiant poète enivré de quelque nectar ou une espèce de comédien s'adonnant à son théâtre pour je ne sais quelle cause obscure ou farfelue ? Je lui proposai l'hospitalité néanmoins.

— Je ne comprends pas ce que vous me dites Monsieur, je vis ici hors de tout, satisfait de n'être pas ailleurs qu'en ce trou de solitude. Avez-vous faim ?

Après un bref silence, il me répondit : 

— Je ne mange guère. Mes biens les plus précieux sont hors de portée de ce siècle. Je suis né pour voler. Tout ce que je désire, c'est présenter mes humbles diamants aux mortels que je croise sur ma route. Je ne fais que passer, ensuite je disparais en ne laissant que des pensées derrière moi.

Ne sachant comment réagir devant ce pèlerin aux phrases déroutantes, je le remerciai pour son aimable visite en précisant que je n'avais besoin de rien d'autre que de ma liberté, moi l'heureux reclus des bois. 

Il n'insista pas et après m'avoir salué, il repartit.

Je réfléchis longtemps au sujet de cet étrange événement. Tout cela semblait tellement surréaliste ! Qui donc était ce mystérieux vagabond ? Que cherchait-il réellement ?

A force de m'interroger sur cette énigme j'obtins une forme d'explication.

En effet, je pris finalement conscience que tout pouvait arriver, surtout l'inimaginable, lorsqu'on prend la décision, comme moi, de vivre ainsi dans le plus total isolement.

Et je dus me faire à cette idée : se retirer du monde, c'est à un moment donné pousser une trappe sur l'inconnu.

2271 - Ma demeure d'ermite

La solitude, la forêt, l'humus et la broussaille composent mon univers, mon seul espace, ma vraie liberté.
 
Ma demeure consiste en un modeste asile sis au coeur de la sylve.
 
Il s'agit d'une habitation ancestrale oubliée, érigée dans une contrée perdue. Des vieilles pierres quasiment enfouies sous les frondaisons.
 
Un refuge hors du temps, pareil à une légende.
 
Le toit au-dessus de ma tête semble aussi pesant qu'un tombeau. Mais en réalité il rend mes jours joyeux et fait mes rêves légers. Ce foyer situé dans les profondeurs forestières, loin de toute modernité, à l'abri des curiosités profanes, est un cloître champêtre me préservant des futilités du monde. Et l'âtre devant lequel je médite éclaire mes soirées de son humble éclat.
 
Je n'ai besoin de rien d'autre pour vivre heureux.
 
L'ombre des arbres et le silence des lieux m'agréent mieux que les illusions du siècle et l'agitation des villes. Mon antre, âpre et rustique, est d'un autre âge. La cheminée noircie de suie, l'ail suspendu aux poutres, les bûches et les fagots entreposés sur le sol battu, l'odeur des pommes de pin amassées dans des paniers d'osier, la chandelle et la cruche d'eau sur la table confèrent à cette tanière une ambiance surannée et enchanteresse. Dans ce décor fruste de pure paysannerie, je coule une existence paisible et intense.
 
Un jardinet complète aussi pauvrement que possible ce palais de roi... Sur ce maigre carré de terre, je cultive l'essentiel pour mes festins d'ours solitaire.
 
Ici, je suis l'égal d'un monarque chaussé de sabots : je règne sur les étoiles qui embellissent mes nuits autant que sur la friche qui m'entoure. Ce qui suffit à mon bonheur.
 
La nature est mon temple, mon ciel, mon véritable terrain de vie. J'ai pris racine dans ce gouffre de verdure, tout au fond des bois.
 
C'est là que je m'épanouis, entre la flore secrète et le fol horizon, les sombres ramures et le clair azur, les troncs aux regards rugueux et les souches aux visages mystérieux.

Dans cette vaste végétation monacale où je me repais des sauvages beautés comme des simples baies, je me contente de bien peu pour faire fleurir mon âme.

samedi 26 avril 2025

2270 - Un homme clair

Texte d'après un tableau du peintre Aldéhy
 
C'est lui l'homme.
 
Le vrai, l'intègre, le lumineux.
 
Avec de la flamme sur la face, un air de vertu et des traits de virilité, le regard comme un soleil et les pensées aussi élevées qu'il le faut...
 
Il connaît ses devoirs, a conscience de ce qu'il incarne, sait ce que le monde attend de lui.
 
Il est franc, il est fort, il est droit.
 
Il ne boit que le bleu du ciel, ne mange que le pain de la vérité, n'aime que la clarté du jour. Ce mâle brille autant qu'un astre.
 
Et brûle de pureté pareil à un feu rédempteur.
 
La femme idéale, il la conçoit telle que Dieu l'a faite : à l'opposé de sa masculinité. Le siècle n'a point corrompu son âme. Lui est un seigneur, il ne l'ignore nullement. Au contraire, loin de vouloir nier la chose, il revendique sa couronne de lion, brandit son sceptre de roi, et toise même de toute sa hauteur les dénaturés qui ne l'entendent pas ainsi...
 
Il n'a d'ailleurs pas besoin d'affirmer ces évidences autrement que par sa radieuse présence : les nobles éclats de sa personne s'imposent naturellement sur la Terre des probes mortels.
 
C'est lui l'authentique lumière.

Et il est d'autant plus crédible sur ce point qu'il a avec lui l'honneur, le courage, la gloire et la beauté.

jeudi 24 avril 2025

2269 - Un foyer au fond de la forêt

Le sort les a jetés au coeur de la sylve, loin du monde, hors des siècles, au fond de la verdure.
 
Ils sont reclus, oubliés de tous, tout en bénéficiant pourtant du meilleur de la nature. Voici deux orphelins heureux en leur chaumière qui progressent en sabots sur le chemin de la vie. Ils n'ont pas besoin de bien s'écarter de leur toit d'ailleurs : juste faire les quelques pas nécessaires pour chercher l'humble aventure entre l'aube et le crépuscule, quérir l'eau au puits, confectionner des fagots, fendre des bûches aux alentours de leur foyer, se promener aux heures propices du jour. Et regarder le soir tomber, tranquillement, au seuil de leur demeure.
 
Les hôtes de ces lieux ont déniché le bonheur dans les broussailles. 
 
C'est un duo uni embarqué dans une longue exploration. Un voyage qui s'appelle "le royaume de l'enfance." C'est-à-dire, une vaste contrée pleine d'enchantements et de délicieuses frayeurs, d'ombres suspectes et de clartés radieuses.
 
Inséparables, ignorées du reste des gens de la Terre, ces âmes champêtres ont trouvé refuge dans un isolement sauvage et intime, âpre et beau. Une solitude inquiétante et protectrice tout à la fois. La faune constitue leur société essentielle. Et la végétation, les arbres, les sentiers perdus, les coins reculés qu'eux seuls connaissent, c'est leur paradis.

Un frère et une soeur aux aspirations candides s'adaptant aux rudesses des éléments, trouvant de la joie dans le clair ruisseau, de quoi manger dans leur jardinet, leurs desserts dans les fruits sauvages... Et alimentant leurs rêves à travers les souches aux traits grimaçants.
 
Maîtres d'un univers archaïque, simple, rustique. Encore enfants et déjà rois de la forêt.

Ils s'entourent d'animaux amicaux et en croisent d'autres plus féroces. Ils passent leurs journées à accomplir des tâches domestiques rudimentaires dans les bois. Ils entreprennent également des expéditions forestières et s'émerveillent sans cesse de leurs nouvelles découvertes bucoliques.

Figés dans un décor quotidien statique et rassurant, ils jouissent des maigres trésors que leur offrent les saisons : pommes de pin à brûler dans l'âtre, poissons pêchés dans la rivière accompagnés de patates issues de leurs sillons, noisettes pour améliorer leurs repas, glands, fourrages et autres récoltes opportunes pour nourrir leurs amis quadrupèdes... Mais ils se régalent aussi du lait de leur chèvre, des oeufs de leur poule, de la tendresse de leur âne...

Le temps pour eux s'écoule ainsi, trop occupés qu'ils sont à parfaire leur dessein. Sans autre ambition que de poursuivre cette routine de modestes fééries...
 
L'existence de ces juvéniles Robinsons est un secret parvenu uniquement aux oreilles d'un loup, d'un renard, d'un ours et d'un sanglier...
 
De qui s'agit-il donc ?

Ils ne sont pas de notre réalité et se nomment Sylvain et Sylvette.

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mercredi 23 avril 2025

2268 - Les raisons du peintre

Pourquoi Aldéhy peint-il ?
 
La question pourra sembler bien oiseuse aux yeux des profanes de notre époque affairée, bruyante, opulente...
 
L'artiste n'a pas d'autre choix que de poursuivre sa voie parmi les autres mortels : il a choisi la radicale verticalité, l'horizon des nues, la direction des étoiles, le sommet que représente le firmament...
 
Bref, le ciel.
 
L'essentiel pour lui c'est de monter, d'atteindre les hauteurs, de rejoindre le royaume de la beauté.
 
Qu'il demeure dans l'ombre ou la lumière dans le regard des autres, objectivement il avance, progresse, s'envole ! Peu importe que ce siècle le prenne pour un oiseau vague, un obscur baladin ou un aigle royal, l'important pour Aldéhy n'est pas d'accéder aux vanités académiques mais à la vérité esthétique.
 
Le Beau et rien d'autre.
 
Remplacer la laideur par  la couleur, déverser de l'azur là où règne la boue, ajouter de la flamme aux jours ternes, rendre les âmes plus lumineuses, telle est son aspiration.
 
Le peintre cherche à servir la seule cause valable, de son point de vue : l'art. Autrement dit, l'éloquence du divin. Il veut élever le quotidien en y dévoilant ses plus célestes expressions. Et ainsi mettre l'exceptionnel à la portée du commun.
 
Etre en phase avec le Cosmos, en harmonie avec l'Univers, toucher les coeurs, c'est sa mission la plus chère. Humble et sacrée tout à la fois.
 
Ses portraits, ce sont exactement les visages du visible, du présent, de l'Humanité toute entière. Sans autre vaine ambition. Avec simplicité, clarté, proximité. Mais ce sont aussi les images de son idéal, le seul trésor qu'il souhaite léguer au monde.

Vouloir embellir son chemin d'homme, là est sa véritable richesse de créateur.

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vendredi 11 avril 2025

2267 - La célibataire

Son coeur est riche de sentiments romanesques, son âme avide de vertiges amoureux, son corps brûlant de désirs inassouvis. Elle rêve de princes à mâchoires carrées, de guerriers musculeux, de conquérants barbares et d'ogres majestueux.
 
Elle cherche un astre à la hauteur de sa flamme : un être magistral, fulgurant, marmoréen.
 
Une sorte de loup aux crocs stellaires, une bête de masculinité triomphante, un animal sauvage, subtil et brutal, doux et carnassier, féroce et lumineux. Un mâle tout d'un bloc qui pourrait combler ses vides femelles, élargir les limites de sa nature, déchirer les étroitesses de son esprit de femme comme de sa chair molle.
 
Elle aimerait tant livrer sa féminité frustrée à ce feu viril, offrir sa virginité d'esseulée à ce seigneur martial, se jeter aux pieds de ce roi dûment botté...
 
Mais elle n'est entourée que d'épilés, de castrés, d'efféminés, d'inversés !
 
Pour ces moins que rien, ces chiots frileux, ces porteurs de frisettes, ces délicats parfumés, elle n'éprouve que mépris, dégoût, colère. Ce siècle de déréglés la déçoit. Son ciel est capable de contenir le tonnerre, la tempête et la foudre, mais son époque ne lui propose que des amants édulcorés, des brindilles, des plâtres, des larves, des féministes, des loques, des fragiles !
 
Refusant ces serpillières elle préfère demeurer seule plutôt que de corrompre sa fleur avec ces lavasses qui se prétendent des hommes.
 
Consciente du trésor qu'elle incarne, elle n'acceptera de soumettre son hymen qu'à celui qui aura la force des dieux, la gloire du vainqueur, l'éclat du Soleil, l'odeur du fauve et la poigne du dominateur couillu !

En attendant, la célibataire crache à la face de ces sensibles émasculés qui n'osent même pas la regarder, et continue d'espérer pouvoir rencontrer un jour un phallocrate digne de ce nom.

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dimanche 6 avril 2025

2266 - Les femmes

Les femmes sont de drôles de bestioles que l'on rencontre partout où il y a des hommes.
 
Plus menues que ces derniers, molles, frileuses, dociles, elles sont l'objet des mâles convoitises. Certaines sont fort appétissantes, d'autres beaucoup moins.
 
Il y en a des grosses, des minces, des squelettiques, des plates, des mamelues, des ordinaires, des luxueuses, des gentilles, des blondes, des jeunes, des vieilles...
 
Les plus recherchées sont aussi les plus rares. Le connaisseur ne désire pas la plus intelligente mais la plus remarquable, c'est-à-dire celle qui brille le plus.
 
Il y a deux sortes de femelles brillantes : celles qui portent des bijoux et celles qui sont naturellement éblouissantes. Mais, et c'est là toute la subtilité de la chose, en général la volaille éclatante affectionne le port d'artifices. Les belles bécasses en effet, aiment ajouter du lustre à leur plumage. Ce qui fait que ces bêtes de prix se reconnaissent également par leurs apparences de dindes farcies de diamants.
 
Que ces potiches marmoréennes à cervelle d'oiseau soient superficielles et stupides importe peu à l'esthète épris d'art et de délicatesses. Ce qui compte pour lui n'est pas le fond mais l'emballage. Aux yeux du macho aux pures aspirations, l'essentiel est que la féminine incarnation soit un volatile de choix.
 
Esthétiquement parlant.
 
Pour lui, cela suffit amplement. La nature masculine, qui n'est pas difficile et ne s'embarrasse guère de futilités, n'en demande pas plus.
 
C'est là que l'on voit la différence entre Mars et Vénus : le premier cherche un trophée flatteur à exposer fièrement dans sa vitrine sociale (et que dans un second temps il engrossera, accessoirement), la seconde n'est en quête que de vaines dépenses destinées à la rendre impossiblement plus intéressante qu'elle n'est déjà.
 
Ces coquettes caquetantes savent pertinemment que seules les plus florales d'entre elles survivront dans nos regards de conquérants.

C'est pour cette raison que toutes veulent passer non pour les plus lumineuses intellectuellement mais pour les plus attirantes physiquement.

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samedi 5 avril 2025

2265 - Une femme

Elle ressemble à la Terre.
 
Avec deux pierres en guise d'yeux.
 
Son visage est le reflet des millénaires, son corps s'apparente à un grand arbre et son âme pleine de racines brille comme un océan aux eaux paisibles. Sa peau de femelle plaît au Soleil et tous les hommes s'inclinent devant son éclat.
 
Elle n'a de coeur que pour ce qui est plus dur que le marbre. Elle préfère la folie du feu à la molle caresse et la brûlure de la lumière à la sotte tendresse. 
 
L'onde l'enflamme et la cendre la berce.
 
Les fleurs ne sont pas pour sa couronne et les mots doux lui font l'effet d'un vomitif.
 
Ses cheveux dans le vent ont la beauté des épines, son front sous la pluie effraie les enfants, son sourire dans la nuit évoque la gueule d'une louve.
 
Les ténèbres l'embellissent, le jour l'illumine.
 
Et le crépuscule la divinise de ses clartés sanguines.
 
Cette femme qui repousse les faibles flammes ne cherche que l'ombre des géants.
 
De la tête aux pieds, je la désire comme elle est. Etoile charnelle et caillou céleste tout à la fois, elle a les traits de la Lune et les lignes de Vénus.

Avant de me connaître elle avait les nuages pour amis, l'orage pour amant.

Mon glaive fut sous vrai coup de foudre.

Foutrement électrique !
 
Cette déesse aux seins sidéraux et au regard de glace m'appartient chair et souffle, sommets, horizons, viscères et tout le reste...
 
Son sol est mon sol, son ciel est mon ciel.

Cette créature unique au monde se nomme Gertrude.

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2264 - France sous les étoiles

Certes l'Univers est vaste.
 
Et au regard des immensités galactiques, il est vrai qu'au premier abord nos préoccupations temporelles n'en paraissent que plus minuscules, mesquines et ridicules.
 
Face à ces grandeurs, beaucoup d'entre nous seraient tentés de tout diluer indistinctement dans les nébuleuses.
 
D'ailleurs selon les esprits prétendument profonds qui, étourdis par les milliards d'étoiles, perdent pied sous le vertige des étendues astronomiques, les frontières de notre quotidien se brisent fatalement. Et nos valeurs si hautes s'aplatissent au niveau de leurs semelles.
 
Devant l'incommensurable, ils s'effondrent eux-mêmes.
 
Incapables de préserver leur fierté, ils se vautrent dans le déshonneur. S'estimant insignifiants dans le Cosmos, ils se déprécient, se dévaluent, et sottement déclarent peser autant que des fourmis. Et finissent par relativiser leurs trésors, leurs vies, leurs rêves de dignes bipèdes. A leurs yeux la cause de la France devient bien vaine.

Et au final notre pays ne compte plus pour eux...
 
Sauf qu'à l'échelle humaine, en réalité aucune bataille n'est petitesse. Et c'est précisément parce que notre territoire national est modeste, étriqué, limité, comparé à l'infini de l'espace, qu'il est d'autant plus précieux au coeur des patriotes demeurant encore debout.
 
Sous prétexte que la Création dépasse nos vues de simples mortels et que les siècles loin au-dessus de nos têtes s'écoulent aussi vite que des secondes, nous devrions considérer notre sol natal comme bien peu de chose,  un sujet dérisoire, voire rien du tout ?
 
Il suffit juste qu'un coin de terre soit cher à notre âme pour qu'il vaille le prix des constellations. Pour chacun de nous, une seule pâquerette peut briller comme mille galaxies. L'essentiel ne se mesure pas en termes de quantité de matière mais d'amour.
 
Aimer notre patrimoine tout simplement, cela équivaut à brûler au nom du firmament, s'enflammer pour une femme ou glorifier Dieu. C'est un baiser de vérité adressé aux beautés de ce monde que nous portons au fond de nous.
 
Non, le sort de notre hexagone n'est pas une goutte d'eau dans la mer.

Sous cet océan d'astres embarqués dans l'aventure cosmique, chaque français a le droit de vouloir garder vivant son feu sacré.

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jeudi 3 avril 2025

2263 - Un homme hors du monde

Il prétend lui-même incarner l'homme parfaitement normal de notre siècle.
 
Sauf que ce bipède aux allures de zèbre n'a rien de banal.
 
Singulier représentant de son espèce, ce gros lourdaud de plus d'un quintal à la peau de bête et à l'esprit léger cache de drôles d'ailes derrière la tête.
 
Il ne se rend pas compte que les autres rampent et que lui s'élève.
 
Hors du commun, unique en son genre sur Terre comme partout ailleurs, ses pieds de géant ne reposent nullement sur le sol de vos certitudes pragmatiques mais côtoient directement les nuages.
 
Cet animal ressemble en vérité à un astre à plumes. Ou à un barde aux bottes pleines de brumes. Peut-être également à une enclume de fumée.
 
Il s'envole plus haut que vos idées plates, voit plus loin que vos vues de cochons, rêve non pas de vos plats et statiques topinambours mais de ses vertigineuses et tournoyantes galaxies. Chose curieuse, ce prince de l'azur à barbe d'ogre joue de l'orgue de ses doigts maladroits et chante aussi faux qu'un phoque. Mais avec quel bonheur il gonfle sa carcasse en l'honneur des nues !
 
L'essentiel avec lui, c'est que tout monte, tout s'aère, tout s'éthérise.
 
Il rend hommage au fumier autant qu'à l'infini, transforme vos vaines politesses en fromage et s'amuse à faire des bulles de poète de vos boules ordinaires.
 
Il écrase vos précieuses petitesses de ses semelles puantes en marchant vers l'éternité. Et vous montre le chemin des roses du bout de ses talons percés d'épines.
 
Il sautille ainsi sans nuance, verticalement, de flaques d'ondes en flocons de flotte et de vagues de boue en flots de fleurs car à ses yeux tous les sommets se valent pourvu qu'ils soient célestes, c'est-à-dire délicieusement parfumés du nectar des hauteurs.
 
Il s'imagine que vous le suivez tous dans ses normes supérieures qu'il estime universellement partagées.
 
Ce dévoreur de lumière à l'âme si pure ne sait pas que vous êtes différents de lui, il croit naïvement que, vous aussi, vous planez à ses côtés.
 
Mais en réalité cet ange aux apparences de balourd vogue depuis toujours au-dessus de l'Humanité telle une flamme dans le ciel, seul avec ses neiges sublimes.

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mardi 1 avril 2025

2262 - Homme de feu

Texte d'après un tableau du peintre Aldéhy

Non, ce garçon n'est pas efféminé.
 
Si vous pensez qu'il arbore des apparences de fragilité, c'est que votre regard est faussé par les tromperies de ce siècle.
 
Ses allures sont certes modernes : sa mine est contemporaine, son vêtement actuel, sa coupe de cheveux en vogue.
 
Ses traits reflètent les normes de notre temps, il est vrai. Il pourrait s'appeler Kevin, Paul ou Johnny.
 
Mais son âme, intègre, sans âge, incorruptible, correspond à celle de l'homme éternel.
 
Il se sent dans la peau d'Adam, en réalité.
 
Ses yeux ne ressemblent nullement à ceux de la biche soumise, ainsi que vous le croyez : ils brillent plutôt comme les flammes contenues du gladiateur. Il n'a pas sur les lèvres les artifices de la donzelle en fleur cherchant à s'adoucir, mais l'éclat carnassier du loup. Sa face n'a point les délicatesses de la femelle effarouchée mais les virilités du phallocrate racé.
 
Voici l'incarnation du mâle originel.
 
Vous ne le voyez pas tel que le Ciel l'a fait parce que ce monde nie sa nature, dénigre sa vigueur, raille sa noblesse, le déchoit de sa hauteur.
 
Vous le prendrez peut-être pour la figure séduisante et stéréotypée de la masculinité frelatée, féminisée,  édulcorée, selon vos critères esthético-sociaux...
 
A travers ce représentant de la martiale beauté vous imaginez avoir affaire à une onde tiède censée caresser vos rêves de chiots... Pauvres faux-évolués que vous êtes !

En vérité ce visage qui vous fixe si intensément, vous qui avez renoncé à l'authenticité des sexes, personnifie l'astre brûlant de votre univers de frileux !