jeudi 31 octobre 2024

2216 - Les arbres et moi

Quand je sors en forêt, je pars à la rencontre de géants aux gueules dures, aux troncs inflexibles, aux bras  cassants, aux coeurs en bois et aux racines cachant plein d'histoires...
 
Les arbres sont des amis rêches au contact rude. Je me heurte à chaque fois à leur froideur de pierre et à leur silence séculaire. Ils prennent naturellement des allures augustes et leurs faces impassibles sont aussi impénétrables que le marbre.
 
Pas facile d'entrer en communication avec ces vastes statues végétales !
 
Pour paraître si austères, ces êtres tellement attachés à leur sol natal doivent penser à des choses bien profondes...
 
Plus ils pèsent lourd, plus leurs idées volent haut. C'est ce qui fait leur grandeur.
 
Vieux et noueux, ils semblent plongés dans d'insondables méditations... C'est peut-être d'ailleurs pour cette raison qu'ils ont les pieds sur terre et la tête dans les nuages.
 
Afin de mieux les approcher, je dois me montrer à la hauteur de leurs vues.
 
Avec leurs traits graves, leur peau rugueuse, leurs regards d'ogres, ils ne sont pas d'un abord aisé...
 
Je me confronte à leurs branches brutales comme si j'étais un fétu de paille, me sens une brindille devant leur présence imposante, me sais guère plus important qu'un roseau sous leur ombre écrasante.
 
Mais ce qui nous rejoint essentiellement, eux et moi, c'est qu'en dépit de nos pesanteurs et âpretés d'incarnés, nous portons en nous l’éclat des causes célestes et la légèreté des rêves.

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mercredi 30 octobre 2024

2215 - Je pulvérise le féminisme !

Je clame ouvertement mon antiféministe viscéral.
 
Je ne reconnais aucun droit aux femmes de se comporter comme des hommes.
 
Insensible aux revendications de ces pondeuses d'inepties, sourd aux caquètements idéologiques de cette volaille hystérique, indifférent aux doléances de cette espèce faite pour enfanter dans les larmes, je destine mes plus cinglantes répressions phallocrates à ces dindes  féministes.
 
Je crache sur leur autel putride.
 
Plus elles seront vindicatives, plus elles aviveront mes férocités.
 
Peu de beaux esprits -ou de virils tempéraments- assument d'exposer des positions aussi controversées que les miennes. Dans notre société aseptisée, rares sont ceux qui ont le courage de défendre les vues tranchées de leur âme intègre.
 
La plupart ont la trouille.
 
Ils préfèrent soit se taire purement et simplement, soit s'aligner veulement sur la pensée flasque de leurs contemporains castrés.
 
Ils choisissent la lâcheté intellectuelle et le confort social à l'éclat et la crudité des vérités éternelles.
 
Loin de ces avaleurs de petit lait et autres adeptes d'eaux plates, au lieu d'adopter les douceurs du mensonge et de me laisser caresser par l'air vicié de ces temps troublés, je me suis jeté avec gloire dans le feu !
 
Ce brasier céleste qui me galvanise et les brûle, eux les tièdes, eux les amorphes, eux les frileux !
 
De mon acier patriarcal je forge la massue avec laquelle je fracasse sans état d'âme les inconsistantes poteries doctrinales des suffragettes !
 
Je plume cette poulaille de gauche en rébellion contre la souveraine loi du mâle, je la vide, la broie, la réduis à ce qu'elle est en réalité : rien du tout.
 
Une fois dépecées, écrabouillées, anéanties, je place ces carcasses de bécasses sur le trône de leur infinie bêtise : le grill de l'ogre machiste triomphant que je suis !

Je ne fais qu'une bouchée de cette femelle engeance transformée en brochettes.

Ainsi finissent les adversaires de Zeus.

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mardi 29 octobre 2024

2214 - J'aime les vieux "fachos"

Moi j'aime les vieux "réacs".
 
Les vrais, les purs, les pas gentils.
 
Je me sens bien en compagnie de ces chardons à la dent dure, de ces loups aux vues carnassières, de ces citoyens cinglants et aigris, de ces enfants de la patrie mal vus à la poigne pas tendre du tout et à la pensée extrêmement droite !
 
C'est parce que leur verbe brûle de vérité qu'il me réchauffe tant le coeur...
 
Chez eux il y a des livres de Céline, des portraits de Pétain, des armes accrochées aux murs de leurs salons et plein d'autres choses pas jojos qui sont loin de me déplaire.
 
Ils parlent sec, pensent de façon tranchée, mangent tricolore, boivent de la vinasse de France, demeurent bornés en deçà de nos frontières et regardent  les étrangers franchement de travers.
 
Rien que pour ces quelques raisons qui paraissent futiles, ils ont toute mon amitié.
 
Leurs idées anguleuses sont taillées à la hache. Ils s'enflamment pour des querelles d'un autre âge, vouent leurs contemporains au fumier éternel, méprisent les moutons qui les entourent, détestent la démocratie qui les a vu naître.
 
Ils méritent mon estime.
 
Ces drôles d'oiseaux ne sont certes pas des mauviettes, eux au moins : ils volent aussi haut que les aigles, ne manquent pas de tempérament, chérissent la grandeur et cultivent chèrement le sens de l'honneur.

Voilà des hommes qui ne sont point des épaves !
 
Leur ciel idéal, même s'il semble bien noir aux yeux des frileux, n'en est pas moins éclatant. Ces parias de notre société aseptisée brillent tels des astres à travers mon regard complaisant.
 
Leur racisme -qu'il soit méchamment viscéral ou simplement civique-, leur idéologie enflammée, leurs défauts de fer, leur âme intègre ne rebutent que les faibles, les petits, les castrés : loin du flasque humanisme de notre siècle effondré, ils ruminent des sentiments de feu, de roc et de lumière !
 
Ils assument ce qu'ils sont sans masque ni excuse, ils défendent leur cause à visage découvert, fiers de leur rigueur, et affrontent avec courage les marées plates d'ovins au sang tiède.

Leur férocité non feinte me les rend drôlement sympathiques !
 
Ils ont l'immense avantage de détonner d'avec le reste des gens placides. Avec eux, le monde s'enrichit de caustiques différences et s'embellit de durables étincelles.

Ce qui a la vertu d'éclairer mes nuits peuplées d'ennui et de pimenter mes jours plombés de lassitude car avec les vieux "réacs", soyez certains que je m'amuse comme un fou !

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dimanche 27 octobre 2024

2213 - La surprise

Texte d'après un tableau du peintre Aldéhy

Depuis longtemps elle avait remarqué une forme vague s'agitant dans la brume, aperçu une figure claire brassant les flots, observé des mouvements incertains dans les marécages.
 
Quelle créature inquiétante, ou prodigieuse, pouvait donc se cacher sur ces eaux troubles, entre les herbes folles et les ombres mouvantes ?
 
Intriguée, rêveuse et ingénue, la jeune fille espérait voir un être fantastique surgir de cette végétation confuse.
 
Elle croyait aux spectres radieux, aux légendes étincelantes, aux étoiles tombées du ciel...
 
Amie du mystère, de l'étrange et du merveilleux, son coeur ne battait que pour des causes poétiques, lointaines, désincarnées.
 
Elle attendait que l'impossible se produise, la tête pleine de pensées lumineuses, l'âme aussi légère que possible.

Entre naïveté et idéalisme, elle cherchait l'exaltation.

Mais un matin la bête sortit des profondeurs et s'éleva dans les airs, juste devant ses yeux. Ce qui la réveilla brutalement de ses illusions.

Et ce qu'elle vit fut finalement bien mieux que ce qu'elle avait imaginé.

Un ange la salua de ses ailes blanches.

Eclatant de beauté, paré de sa robe somptueuse, il s'agissait tout simplement d'un cygne.
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samedi 26 octobre 2024

2212 - Promenade en forêt

Octobre est un ogre à la barbe ocre et aux haillons d'or.
 
Une immensité de braises sous un ciel de glace, un océan de flammes couchées sur le sol, un déluge d'étoiles éphémères mettant le feu sous nos chaussures mouillées.
 
Oui vraiment, l'automne est un fracas de couleurs cuivrées, une illumination d'arbres en deuil, une déflagration végétale aux étincelles pleines d'artifices.
 
J'entre dans la forêt comme dans un tombeau lumineux.
 
L'explosion de feuilles me réveille et l'orage d'oxygène me fait aussitôt tourner la tête. Les ombres m'écrasent, les troncs m'effraient, les senteurs m'allègent.
 
Mes pas en ce lieu résonnent telles des bombes dans un cimetière. Et il me semble que tous les hôtes qui s'y cachent les entendent.
 
Sous les crissements de mes semelles, je ranime des fantômes endormis. Rien qu'en marchant, je fais jaillir d'invisibles entités de l'humus. Juste en passant dans ce bois, je ravive des vieilles légendes oubliées...
 
La sylve se referme sur moi : elle m'embrasse de ses baisers jaunis et m'enveloppe de ses bras de cadavre.
 
La mort y apparaît toute dorée et l'air y demeure poisseux de mélancolie. Loin de la pureté des sommets, proche des lourdeurs de la terre avec ses parfums d'humidité et de pierre, la saison enflammée inspire au promeneur des rêves aussi funèbres que radieux.

Elle incarne dans toute sa splendeur la tempête statique et le tonnerre poétique.

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vendredi 25 octobre 2024

2211 - Je vis dans une cabane

Ca y est ! J'ai abandonné ma vie de citadin pour m'installer dans un trou, loin de tout, au fond d'une forêt.
 
Je suis à présent entouré de broussailles et je deviens l'égal des herbes et des arbres, au centre de nulle part, en un lieu d'oubli, juste sous l'immensité du ciel.
 
Avec quelques oiseaux pour seuls visiteurs, le vent pour naturelle ambiance et le temps infini devant moi.
 
Et, peut-être aussi, la lourdeur de l'ennui pour mes longues heures de léthargie à venir... Mais ce sera le prix de la paix, la contre-partie de cet exil vers l'essentiel, le plomb nécessaire à ma légèreté retrouvée.
 
Mais aujourd'hui, plus aucun matériel ne me pèse. J'ai laissé derrière moi les artifices de la civilisation. Désormais je n'ai besoin que d'air et de verdure, de cailloux et de nuages, d'aubes glacées et de crépuscules funèbres, ces joies âpres faites pour les âmes aguerries.
 
Et pour m'envoler dans ma nouvelle existence de marbre, je m'enivre sans mesure de solitude. Et de rien d'autre. L'isolement, ce cloître intérieur qui généralement constitue une source d'angoisse et de déprime pour le monde... Mais qui, ici, prend une valeur inestimable. C'est mon bien le plus précieux, mon trésor d'ermite, mon refuge d'aigle frugal.
 
Il ne me reste qu'à faire un feu et méditer.
 
Mes compagnies ne sont plus les mêmes. A la place des hommes, les bois. En guise de présences, les ombres des branches. Pour remplacer le bavardage, le choc de la hache, le chant de la flamme, l'éclat de mes pensées.
 
Et un confort de bête pour dernier luxe.
 
Et là, sur le seuil de ma cabane, contemplant la braise qui se mêle à la cendre, j'adresse mes sobres mots à l'invisible en attendant que la nuit recouvre mon toit de son voile suprême et le fasse disparaître tout-à-fait aux yeux de tous.

Demain matin je me réveillerai sous la lumière neuve de mon asile de rat.

Heureux.

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mercredi 23 octobre 2024

2210 - Plouc

Moi je tire grande fierté de porter des bottes toutes crottées, d'adopter des coutumes de sanglier, d'arborer des allures d'ogre des bois.
 
Je suis un plouc.
 
Un vrai de vrai, un gros péquenaud des champs, un rustaud rural, une bête épaisse à la peau rêche et à l'âme tranchée.
 
Avec les pieds dans la boue et les vues plus basses que le fond du fossé, les pognes dans le fumier et les pensées dans la mare, la tête au ras des pâquerettes et le groin dans le cul des vaches !
 
Et les idées pas plus hautes que ça.
 
Je ne fais pas de manières. Loin des politesses parisiennes et des coquetteries en vogue, je ne fais guère dans le raffinement.
 
Mais dans l'authentique brute des broussailles, l'antique lourdaud de la cambrousse, le rustique arriéré de la friche.
 
Mes sentiments sont à couper à la hache. Mon coeur est fait non pour les fleurettes mais pour les enclumes. Je n'avale pas de l'eau tiède mais dévore des flammes. Je n'aime que les festins brûlants au goût de vie et de sang, les breuvages glacés, les ivresses carnassières et les rêves mortels.
 
Vêtu tel un gueux, aussi sale que possible, plus puant que la nature elle-même, je ne connais pas les chichis des chochottes enrichies. Je marche dans la bouse et m'assieds sur des souches.
 
Mes jours sont pleins d'orages et de lumière, de terre et de nuages, de flotte et de feu. Je les saupoudre soit d'épines et de purin, soit de cailloux et de paille : cela ajoute encore plus de piquant à l'aube et de saveur au crépuscule.
 
Sous mon chapeau, la tempête. Dans mes mains, des patates. Sous mes semelles, mes racines.
 
Et dans mes poches, rien que l'essentiel : l'air du terroir. Ce ciel qui sent tellement bon le terreau, cet azur qui ressemble tant à ma masure, cet éther qui m'est si cher, cette atmosphère que je préfère à tout le reste...
 
Dans mon trou de borné, je vis heureux comme un bûcheron corné.

Moi le bouseux, moi le glaiseux, moi le cul-terreux, moi le suiveur de mottes et non de modes, versé dans les rudesses des labours plutôt que dans les finesses de l'amour, plus proche des courgettes de mon courtil que des courbettes de la ville, je ne suis décidément pas une brindille parfumée de Paris !

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samedi 19 octobre 2024

2209 - Je suis un mâle primaire

Moi, je suis un macho primaire et radical, pur et dur, sec et tranchant.
 
Mon coeur de sanglier hirsute n'est ni tendre ni tolérant à l'égard des bichettes féministes mais au contraire âpre et féroce, rude et carnassier.
 
Loin de m'apitoyer sur le sort des femelles de gauche en larmes, j'enfonce le clou : au lieu de sortir mon mouchoir je brandis ma badine et cingle tout ce qui se révolte et gémit !
 
Je flagelle implacablement les porteuses de jupons en crise d'hystérie.
 
Mon antiféminisme est brutal, foudroyant, sans la moindre nuance.
 
J'écrase, aplatis, pulvérise toute résolution de suffragette en émoi ! Je suis une massue de masculinité en marche, un bulldozer de testostérone en ébullition, un rouleau compresseur de phallocratie explosive.
 
Je réduis à néant les caquètements de la volaille en rébellion.
 
Et crache comme un ogre, tonne aussi fort qu'un orage, fonce dans le tas ainsi qu'un taureau.
 
Puis déchiquette ce qui reste à mes pieds, tel un loup.
 
Après avoir magistralement fait taire cette engeance contestatrice, je jubile de satisfaction devant mes oeuvres d'utilité patriarcale.
 
Je ne fais pas dans le flasque humanisme gauchiste mais dans le vrai, l'authentique, l'universel progrès de la virilité.
 
Force, intégrité, vérité sont mes seules lois.

Châtiments et épines pour les émancipées, honneurs et caresses envers les soumises !

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jeudi 17 octobre 2024

2208 - Musique triste

Le violon s'afflige et moi, sans autre raison valable, je pleure.
 
Le poids du ciel tombe alors sur mes épaules et sous mes pas je sens toute la légèreté du vent.
 
Je suis écrasé et consolé tout à la fois.
 
D'immenses vagues de mélancolie s'abattent sur mon front et je me noie délicieusement dans un océan de spleen.
 
Je sombre et je m'élève en même temps.
 
La musique s'accorde mortellement à mon humeur.
 
C'est bête, mais la tristesse me donne des ailes, de l'envergure, plein de hauteurs.
 
Partagée entre lumière et larmes, mon âme monte jusqu'aux sommets de l'extase.
 
Sous les sanglots de l'instrument, je deviens un géant qui s'envole.
 
Le chant aussi grave qu'un marbre, noir et somptueux, lourd et majestueux, lentement m'emporte dans un crépuscule de gloire où les ombres sont des soleils et les ténèbres des aubes radieuses.
 
Et je ne sais plus si je gémis ou si je me réjouis...
 
L'archet, à travers les notes funèbres qu'il fait naître, en réalité frotte les cordes du Cosmos. Et me dévoile les mystères de la Création, ainsi que ses éclats.

Il injecte ses austères beautés dans mon coeur, exacerbant mes sentiments, avant d'aller déposer ma peine aux pieds des anges.

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https://youtu.be/IDmjO4WFlKM

mercredi 16 octobre 2024

2207 - Ma cabane au fond des bois

Certes il m'arrive de me morfondre comme un rat dans ma cabane perdue dans les bois, loin du monde, privé d'électricité, de confort élémentaire, d'eau courante et d'écrans en tous genres...
 
Mais cela ne dure jamais bien longtemps et il me suffit de chercher les fruits de la saison, de parfaire ma maison de branchages ou bien tout simplement d'allumer un feu pour chasser mon ennui et retrouver ma joie primitive.
 
Alors je ne pense plus aux artifices de la civilisation, tout occupé que je suis à des petits riens qui à mes yeux deviennent des oeuvres essentielles aussi éblouissantes que des rêves éternels.
 
Et je fais de ma minuscule affaire tout un univers plein d'enchantements.
 
Mes heures les plus humbles se peuplent de présences radieuses aussi réelles que des pierres précieuses et s'enrichissent de flammes pareilles à des êtres de chair. Des prodiges s'opèrent sous mon regard attentif. Je découvre des trésors sous les feuilles mortes, les arbres me dévoilent leur visage caché et la moindre étincelle se change en étoile.
 
J'accède à une dimension secrète.
 
Au milieu de la végétation sauvage, aux antipodes des cités bruyantes et superficielles, encerclé par la friche et la solitude, n'ayant pour glorieuse assise que l'humus, je trône souverainement sur mon royaume de broussailles.
 
Parmi les herbes folles, les fleurs rustiques et les fourrés, je m'étends et me repose, aussi auguste qu'un roi.
 
Avec mes terres si légères, mon toit si ténu, ma braise si modeste et mon âme si vaste, j'ai trouvé un bonheur à ma mesure, là-bas dans ce trou sans nom, quelque part entre la verdure et l'horizon.
 
Délesté de mes pesanteurs citadines, déconnecté des fibres futiles, débarrassé des liens superflus, débranché des fausses réalités, libéré des chaînes de ce siècle, j'aime aller me noyer dans la brume de cet asile épargné par les séductions de la modernité et demeuré aussi âpre et pur qu'aux temps bibliques.
 
Je veux m'éloigner des fureurs technologiques, fuir les stériles agitations, me retirer de la société, aller jusqu'au bout de mon chemin d'évasion pour me réapparaître sous la lumière et le vent, l'azur et la pluie, la neige et le soleil.

Là précisément où montent mes pensées ultimes et où se confondent naturellement l'aube et le crépuscule, le ciel et la forêt, le sol et les nuages.

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mardi 15 octobre 2024

2206 - Hommage à Christian FROUIN

Il était toute la légèreté du Vieux-Mans.
 
Une sorte d'entité illustre et furtive, une légende colorée du quotidien, une allégorie aux ailes vives virevoltant dans l'air de notre temps.
 
Sa carcasse élancée reconnaissable de loin annonçait invariablement de bonnes nouvelles : il passait dans les rues en laissant derrière lui un sillon de bonheur. Ses mots bénissaient et jamais ne maudissaient.
 
Il apparaissait comme le printemps sur les pavés, l'aube au-dessus des grisailles de la ville, l'étincelle au sein des torpeurs dominicales, le soleil sous la pluie : le personnage brillait en maintes circonstances et en toutes saisons de sa seule présence entre les murs de la cité antique.
 
Authentique surprise du jour, il offrait des fleurs aux passants qu'il croisait. Avec plein de fraicheur dans le coeur et autant d'azur dans les yeux.
 
Sans autre raison que par sincère amour de ses semblables.
 
Il abordait les gens de sa mine radieuse, qu'ils fussent riverains de toujours ou simples oiseaux de passage, et dans un geste de gratuité aux accents délicieusement surannés, fleurissait leurs poches d'une rose éternelle ou bien d'un coquelicot éphémère.
 
Sa façon à lui de laisser sa signature sur les âmes : tout en délicatesse.
 
Avec ses allures de papillon auguste, sa longue silhouette élégante, sa barbe de lumière et sa face grecque, il ressemblait à une statue palpitante.
 
Christian FROUIN, aussi surnommé "Frou-Frou", brûlait d'idéalisme, s'enflammait de compassion pour ses frères humains, lui qui déjà très tôt dans sa vie fut meurtri par l'Histoire.
 
Eprouvé par les tourments de son siècle, il avait su conserver intacte sa foi en l'espèce pensante.
 
Il croyait en le meilleur de l'Homme, laissant le pire au passé et peut-être aussi au pardon. Et préférait embellir l'avenir de son large sourire rempli d'espoir.
 
Véritable jardinier de la joie, il cultivait les beaux sentiments pour mieux récolter les richesses de l'Humanité.
 
Certes il n'appartenait pas au même camp que moi. Et se situait même radicalement à l'opposé. Lui le rouge, moi le bleu. Lui le progressiste, moi l'extrêmiste. Lui le doux, moi le dur. Pourtant j'éprouvais de l'estime pour cet adversaire idéologique. Bien qu'il fût athée, très à gauche et passablement rêveur dans ses prises de position, Frou-Frou se révélait un être foncièrement juste et naturellement bon, animé d'une flamme humaniste très pure.
 
Il incarnait la bienveillance et l'altruisme. Et je sentais en lui un souffle des hauteurs, entendais un évangile des sommets, percevais un trésor universel.

Il est parti droit au Ciel, je le sais.

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jeudi 3 octobre 2024

2205 - Installation sur la Lune

Depuis toujours je rêve de partir m'installer sur la Lune en n'emportant avec moi que l'essentiel : une souche de chêne, des pommes de pin, quelques fagots. Et puis peut-être aussi deux ou trois vieux livres d'images pour ne pas m'ennuyer et une bonne paire de sabots pour faire de belles balades.
 
Juste ce qu'il faut pour être heureux, loin de tout, là-bas sur le sol de cet autre monde.
 
Et passer ainsi une bonne partie de mon temps libre à contempler la Terre de loin, sans plus d'attaches, l'âme aussi légère que les pierres lunaires.
 
Me retrouver seul avec des ombres, des roches et des fantômes dans cet océan figé de régolithe.
 
Me perdre sur des routes sans nom, vers des horizons merveilleux ou effrayants, entre cratères sombres et plaines blanches... M'éloigner des vaines agitations terrestres, couper les ponts avec mes repères natals, prendre mes distances avec les bruits de la planète bleue et fouler ce royaume de mortel silence et de fatale beauté, les pieds couverts de cendre, le coeur débordant de sérénité, le front éclairé par la lueur atténuée du globe d'azur...
 
Demeurer à jamais hors des réalités prosaïques du plancher des bipèdes qui en ce siècle de tous les miracles technologiques ressemblent tellement à des veaux... Ou pire : à des machines.
 
Oui, je souhaiterais rompre avec mes racines de lourdeur et adopter des ailes de papillon pour parcourir ce désert de pure poésie... Ne garder de ma vie de terrien que les souvenirs les meilleurs, n'embarquer sur mon dos que les bagages les plus indispensables, n'emmener avec moi que les choses réellement vitales : de quoi m'asseoir sur un reste d'arbre et faire du feu en lisant des ouvrages de gravures d'Epinal.
 
Telle serait ma plus grande joie de vagabond sidéral.
 
Alors, du fond de mon foyer campagnard, assis au bord de l'âtre, je regarde brûler les boules résineuses mêlées de branches sèches qui crépitent ensemble.

Fasciné par l'humble flamme et ébloui par les étincelles jaillissant de ma cheminée, au coeur de la nuit j'attends l'heure propice pour m'endormir, doucement emporté par mes songes, entouré par la sylve, bercé par le vent, déjà oublié du reste des hommes.

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