Blanchir des cathédrales noircies, reconstituer dans l'esprit des époques révolues des monuments en péril conçus il y a deux, quatre, cinq siècles, mille ans par des architectes morts et depuis longtemps réduits en poussière, mettre des béquilles à des châteaux de toute façon voués à la disparition, faire des moulages de têtes perdues... A quoi bon toutes ces gesticulations de restaurateurs éblouis par des illusions de grandeur ? Recoller les morceaux érodés du patrimoine historique vaincu par le temps : vaine mission !
Notre siècle plus que tous les autres sacralise le passé. Cela est sot, cela est profane, cela est superflu. L'essentiel n'est-il pas d'admirer ce qui est vif, proche, présent ? Ce qui doit être respecté, n'est-ce pas la chair plus que la pierre ? Ce qui doit être glorifié, n'est-ce pas le coeur palpitant mieux que les crânes jaunis ? Ce qui doit être vécu, n'est-ce pas notre quotidien plutôt que par procuration ces chimériques âges d'or des anciens ?
Que vaut un vitrail de cathédrale devant un souffle humain ? Les "trésors" médiévaux tombent en ruine, et alors ? Faire tant d'histoire pour restaurer les ouvrages du passé, quelle onéreuse indécence ! Je ne crois pas au poids hypertrophié que le passé donne aux choses. Ce qui fait le prix des cathédrales, des pyramides égyptiennes ou même de la Tour Eiffel, est-ce véritablement leur lignes, leurs dureté, leurs hauteurs ou bien simplement leur âge ?
Hier le centre Beaubourg à Paris était considéré comme un ratage. Aujourd'hui on commence à le regarder d'un oeil bienveillant. Demain ce sera une merveille.
Les cathédrales ne valent rien. Les pyramides sont caduques. La Tour Eiffel se fout du monde entier. En vérité la vie est dehors, au soleil, sous la pluie, dans le vent, parmi la foule des hommes, loin des pierres, au coeur de nos viscères, au fond de nos âtres, sous nos draps, tout proche de nos pieds, dans le creux de nos paumes, au bout de nos lèvres, à deux doigts de nos cheveux. La vie est là, dans les détails les plus banals, les plus insignifiants de nos journées. Le reste n'est qu'artifice de pierre et de métal.
Blanchissez vos cathédrales, restaurez vos monuments, sondez vos pyramides, moi je contemple l'escargot sous sa coquille frêle qui mollement, de son pied unique glisse sur ma feuille de salade, plein d'un baveux, universel, vivant mystère.
samedi 19 mai 2007
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Liste des textes
2477 - Après la peine, la paix
2476 - Tristesse en fête
2475 - La tache
2474 - La marche des secondes
2473 - Déliré-je ?
2472 – Vieillesse
2471 - Le tour de ma cellule
2470 - Qui me croira ?
2469 - Mon avenir lointain
2468 - Mes amis les rêves
2467 – Grise nourriture
2466 - Je m’enfonce dans la nuit
2465 - Loin des femmes
2464 - Du néant vers la lumière
2463 - Mes trésors dérisoires
2462 - Aucune visite
2461 - Des ombres me parlent
2460 - Une porte s’ouvre
2459 - Les passages du temps
2458 - Le train des jours
2457 - Le directeur
2456 - Au pied du mur
2455 - La loi du plus “fer”
2454 - Ma maison
2453 - Poussière
2452 - Les larmes de la nuit
2451 - Mutisme
2450 - Mon fantôme
2449 - Hallucinations
2448 - Je compte les jours
2447 - Vie de flamme
2446 - De vagues souvenirs
2445 - Les étoiles s’éloignent de moi
2444 - Eclats de joie
2443 - Je parle aux murs
2442 - La marche des matons
2441 - Sainte à l’air
2440 - À l’ombre de ma vie
2439 - Ma geôle sans sucre d’orge
2438 - Des ombres
2437 - Les feuilles
2436 - Quelle issue à mon chemin ?
2435 - Des ailes dans la nuit
2434 - Éclat d’ange
2433 - Le temps me tue
2432 - Les flammes du silence
2431 - Plus de Lune
2430 - Un jour de plus
2429 - Mes rêves
2428 - Une journée ordinaire
2427 - Reine d’un monde
2426 - La pluie
2425 - Je perds pied
2424 - Un oiseau à ma fenêtre
2423 - L’évadé
2422 - Les barreaux
2421 - Eclats et monotonie de la prison
2420 - Les clés
2419 - Espérance
2418 - A travers la fenêtre
2417 - Les années passent
2416 - Une lettre mystérieuse
2415 - Le psychologue
2414 - La douche
2413 - Je tourne en rond
2412 - L’anniversaire
2411 - Quelques visites
2410 - Insomnies
2409 - La promenade
2408 - Mes repas
2407 - Mon lit
2406 - Les printemps
2405 - Solitude de fer
2404 - L’ennui
2403 - Tête de taulard
2402 - La fouille
2401 - Passe-temp
2400 - Les gens libres
2399 - Prière
2398 - Les heures
2397 - La mouche
2396 - La porte
2395 - Le plafond
2394 - Nulle compagnie
2393 - Bientôt fou ?
2392 - Départ
2391 - Mes geôliers
2390 - L’enfermement
2389 - Quatre murs
2388 - Des mots en guise d’ailes
2387 - Mon trou
2386 - Connexion céleste
2385 - Une flamme de l’azur
2384 - Seigneur cinglant
2383 - L’âme en l’air
2382 - Flamme verte
2381 - Au feu les plumes sombres !
2380 - Sombre forêt
2379 - Emportés par le vent
2378 - Un homme des nues
2377 - Courage de Bayrou
2376 - Un chemin sans fin
2 commentaires:
Dans le fond...c'est sûr !
Le vivant en priorité.
Mais la sauvegarde du patrimoine c'est aussi, non seulement se rassurer devant l'angoisse de l'avenir en soignant nos racines mais c'est également conserver la mémoire des bâtisseurs qui sont passés.
Ces vivants qui sont ailleurs.
Et puis, aussi, c'est beau.
C'est de l'Art.
Pas forcément blanchir, puisque ça, c'est gommer l'histoire des vivants de l'entre deux, ceux qui n'ont pas construits mais qui ont transformé, ou détruit parfois.
Ceux qui ont laissé un peu d'eux, en effleurant la pierre de leur souffle ou de leurs doigts.
Pour l'escargot, oui, c'est une merveille.Il y en a, pas loin du banc et de l'arrosoir, dans mon jardin secret...Qui bavent!
C'est vrai que c'est joli un escargot qui bave. Plus en tout cas qu'un homme ivre. Mais ça, c'est juste une question de goût!
Pour l'art. Pour les cathédrales. Pour les bâtisseurs.
Et...beurc, un peu pour vous...beurc...aussi !
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