Charleroi, cité des ambiances mortelles, de la déprime imbriquée dans la
brique, de la morbidité esthétique est aussi la ville de tous les mauvais
rêves.
Romantique à souhait.
Charleroi, capitale de la mort.
Sa misère y est belle comme une agonie. Ses rues en pleurs sont ternies par
leurs larmes. Ses murs transpirent un passé lourd de poussière et de souvenirs
périmés. Elle porte un voile de couleurs sinistres. Abreuvée d’une mélancolie
plombée, l’agglomération s’enlise dans les sables oubliés d’une époque révolue.
Avec ses toits écrasés par les cadavres des siècles, ses cheminées crachant
de la ténèbre, ses fenêtres donnant sur des jours sans joie et le désespoir
débordant de ses trottoirs, la métropole est une ombre qui s’étend du matin
jusqu’au soir.
Tandis que la nuit il s’y donne des bals de fantômes. Des festivités de
morts-vivants. Des danses de spectres.
Chorégraphies du vent, du froid et de la tristesse... Uniques hôtes de ces mornes
réjouissances, seuls noctambules chantant en choeur, là-bas, dans le noir.
Au bout de ces boulevards et de ces impasses -interminable asphalte percé
de mauvaises herbes-, au fond de cet immense trou à rats, jusqu’au coeur des
moellons suintant le malheur, moi j’y vois le refuge des âmes sensibles, des
êtres épris de ciels épais et d’oiseaux sombres, l’asile des poètes captant des
mystères palpables, l’éden morose des chasseurs de papillons étranges.
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