C'était en fin de journée. Je traînais mon ennui sur les bords de Marne, le pas nonchalant. Les feuilles mortes crissaient sous ma semelle, les barques amarrées se balançaient mollement au gré du clapotis, des cygnes faisaient des gestes gracieux sur la rive...
Aux alentours de l'aéroport le ballet des avions à l'approche commençait à s'intensifier. Haut dans les airs, d'autres aéronefs laissaient de longues traces blanches dans leur sillage. Ceux-là ne faisaient que passer au-dessus de la ville.
Avec l'arrivée du crépuscule s'estompèrent les bruits ordinaires du jour. Alors je pus entendre, mêlées au bourdonnement sourd des Boeing dans la nue, et l'aile furtive de la créature élégiaque rasant l'onde et la plainte du corbeau au loin.
Je stoppai le pas pour observer le vol de quelques volatiles de belle envergure. J'admirais leurs allées et venues au-dessus de l'eau. En levant un peu plus les yeux, dans mon champ de vision apparut un des appareils sur le point d'atterrir. D'un mouvement imperceptible de la pupille, mon regard passa de l'oiseau à la machine.
L'aéroplane, que je distinguais assez bien d'en bas, changea de cap. D'un basculement ample il se mit sur le flanc, et dans cette manoeuvre son aileron m'envoya un reflet de soleil dans l'oeil. Ce fut comme un minuscule éclair dans le ciel.
Pendant quelques instants je demeurai là, silencieux, attentif près des flots paisibles. Les palmipèdes s'étaient rapprochés de moi, à l'affût de quelque poignée de pain providentiel. Des corvidés croassaient à l'horizon, tandis que les vaisseaux aériens chuintaient en entrecroisant leurs fumées rectilignes à proximité des nuages.
Les bêtes au long cou s'agitaient inutilement à mes pieds, quêtant vague quignon. Ne voyant venir aucune pitance de cette main humaine, elles se dispersèrent bientôt.
Des airbus s'approchaient, prêts à se poser à leur tour. L'azur commençait à s'assombrir et j'avais un peu froid sur les berges de la rivière.
Je m'en allai.
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