L'humble convoi s'ébranle dans la brume. Un vent d'automne soulève quelques feuilles mortes qui tourbillonnent autour des visages, puis retombent aux pieds des marcheurs, dont je fais partie. La nue est grise, plombée, le froid pénètre les coeurs en deuil. Les pas sont lents, pesants, feutrés. Le silence de la troupe est pétrifiant.
Les regards sont pénétrés, les fronts baissés, les mines affligées. De temps à autre des sourires dignes s'échangent entre deux murmures. Scène pénible. Et puis, après quelques minutes sombres et solennelles, un ange passe.
Moment de pure légèreté, instant de grâce. Le tableau pathétique se transforme et m'apparaît sous une lumière inattendue. Tout semble irréel, doux et lointain, idéal et serein. Comme si les suiveurs de la procession étaient désincarnés, hors du temps et du monde matériel. Mystère et beauté étrange de la circonstance...
Je vois une troupe d'êtres célestes escorter une étoile jusqu'au seuil du firmament pour lui dire adieu. Les faces qui m'entourent n'ont plus de nom. La poésie universelle a transfiguré les êtres et les choses. Et à travers les larmes j'entrevois le pur cristal d'une vérité éthérique révélée.
Le gouffre ouvert à mes pieds ne m'effraie pas, et la vue de cette chose qui gît au fond n'a point ce goût amer que j'avais tant redouté. J'y lance quelques chrysanthèmes, étonné par la sérénité de mon geste. Au passage d'un vol d'oiseaux au-dessus de l’assemblée, quelques têtes se lèvent au ciel. Tout est fini.
On vient de mettre un ami en terre.
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