- Qui donc gît dans cette tombe, elle n'a pas de nom ?
- Cette tombe n'a pas de nom en effet. Elle est vide.
- Vide ? Elle m'a l'air bien apprêtée cependant.
- Madame, qui que vous soyez, sachez que cette tombe est bel et bien vide. Le mort se fait désirer. Il traîne en chemin.
- Ne serait-ce pas Raphaël, ce mort qui fait des siennes ?
- C'est bien lui, effectivement.
- Alors sachez que c'était mon amant et que ça ne m'étonne pas de lui. Cela dit en tant qu'amante du défunt, je suis en droit de m'étonner de ne pas voir son nom gravé au haut de cette tombe.
- Madame, qui que vous soyez, amante d'un vivant ou d'un cadavre, souffrez que le défunt ait désiré faire graver les noms de ses aimées au sommet de sa pierre tombale. Par ailleurs le mort est tout frais, en général on s'occupe de l'épitaphe une fois le cadavre installé dans sa résidence, clé en main si je puis dire.
- Et quels étaient les noms de ses amantes, vil fossoyeur ?
- Attendez voir que je regarde les archives... Pour les noms à faire graver sur cette tombe vierge, il y avait Elodie, Christine, Isabelle, Ophélie, Kristel, Chantou, Marie...
- Avez-vous une Marianne dans votre liste ?
- Une comment dites-vous ?
- Marianne. M comme Mort, A comme Agonie, R comme Rigidité cadavérique, I comme Inhumation...
- Marianne... Attendez voir... Marie... Marie-Ange... Marie-Anne... Non, Marianne j'ai pas.
- Stupide manoeuvre, auriez-vous omis de noter le nom de sa dernière aimée ?
- Madame, je ne suis pas graveur sur marbre, mais fossoyeur. Ca n'est pas moi qui m'occupe de ce genre de détail. Je ne fais que vous lire les archives. Adressez-vous à qui de droit pour votre réclamation. De toute façon les archives seules font autorité. Si "Marianne" n'est pas dans le registre officiel, c'est que le défunt n'a pas émis la volonté de faire graver ce nom. C'est clair. A mon avis il ne vous aimait pas tant que ça.
- Le ferme, imbécile de manuel ! En fait c'est parce que je fus justement sa dernière amante. Mon nom n'est pas dans vos archives parce que le défunt n'a jamais su que je l'avais embrassé. Je n'avais même pas songé à ce détail stupide... A la minute où je fus son amante, il était déjà mort. Tué par ma propre main. Tant pis pour moi, je ne connaîtrai pas la gloire tombale. Allons, hâtez-vous dans votre tâche fossoyeur, on ne saurait faire attendre les morts.
- Madame, permettez-moi de vous rappeler que pour le moment c'est le mort qui se fait attendre.
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