La dévote et honnête épouse, estimable chrétienne éprise de chasteté, de propreté, de droiture, ne manquera pas, après s'être solennellement engagée à servir dignement son cher conjoint, de faire la première oeuvre pie de son état marital : devenir mère.
Dans ce dessein la mariée envisagera de gagner le coeur de son maître de la manière la plus intime qui soit. Dès le coucher du soleil, derrière les volets clos de la chambre génésique des époux légitimes, les pires résolutions charnelles devront être prises.
Là est la partie la plus délicate de l'affaire. En effet, bien des couples, sans doute trop purs, se montrent maladroits et pèchent sans le savoir le lendemain de leurs noces en entravant la chrétienne procréation.
Belles âmes ingénues ignorantes des nécessités profanes de la chair ! Le bon pasteur sera touché de découvrir tant de candeur chez les nouveaux géniteurs... L'homme d'Eglise cependant devra rappeler aux amoureux leur devoir. En vertu des serments échangés la veille lors de la cérémonie du mariage, il les encouragera promptement à se soumettre à l'humaine condition, à se résigner au devoir conjugal qu'impose leur récent statut. Ainsi est la loi du chrétien hyménée. Et le prêtre, le garant de son application.
Ce dernier qui aura uni les élus la veille à l'église pourra éventuellement porter secours aux plus timorés. Il mettra au service des plus innocents sa science, et ce dans le but avouable de donner à l'Eglise des enfants aptes au baptême, qui plus tard donneront à leur tour d'autres fruits, qui eux-mêmes ensemenceront les siècles à venir, et ainsi de suite jusqu'à la fin des temps.
Pour ces natures pures que la reproduction de l'espèce chrétienne demeure encore un mystère, l'Eglise a tout prévu. Le ministre du culte a beau être le serviteur des causes célestes, il n'en est pas moins frère des humains. Il n'est donc point étranger aux menus tracas de ses semblables. C'est pourquoi l'officier du culte soucieux de la bonne tenue du procès de la fécondation se transportera le soir du projet nuptial dans l'alcôve des procréateurs qu'il estimera trop ignorants des gestes de l'accouplement, afin de leur faire profiter de son savoir.
Et, pieusement penché sur eux, il tiendra dans la main une bougie pour mieux constater le bonne marche des faits, et éventuellement aider à la déchirure de l'hymen à la clarté de son cierge.
Au besoin, il aidera l'agent mâle à perforer le voile virginal récalcitrant de sa douce moitié par d'incessants encouragements. Il se peut toutefois que le chef de la future famille, malheureusement très peu avantagé par la nature, faille à son devoir. En ce cas pour le bien de tous, mais surtout pour sauvegarder la réputation du reproducteur, davantage glorifier les apparences, le porteur de chandelier n'hésitera pas à mettre à contribution sa propre personne s'il s'avère de meilleure constitution, afin de mener à terme l'âpre nécessité du renouvellement de l'espèce bipède.
En ce cas c'est le mari qui tiendra la chandelle et qui se fera le témoin, de loin, du bon déroulement de la procédure.
Ainsi le serviteur de l'Eglise, par constat direct, sera en mesure de certifier de manière irréfutable la consommation de l'alliance qu'il aura célébrée la veille. Chacune des deux parties sera par conséquent rassurée et se félicitera pour les bons services rendus par leur confesseur. L'ordre immuable des choses étant ainsi scrupuleusement respecté, la chaste conscience des uns et des autres demeurera intacte, chacun étant renvoyé à ses devoirs et n'ayant de compte à rendre à personne.
Qu'il en aille pour les hommes et les événements de ce monde selon cette infaillible harmonie.
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