Mademoiselle,
Avec grand dépit je mesure toute la différence entre la parcelle d'amitié congrue qui vous inspire d'austères et bienséantes amabilités à mon endroit, et la part majeure de commerce plus intime qui entraîne trop souvent vos paroles loin des pensées décentes auxquelles nous sommes accoutumés.
Si je vous réponds avec tant d'immodestie, soyez convaincue Mademoiselle que c'est surtout pour vous mieux plaire et garder intacte votre flamme. Lorsque dans les lettres que vous me destinez vos termes blessent l'honneur qui sied à une telle entente, je réagis avec une même audace, soucieux avant tout de constance, de durabilité, de réciprocité. Et non avide de sensualité. Ma ferveur impie est affectée. Pour être agréable à vos yeux je feins de partager vos désirs de voluptés lascives, alors qu'en réalité je suis, en vous lisant, sous l'empire d'un feu plus désincarné...
L'émotion élevée qui m'habite vaut mieux que l'ivresse commune, grossière et bien moins honnête des sens. Non Mademoiselle, je ne suis pas ce bouc épris de luxure que vous aviez imaginé. Ma place n'est pas sous vos dentelles, au seuil de votre hymen, au centre de votre fièvre, mais dans cet autel sacré qui palpite en vous. De grâce, pour l'avenir préservez ma chasteté de vos impudeurs. Comprenez qu'à force de lire vos missives, et ce indépendamment du sens de vos écrits, de leur contenu, mes sentiments se sont finalement réglés sur ces lignes vôtres qui pourtant violent ma mâle pudeur. Votre prose vient à moi chaque jour comme une amante à des rendez-vous espérés, sachez-le. En dépit des outrances que vous m'adressez, que j'attends et qui cependant offensent ma délicatesse...
Je ne vois que votre main qui tient la plume, et non pas les mots corrompus qu'elle invente pour me mieux perdre : ce qui bat dans ma poitrine est plus fort et plus sensible que ma virilité muette.
Cessez vos discours éhontés. Tenez-moi plutôt des propos convenables Mademoiselle, que je puisse sans rougir les faire entendre à mes plus respectables confidents : Madame ma mère et Monsieur mon père. Quel bonheur si je pouvais porter à leur connaissance notre amitié ! Depuis tant d'années qu'ils brûlent de me voir en vertueuse compagnie... Hélas ! pour le moment vous n'êtes pas digne de paraître sous le toit parental. Trop de passions charnelles de votre part gâtent nos rapports.
Que n'êtes-vous point portée vers les chastes et doux élans de l'esprit en proie aux tourments exquis de l'amour ? Plutôt que d'écouter les sombres ébranlements de votre corps femelle si faillible, apaisez votre nature ardente en vous consacrant aux joies innocentes des langueurs amoureuses : elles donnent des ailes aux âmes les plus rustres et parviennent à faire oublier les pesanteurs de la chair... Aimez-moi dignement Mademoiselle : aimez-moi de tout votre coeur.
Et rien qu'avec cet organe.
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