Dialogue entre la copie de la Joconde et son original, d'après un tableau d'Aldéhy
LA COPIE - Sous tes brumes se cachait un mystère, derrière ton sourire se devinait
une interrogation, au-dessus de ta tête planaient des ailes illustres. Mais me
voilà, moi ta soeur jumelle sortie de l’obscurité, venue rivaliser de couleurs
et de lumière... Et aujourd’hui tu vas recevoir la gifle du Soleil sur ta face
de marbre. Une tarte sur ta tronche de dinde farcie de mythes ! Plus haut que tes
ombres, il y a mes éclats. Tu as ébloui le monde avec tes artifices, je vais le
rafraîchir avec mes clartés.
L'ORIGINAL - Mon double, que crois-tu donc ? Pour mon bonheur le sort m’a placée là où
je suis depuis tant de lustres que je suis pétrifiée et irremplaçable. N’étant au
départ qu’un tableau classique, avec la renommée j’ai accédé au statut
prestigieux de statue indéboulonnable. Et tu voudrais usurper mon trône pour la
gloire de ton visage anonyme... Moi j’ai déjà un nom dans l’Histoire, tandis que
tu n’es rien. Et tu voudrais me chasser de mon cadre pour me remplacer ? Quelle
blague !
LA COPIE - Tu as vu mon allure, ma figure et toute l’enluminure qui va avec ? Ca
c’est de la peinture ! Au lieu de tes craquelures, de tes fissures, de ta peau
terne de vieille carne, toi la créature d’un autre siècle... Tu es le plus
célèbre réceptacle à poussière du Louvre. Tu n’es qu’une vieillerie, une
antiquité, une momie ! Vraiment, tu n’es plus à la page, pauvre image que tu es
! A la vérité, en prenant de l’âge tu es devenue aussi pâle qu’une vulgaire
copie. Vois comme je brille ! Je tranche tellement avec tes traits passés, ton
front froid, ton regard reflétant un temps révolu, mort, oublié... Au final, la
plus originale de nous deux, c’est moi !
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