Dans la steppe habitée par le loup et le vent, j'ai rencontré Natacha, une
fille de la Russie.
C'est-à-dire une enfant née de la neige et du ciel, l'exacte union de la
pureté et de l'infini, le mariage idéal entre le granit et la brume, la
tranchante confrontation du coeur avec la glace.
Dès que je l'ai vue sur son cheval de guerre, le front éclatant, les
pommettes comme deux silex, le sourire aussi virginal que l'hiver, j'ai renié
mes faux diamants d'avant, ces folles perruches de Paris, oiseaux parfumés de
fleurs mensongères au vol plein de vacuité. Oublié mes vaines conquêtes aux
dentelles légères et à l'esprit lourd, ces naufragées putrides des faubourgs de
l'amour superficiel.
Cette blanche créature que j'avais devant moi, pure, fière, sauvage,
ressemblait à une femme aux racines intègres.
Son âme claire enflammait son regard et me pétrifiait.
Subjugué par cette pierre vivante, j'allai cueillir pour elle une poignée
de ronces mêlées d'herbes incertaines... Sensible à mes airs de vieille France,
à ma face rugueuse et à ce présent sincère, l'étrangère au visage de vérité
m'offrit non son hymen mais sa lumière.
Je lui baisai la main. En me relevant, j'aperçus les clartés de sa gorge et
devinai la profondeur de ses pensées.
J'épousai alors l'immensité, embrassai les cailloux, pénétrai les mystères
de l'Est, m'envolai vers les sommets promis et ne revins plus jamais sur la
terre des traîtres de mon pays, désormais effacée de ma mémoire, trop ivre de
ces hauteurs nouvelles faites d'azur et de givre, progressant définitivement sur
les pas de Natacha.
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1 commentaire:
Le texte est superbe.
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