Tandis que je me repose, étendu sur l'herbe, elle gît devant moi.
Inerte et pourtant terriblement présente, massive, difforme.
Elle semble n'être qu'un vaste visage aux traits vagues et sombres, une
sorte de grimace de bois, une tête épaisse faite d'ombres et de creux, de noeuds
et d'arabesques.
C'est une bête enracinée au bord du chemin, une sorte de monstre immobile
qui passe ses journées à attendre sans but.
Cette souche fait peur et fascine en même temps.
A qui la fixe pensivement, elle raconte des vieilles histoires étranges et
mystérieuses... Des fables d'un autre siècle, des légendes d'un monde
révolu.
On imagine sans peine qu'au cours de sa longue vie, alors qu'elle était un
arbre auguste, imposant, robuste, des générations entières de hiboux, de
chevreuils, de renards, d'hôtes de toutes sortes trouvèrent refuge dans ses
branches, près de son tronc ou bien sous ses racines.
Et puis, après tant
d'années d'une gloire muette en ce lieu oublié, le roi plein de majesté est
devenu cette chose sans nom au profil inquiétant. Peut-être aujourd'hui amie de
loups imaginaires, de vagabonds rêveurs et furtifs et de fantômes nocturnes que
l'on ne voit jamais...
Et je m'endors, paisible, près de cette figure ogresque qui va pendant une
décennie encore, hanter les nuits de ce trou perdu, aviver l'imagination des
enfants, inspirer les poètes et effrayer quelques promeneurs.
Avant de s'effriter et disparaître à tout jamais sous forme d'humus.
Et perdurer on ne sait combien de lustres dans les esprits, à travers la
légèreté de ma plume.
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