On ne s'ennuie pas au cimetière de Clinchamp !
Certes, comme dans toutes les nécropoles du monde, les morts y gisent
monotonement alignés sous les pieds des visiteurs, l'air y est plus ou moins
respirable, l'ambiance pas très gaie, l'avenir guère réjouissant...
Et les tombes y demeurent éternellement statiques.
Sauf qu'en ce lieu spécifique, il y a quelque chose en plus : c'est là que
bat le coeur des pierres.
Au fond de ce gouffre d'inertie, l'éloignement, l'isolement sont tels que
tout ce qui se fige trop longtemps se met à respirer secrètement.
Puis se meut, s'envole, monte et rêve.
Comme lorsqu'un homme se recueille, que son âme fait le silence et qu'elle
commence à percevoir des phénomènes insoupçonnables, tus par les bruits
parasites du quotidien.
Dès lors qu'on y prête quelque attention, on se rend compte que la matière
la plus dure, la plus grossière, la plus enfouie finit par émettre des
signes, des ondes, des vibrations.
Cette flamme céleste couronne chaque tête, illumine chaque être, irradie
chaque corps créé ici-bas. A l'image des pensées s'échappant des caboches des
gens du coin, lesquelles pensées sont bien plus fines que leurs chapeaux de paille et
plus légères que leurs sabots. Le bouseux qui chante, lève les yeux au ciel ou
pense devient un astre. Ce qui confirme que même les ânes ont des fulgurances,
les sangliers des élégances et les souches des délicatesses.
Derrière les apparences brutes de ce qui constitue notre environnement
(éléments divers, entités, paysages et que sais-je encore), l'esprit éveillé
capte toujours des réalités plus subtiles. Et même si nul ne les saisit, ces
mystères qui palpitent dans l'ombre n'en existent pas moins.
Bref, la glaise, la poussière et les cailloux de ce trou sans fin nommé
"Clinchamp" se spiritualisent. Plus particulièrement dans ce village que
n'importe où ailleurs parce que, précisément, rien de notable, selon les
critères de ce siècle, ne s'y passe jamais ! Le terreau idéal, en fait, pour
qu'y croissent les fleurs les plus extraordinaires, loin du tumulte, des
lourdeurs et des regards profanes.
Ainsi, les stèles en ces terres reculées de la Haute-Marne murmurent-elles
parfois aux oreilles de ceux qui savent les entendre, des histoires fabuleuses
que je ne vous raconterais pas ici : elles ne peuvent être comprises que sur
place.
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