La femme de soixante ans devient nécessairement un repoussoir pour tout
homme en désir normalement constitué.
Sur le plan principalement esthétique, elle n'est plus considérée comme une
beauté à conquérir, une femelle à chasser, un papillon à épingler, un trophée à
lustrer.
Mais comme un objet encombrant qui commence à s'alourdir, un poids mort
particulièrement adipeux, un corps déchu de plus en plus flasque et répugnant
qui en société déshonore son conjoint.
Rarement la soixantenaire prend conscience de sa décrépitude, car assez
souvent elle continue de se maquiller, se ridiculisant en croyant s'embellir. Et
si elle suspecte sa chair de ternir, elle préférera s'enivrer de paillettes, ces
mensonges flatteurs remontés du fond de son miroir.
En vérité, à cet âge des premières pesanteurs, le fard l'enlaidit
tout à fait.
Mais ces artifices suffisent à entretenir chez elle l'illusion d'être
désirée encore.
Et plus l'araignée vieillira, plus elle ajoutera des étincelles factices
sur sa face sinistre. Et si les gaillards posent leurs regards sur ses misères
odieusement mises en valeur, c'est pour mieux s'en affliger. Ou en rire. Et non
pour en avoir un avant-goût, car ils ne se réjouissent nullement de faire un
festin de ces mets avariés.
Les traits de la rombière vieillissante s'empâtent, défraîchissent, perdent
toute valeur sur le féroce échiquier amoureux. Hier fleur de printemps parée de rosée, aujourd'hui algue
puante, le visage jadis célébré n'a plus que le prix des choses dérisoires chez
celle qui aborde le versant descendant de sa vie.
Si les intéressées elles-mêmes ignorent en toute mauvaise foi ces lourdeurs
du temps qui impriment sur elles l'image d'une grimace, faisant semblant de
prendre à la légère leurs rides et boursoufflures, ceux qui brûlent de virilité -et qui demeurent des aigles quelle que soit leur génération- n'entendent pas ces sornettes de cette oreille : c'est dans leur mâle nature, ils se tournent systématiquement vers de lestes et aériennes jeunettes.
Lesquelles succombent fatalement aux charmes augustes de ces chênes
arborant de nobles racines et de séduisants feuillages argentés. Ces demoiselles
en pâmoison tombent en effet comme des pommes vertes à leurs pieds, pendant que
les molles et bouffies, grasses et rougeaudes déclassées -parfois déguisées en pucelles-, y pourrissent tels des fruits gâtés.
Bref, la mégère refoule les oiseaux de la terre, tandis que le patriarche attire les anges du ciel.
VOIR LA VIDEO :
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire