Octobre est un ogre à la barbe ocre et aux haillons d'or.
Une immensité de braises sous un ciel de glace, un océan de flammes
couchées sur le sol, un déluge d'étoiles éphémères mettant le feu sous nos chaussures mouillées.
Oui vraiment, l'automne est un fracas de couleurs cuivrées, une
illumination d'arbres en deuil, une déflagration végétale aux étincelles pleines
d'artifices.
J'entre dans la forêt comme dans un tombeau lumineux.
L'explosion de feuilles me réveille et l'orage d'oxygène me fait
aussitôt tourner la tête. Les ombres m'écrasent, les troncs m'effraient, les
senteurs m'allègent.
Mes pas en ce lieu résonnent telles des bombes dans un cimetière. Et il me
semble que tous les hôtes qui s'y cachent les entendent.
Sous les crissements de mes semelles, je ranime des fantômes endormis. Rien
qu'en marchant, je fais jaillir d'invisibles entités de l'humus. Juste en
passant dans ce bois, je ravive des vieilles légendes oubliées...
La sylve se referme sur moi : elle m'embrasse de ses baisers jaunis et
m'enveloppe de ses bras de cadavre.
La mort y apparaît toute dorée et l'air y demeure poisseux de mélancolie.
Loin de la pureté des sommets, proche des lourdeurs de la terre avec ses parfums
d'humidité et de pierre, la saison enflammée inspire au promeneur des rêves
aussi funèbres que radieux.
Elle incarne dans toute sa splendeur la tempête statique et le tonnerre
poétique.
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