mardi 30 septembre 2025

2412 - L'anniversaire

Soudain, la porte de ma cellule s'ouvrit.
 
Trois spectres apparurent.
 
Ou plutôt, je vis entrer mes geôliers habituels. Sauf que ceux-ci arboraient des silhouettes effrayantes et des visages méconnaissables. Les agents se tenaient debout à m'observer, comme amusés de ma stupeur. Sous leur casquette impeccable coulait un fleuve de cheveux gris. Ils portaient, de même, une barbe de cendre qui descendait le long de leur uniforme.
 
J'avais devant moi un trio de vieillards.
 
Des patriarches maigres, sans âge, fatigués. Mais demeurés visiblement consciencieux de leur travail.
 
Courbés, ridés, les gestes lent, fragilisés par le poids de l’ancienneté, ils affichaient tous un sourire radieux. L'un deux me présentait un énorme gâteau. Ce dernier s'adressa à moi :
 
– Joyeux anniversaire ! Un événement pareil, ça se fête en grande pompe !
 
Tremblant de peur en essayant quand même de faire convenable figure face à cette triade de revenants hirsutes, je répondis :
 
– Joyeux anniversaire ? Mais pourquoi donc ? C'est nouveau ça ! Jamais on ne m'avait accordé une telle attention auparavant. A quel privilège-ai-je donc eu accès ?
 
– Vous avez cent ans aujourd'hui ! Bravo pour cette longévité !
 
Et les croulants matons à l'humeur festive me chantèrent aussitôt en choeur un "happy birthday to you" touchant et un peu ridicule avec des trémolos qui trahissaient leur vieillesse avancée. Pour la première fois depuis ma condition de détenu, les surveillants me communiquaient un sentiment agréable. Quelle belle surprise ! Derrière leurs aspects dégradés, leurs apparences piteuses, leurs allures affaiblies et leur voix chevrotante, ils devenaient humains.
 
– Comment cela, dis-je incrédule ? Je suis devenu si vieux que ça ?
 
Celui qui me tendait la pâtisserie en souriant ajouta avec l'air le plus aimable possible :
 
– Oui vous avez atteint un siècle d'existence entre les murs de cette prison ! C'est exceptionnel. Vous êtes un respectable vétéran maintenant. Autant dire un hôte de marque de l'établissement pénitentiaire.
 
En effet, une multitude de minuscules bougies se dressaient sur le tas de crème... Une bonne centaine !
 
– Quoi ? Déjà ? Impossible ! Je n'ai pas vu passer ces années... Cela fait si longtemps que je suis enfermé ici ?
 
Prenant cette fois un ton davantage affectueux qui me toucha, le gardien poursuivit :
 
– Vous savez, nos protégés ne comptent plus le temps qui s'efface au bout d'un moment, et pour eux une vie sous les barreaux finit par ressembler à un voyage sans escale vers un horizon sans but. Lorsque arrive la date fatidique du départ définitif, ils s'imaginent encore jeunes... Ils ne se rendent pas compte de la ronde des saisons, des lustres, des décennies. Et oublient celle des astres, puis l'immensité de la perpétuité qui les emporte beaucoup plus loin qu'ils ne croient, jusqu'à en perdre la raison... Ils s'attardent sur leur présent statique tandis que le monde tourne sans eux. Allez, n'ayez pas peur, soufflez donc sur les chandelles ! C'est en votre honneur qu'elles brillent aussi nombreuses en ce beau jour ! Ca fait une éternité déjà que l'on vous garde au chaud, ça mérite bien quelques paillettes, non ?
 
Je sursautai au coeur de la nuit, en sueur ! La petite troupe de cerbères aux traits flétris et aux intentions si prévenantes disparut à l'instant où je rouvris les yeux.
 
Soulagé de ce réveil tout en regrettant d'être sorti si brutalement de cette aventure onirique qui aurait dû me mener je ne sais où, je cherchai un sens à cette drôle d'histoire me laissant un goût entre ravissement et inquiétude...

J'eus du mal à me rendormir, dubitatif, ne sachant pas vraiment si je devais considérer cette évasion nocturne comme un rêve affreux ou un doux cauchemar.

2411 - Quelques visites

En réalité je ne croupis pas si seul que ça dans la bulle austère de ma cellule. Je reçois diverses visites, toutes impromptues. Rarement il est vrai, mais ça arrive. A chaque fois c'est toujours inattendu et il faut avouer que je ne me resocialise pas si facilement avec ce monde qui tente de se remettre en contact avec moi. J'ai perdu l'habitude, je crois, des réceptions privées, réunions de salon et autres mondanités, qu'elles soient impersonnelles ou davantage intimes... Il me faut  pourtant accueillir dignement les quelques visiteurs qui daignent encore prendre la peine de se déplacer jusqu'à mon lieu de réclusion et leur faire bonne figure.
 
Il y a d'abord ces beaux messieurs les cafards, rigides, furtifs et hautains sous leur sombre carapace qui leur sert de costume de soirée. Ils n'apprécient pas trop la lumière de ma geôle mais ne refusent pas d'aller s'aventurer audacieusement dans l'espace découvert éclairé par la lampe pour y récolter les miettes éparses issues de mes anciens repas. 

Quels aventuriers ! Un authentique dépaysement que leur présence...
 
D'une courtoisie plus sépulcrale, viennent ensuite mesdames les araignées. Plutôt élégantes avec leurs manières distinguées certes, mais quand même assez glaciales dans leur approche, elles incitent naturellement à la prise de distance. Je considère leur venue comme une véritable surprise. Elles sont d'ailleurs tellement surprenantes que je sursaute systématiquement en les voyant apparaître à mes côtés. 

Effet garanti : dès que je les vois ces agréables dames de chambres me tendre leurs pattes, si affectueuses, mon coeur bat assurément la chamade...

Les demoiselles les punaises quant à elles ne font pas autant de chichis. Affectionnant ma proximité épidermique, elles se montrent moins arrogantes que les hôtes précédents à qui je fais un accueil modérément chaleureux,.. Bien qu'ayant une fâcheuse tendance à vouloir honorer ma couche d'une amitié aussi brûlante qu'envahissante, j'affiche envers ces dernières une certaine retenue, pour ne pas dire une franche froideur. Moi aussi j'ai mes petites aspérités sociales... 

Indubitablement, ce cercle de joyeuses créatures cherchant la sociabilité me réconforte de son opportune compagnie !

Malheureusement ces entrevues, qui au départ semblent motivées par de bons sentiments de la part de ces intrus, finissent souvent en horrible carnage. En général mes pauvres amis rampants se retrouvent collés à ma semelle. 

Quelle tristesse, vraiment !

Du fond de mon trou de pénitent, je ne dois pas avoir le sens de l'hospitalité convenablement développé, à mon avis.

lundi 29 septembre 2025

2410 - Insomnies

Il m'arrive parfois de passer des nuits blanches sous le ciel noir de ma réclusion.
 
Au lieu de partir dans la légèreté des rêves, je reste cloué au sol jusqu'à l'aube, alourdi par mes idées sombres. La lumière de ma cellule ne s'éteignant jamais, cela ne m'aide guère à fermer l'oeil pour mieux ouvrir mon âme aux doux mirages oniriques.
 
Etendu sur mon lit, je garde les yeux ouverts en fixant le vide du plafond. Et à travers cette surface éclairée qui se reflète en même temps sur mon visage, je vois des choses effroyables, j'entends des sentences terribles, je lis des mots de glace.
 
Toute la misère de ma culpabilité, le poids de mes agissements, les conséquences de mes choix.
 
Ce sont alors des heures de cauchemars éveillés, passées à ruminer sur ces murs qui m'entourent et que j'ai érigés moi-même. Sur cette tombe carcérale que par mes actes j'ai creusée. Sur ce néant où par ma faute j'ai atterri... Je m'enfonce alors plus bas que terre dans les profondeurs de mon trouble, sans pouvoir m'apaiser.
 
Qui donc au coeur de ma solitude, au fond de mon gouffre, dans l'enfer du silence viendra me soutenir ? Seule la caméra de surveillance, avec son regard déshumanisé, est témoin de ma détresse. Il n'y a nulle présence pour s'émouvoir de ma peine dans ces instants de faiblesse où je perds pied. Et je chute vertigineusement. J'aborde un monde de ténèbres où je me retrouve en compagnie de ma propre personne, et je fais face à une ombre qui porte mon nom... Et c'est la pire des réalités que de se découvrir dans toute la crudité de la vérité.
 
Mon insomnie infernale demeure secrète. Je souffre sans espoir d'être consolé. Et j'attends que tout finisse.
 
Après tant de pesanteur et de déprime vient l'aurore qui peu à peu efface mes tourments nocturnes.

Plus tard le matin, au moment de se lever, je m'endors enfin d'un sommeil réparateur.

2409 - La promenade

J'ai droit à une heure de promenade quotidienne qui a lieu dans un autre champ confiné que ma cellule. "Promenade" est un terme d'une involontaire ironie, en réalité ils s'agit non pas de changer d'air mais plutôt de remplacer le décor. De l'agraver dirais-je...
 
Ce n'est pas un coin de verdure mais un carré de ciment bordé de barreaux, avec un grillage au-dessus de ma tête en guise de ciel. Pas de quoi enchanter mon coeur, juste le nécessaire pour me dégourdir les jambes.
 
Dans ces moments je peux échanger quelques mots avec mes gardiens, l'ambiance étant relativement plus détendue. Ils savent que je me comporte toujours aussi docilement que l'attend le règlement. Je ne fais pas de vague, je suis une eau uniformément calme. Voilà surtout ce qu'ils apprécie chez moi, je crois.
 
La distance courtoise entre eux et moi suffit pour que règne un mutuel respect, sans risque de tomber dans un excès de familiarités ou de froideur. Dans mes rapports avec ces hommes en uniformes, j'entretiens ce qu'il faut d'esprit de civilité. Mon langage, mon attitude, mes gestes et mes sentiments ne dépassent jamais ni du cadre administratif ni de la bienséance humaine. Et eux font de même à mon égard.
 
Ainsi il m'arrive de leur adresser la parole lors de ces vadrouilles de couloirs, histoire de ne pas nous laisser geler réciproquement les pensées. Mes propos restent anodins :
 
– Les choses semblent paisibles aujourd'hui, n'est-ce pas ? La routine ne fait pas fatalement de mal...
 
Le simple regard d'acquiescement de l'agent m'offre l'assurance que le courant des jours ordinaires passe bien. La journée sera convenable et cordiale, comme d'habitude.
 
Nous vivons en bonne intelligence, eux les cerbères patentés de la prison, moi l'hôte du système carcéral.

De retour entre mes quatre cloisons de fer et de béton après soixante minutes d'évasion scrupuleusement encadrée dans un local tout aussi sinistre et hermétiquement clos, j'ai l'impression d'avoir voyagé dans un univers parallèle, aussi proche dans l'espace que lointain dans mon âme.

dimanche 28 septembre 2025

2408 - Mes repas

La cuisine que l'on sert aux criminels de mon espèce ne semble pas avoir été conçue pour qu'ils s'évadent deux fois par jour vers de mémorables hauteurs gastronomiques... Mais simplement pour les maintenir en vie. Ce qui est déjà beaucoup.
 
La qualité de mes repas demeure invariablement médiocre.
 
Pour autant, les rats ne feraient pas la fine bouche devant ces aliments. Je ne vaux pas davantage que ces derniers, aussi avalé-je tout sans broncher. Je trouve cela trop bon pour un condamné comme moi. J'aurais bien honte de m'indigner en ces circonstances sous prétexte que la soupe est mauvaise. J'estime ne pas mériter de me régaler avec. En effet, je me pourlèche de ce que l'administration pénitentiaire me fait ingérer. N'est-ce pas de ma part la moindre des bontés que de rendre grâce à l'institution qui se soucie de me traîter encore humainement, moi la bête, moi le gibier de cellule ?
 
Le pain que je mange entre ces murs qui m'accablent reste encore un luxe à ma portée, même si on le jugerait immangeable à l'extérieur de la prison.
 
Mes petits festins de taulard constituent autant de sommets appréciables dans mon quotidien misérable. 

D'âpres menus semblables à de maigres pommes aigres ramassées au milieu d'un champ de chardons. Une récolte de fruits infâmes certes, mais toujours mieux que des épines à se mettre sous la dent. L'avantage avec le bouillon insipide et frugal de l'indigent, c'est qu'il y a au moins de l'eau à boire dans la gamelle. 

Les âmes sombres ou éternellement insatisfaites voient dans cette austérité une perte de jouissance, une diminution de leur bien-être. Les gens simples s'y accommodent volontiers, le peu valant à leurs yeux mille fois plus que le rien.

Et puis, la moisson du crime étant nécessairement amère, de quoi oserais-je me plaindre dans ma situation ? Je bénis cette nourriture offerte qui me rassasie et ne maudis que mes mains de bandit !

De toute façon il faut bien que je savoure ce que je ne peux éviter de digérer. Faire le difficile ne m'avancerait pas à grand-chose. Je recevrai ce régime jusqu'à mon souffle final.

J'attends mon écuelle sans passion mais avec reconnaissance.

samedi 27 septembre 2025

2407 - Mon lit

Le lit de ma cellule représente l'espace le plus étriqué sur lequel je passe le plus clair de mon existence. Comme un radeau statique sur l'immensité des années qui lentement se consument, il constitue mon ultime refuge.
 
Avec lui je traverse les jours sans faire de bruit, j'avance platement mais sûrement dans ma vie de détenu. Il me fait voyager d'une heure à l'autre, de rêves en cauchemars et de quiétudes en larmes.
 
La nuit il m'emporte jusqu'au matin dans l'amnésie du sommeil libérateur, ainsi que dans les nuages des songes. Lors de mes insomnies, soit il me berce de sa tiède compagnie, soit il me glace les os de sa funeste présence, selon que je suis plongé dans une paix nocturne ou que de noires pensées me rongent.
 
Cette couche qui me fait voguer dans l'océan du temps incarne également mon cercueil. Je ne me fais aucune illusion : je vis, dors et mange dessus, mais surtout, j'y meurs mollement. C'est un quasi-cadavre qui s'allonge à chaque fois sur ce fatal matelas.
 
Un véritable sarcophage trônant misérablement dans un coin de cette pièce de quelques mètres carrés. Ce lieu maudit où je devrai habiter jusqu'à ma mort.
 
Ce point de repos restreint sur lequel je m'étends symbolise tout à la fois mon châtiment et mon répit, ma peine et ma délivrance, mon supplice et mon baume. Quand j'y suis couché, tantôt je pense à mon crime et le regrette, tantôt j'ai au contraire tendance à l'oublier et des idées légères m'habitent.
 
Je crois bien que lorsque je m'immobilise dans mon berceau de pénitent pour m'y recueillir ou y sommeiller, je ressemble à ces gisants sculptés que l'on voit dans certaines cathédrales.
 
Je suis las aujourd'hui et j'ai vraiment besoin de m'évader : j'envie et aimerais rejoindre ces défunts de marbre solennels et beaux dont les visages font face au ciel.
 
Figés dans leur linceul, ils ont les traits si paisibles...

2406 - Les printemps

Les ans s'écoulent à interminables pas de fourmi sous mon pitoyable plafond de neuf mètres carrés de surface. Je suis devenu moi-même un mur, un bloc de béton, un barreau.
 
Je fais partie du bâtiment, définitivement scellé à ma cellule. Comme si j'étais la table fixée au sol, le lit collé au coin de la pièce ou le siège des toilettes.
 
Certes, je partage le même statut d'immobilisme que n'importe quel meuble rendu inamovible de cet endroit où je vais finir mes jours... Je respire et palpite, vibre et m'enflamme cependant. Un vivant qu'on enchaîne et emmure peut il est vrai ternir dans ses apparences, mais souvent à l'intérieur survit en lui une parcelle de lumière. Une flamme originelle qui reste plus ou moins intacte, selon la nature des êtres.
 
Ma carcasse usée par l'ombre carcérale demeure pleine de rêves. Ainsi les printemps qui se faufilent sous ma lucarne ceinte de fer me réveillent de toutes les torpeurs. Je renais chaque année à la même période, tel un chardon endormi soudainement conscient d'avoir la possibilité de produire une fleur. La cour de la prison ne change guère d'aspect, pourtant elle est embaumée de légèreté, imprégnée par les senteurs de la belle saison. Les odeurs de floraisons qui me parviennent enchantent mon âme et m'emportent dans mes souvenirs de liberté.
 
Et je voyage sur les ailes d'avril pour parcourir d'oniriques champs de verdure, arpenter d'imaginaires prairies semée de pâquerettes, bondir par-dessus d'intangibles et étincelants ruisseaux, m'enfoncer sous les frondaisons d'un idéal asile sylvestre, me projeter vers d'éclatants horizons...
 
De simples effluves vernaux suffisent à me transporter de la sorte, de manière fulgurante, très loin de mon lieu de réclusion...
 
S'il y a bien une chose que l'administration pénitentiaire ne pourra jamais contraindre, emprisonner, empêcher d'entrer dans ma geôle, c'est la brise printanière qui vient jusqu'à moi pour me délicieusement monter à la tête et me faire quitter mon cloître de malheur.

2405 - Solitude de fer

Je demeure seul dans ma triste cellule mais en réalité je n'aimerais nullement vivre en compagnie d'un codétenu. Je refuse de me coltiner la présence permanente d'un reflet de moi-même à gueule de déterré, c'est-à-dire de condamné à vie...
 
Que chaque hôte de cette prison crève dans son coin, point final ! N'est-elle d'ailleurs pas conçue pour que les fautifs s'y fassent oublier, chacun de son côté et sans faire d'histoire ? Je ne vais commencer à devenir socialiste sous prétexte que je me retrouve à croupir au fond d'un trou !
 
Oui, la solitude est un châtiment mérité mais je la vois également comme un promontoire prestigieux vers une forme de réclusion plus monacale que carcérale. Elle est une chance de donner un sens vertical à mon existence de pénitent au sein de cette structure pénitentiaire.
 
Je n'ai aucune envie de partager mon pain de prisonnier avec un assoiffé d'amitié qui viendrait m'étouffer de ses mots de trop, m'ennuyer de ses silences, m'embarrasser de ses pensées vides. Je ne souhaite pas croiser mon ombre avec le spectre d'un reclus à perpétuité qui me ressemblerait. Je ne suis pas fait pour mourir jour après jour sous le regard d'un témoin assidu.
 
Je préfère me concentrer sur moi-même et faire de mon cheminement entre ces quatre murs un fructueux envol plutôt qu'un stérile enracinement dans la vacuité d'une pure relation de barreaux. J'ai besoin de m'alléger, non non de m'alourdir. Je n'ai pas de temps à perdre à échanger avec des spécialistes du bavardage en mal de communication. Je vise des hauteurs de prix, non à cultiver les petitesses de ma condition de taulard.

Qu'on me laisse en paix avec mes flammes intérieures ! Je n'ai rien à offrir aux autres emmurés de mon espèce !

vendredi 26 septembre 2025

2404 - L'ennui

Il frappe le plus souvent possible à la porte de ma cellule afin de venir s'adosser inutilement aux murs qui m'entourent en s'assurant que je ne fasse rien, avant de s'étendre platement sur le sol pour mieux se tenir immobile face au plafond.

Il se montre sans vie, dénué de sève, exsangue, amorphe.

L'ennui est mon pire compagnon de route dans cet interminable voyage statique au coeur de ma chambre de fer.

Il plane au-dessus de moi, s'installe sur mes épaules, se blottit sous les draps de mon lit, se plante pendant des heures devant ma fenêtre bardée de barreaux, ne me laisse nul répit... Il s'annonce lourd comme un dimanche de mort, promet d'être aussi soporifique qu'une ligne droite, demeure inerte telle une pierre tombale.

Il ne me quitte que rarement, uniquement lorsque je joue avec mon ombre, que je regarde ailleurs ou que je confie quelques mots libérateurs à ma feuille de papier... Quand je me tiens assez loin de sa face morne, il consent à ce que je respire sans lui.

Mais dès que j'en ai fini avec mes affaires, il revient vite me voir. Il ne veut visiblement pas que je me retrouve seul. Possessif et tyrannique, il désire me faire mourir en son nom en m'étreignant de ses bras flasques. Non content de me poursuivre de ses molles ardeurs, il cherche une faille en moi pour me pétrifier dans la torpeur. Ce froid calculateur, inlassablement, compte un par un les moutons de l'insomnie.

Il vient sans cesse me hanter au fond de ma prison jusqu'à ce que, trop las de sa présence, je m'endorme enfin.

Il y a heureusement une chose qu'il lui est impossible de faire, c'est d'entrer dans mes rêves.

2403 - Tête de taulard

Maintenant que je n'en finis pas de crever à l'ombre à petit feu, à présent que je suis installé dans ce trou qui me sert de tombe depuis assez longtemps pour y broyer du noir en permanence, je peux dire que j'ai pris la couleur des lieux et que j'y ai même gagné une vraie tête de taulard !
 
Avec ma boule à zéro, ma mine patibulaire, mon regard de loup pris au piège, je ne ressemble plus à rien. Ou plutôt, on m'assimile volontiers à la pire partie  de l'Humanité. Pas de quoi en tirer gloire, certes.
 
Pourtant, je ne me trouve pas si mal que ça dans ma nouvelle peau de bête.
 
J'ai l'impression d'être habillé pour le restant de mes jours, prêt à traverser les années sans faire de chichis. Je traîne une carcasse passablement allégée, débarrassée des artifices de la civilisation des gens libres... Au moins ici, plus de possibilité de mentir en portant des vêtements aussi rutilants que trompeurs et en s'affichant avec des cosmétiques sophistiqués pour être honnêtes.
 
Je suppose que je dois faire peur avec mon allure d'épouvantail. Il faut reconnaître que ça me donne du style, une certaine hauteur, et peut-être aussi une forme d'élégance ultime, un air de condamné aux galères. Une sorte de fuite de la réalité. Comme si j'étais devenu un détenu de roman, un prisonnier hors du commun, un engeôlé enjôleur.
 
Mon apparence crée un contraste remarquable avec les tenues réglementaires impeccables du personnel pénitentiaire. Cela me distingue, je me sens un peu moins anonyme que sous mon froid numéro d'écrou. Je cherche la moindre once de chaleur, la plus modeste parcelle d'humanisation, n'importe quelle source où boire de la lumière.

Enfermé dans ma cellule au coeur d'un néant, je n'ai plus que ma face de rat à contempler dans le reflet de l'eau de mes chiottes !

2402 - La fouille

Au nom de l'ordre et de la sécurité, les agents pénitentiaires peuvent surgir à tout moment, sans prévenir, pour mettre le feu à mon coeur.
 
Et ainsi ajouter de l'ombre aux ténèbres.
 
Que je sois en plein rêve au milieu de la nuit ou en déprime aux pires heures de la journée, ils débarquent avec fracas à la recherche de toute illégalité dissimulée. Ils ne savent pas eux-mêmes ce qu'il vont découvrir exactement en entrant dans l'intimité de mon antre : objets interdits, preuves de tentative d'évasion, marques suspectes, détournement du matériel carcéral, utilisation frauduleuse de certains éléments...
 
Mais ils ne trouvent pas la plus dérisoire peccadille, la plus infime broutille prohibée, la plus minuscule miette de pain défendu dans ma geôle. Par contre ils constatent l'immensité de mon désespoir, sentent l'ampleur de ma peine et à travers mon regard de chien résigné perçoivent l'horizon infini de mon calvaire.
 
Après avoir méthodiquement scruté, fouillé, sondé ce lieu de misère du sol au plafond, des murs aux barreaux, sans oublier la fosse à déjections, s'acharnant jusque dans les moindres recoins cachés, ils repartent les mains systématiquement vides.

On dirait même qu'ils sont déçus de ne rien rapporter de leur chasse aux trésors... Dans ces espaces déserts où ils pénètrent en vain, dans ces gouffres désolés de mes jours perdus qu'ils inspectent par précaution, au fond de mon dénuement de reclus à vie qu'ils explorent stérilement, quel pitoyable trophée espèrent-ils donc dénicher ? 

Je suis un trou enfermé dans un trou. Jamais je ne sortirai de cette prison, enchaîné de toutes parts, réduit à une existence pétrifiée, traînant déjà une tombe sous mes pieds, comment avec tant de plomb sur mes ailes pourrais-je m'envoler de cette cage gardée par des lions, moi le si frêle oiseau ?

Je suis condamné à rester cloué au même endroit, immobile sur ma croix de détenu.

Crucifié avec lenteur par le temps.

Pendant que les matons examinent ma cellule, pour ne pas donner tant d'importance à cette piètre affaire, je bois jusqu'à la dernière goutte la coupe de l'indifférence.

2401 - Passe-temps

Qu'ai-je donc à faire de mieux de mes journées pour tuer les heures les plus lourdes de ma vie carcérale ?
 
Rien.
 
Cloîtré dans ma cellule, j'attends.
 
Je patiente en regardant passer le temps. Je le vois venir de loin, l'entends couler au coeur du silence, le sens tourner en rond autour de moi, prêt à m'emporter avec lui sur ses ailes sans fin...
 
Finalement il s'arrête.
 
Et s'étale à mes pieds, effondré, inerte, creux comme une coquille, complètement mort. Tout la fois vide de sens et vainqueur. De mon unique point de vue, uni à jamais au néant et roi des ruines. Il n'est alors que poids stérile et fuite complète : il pèse telle une enclume d'immobilisme sur ma pauvre âme et m'échappe, paradoxalement.
 
Il m'écrase et pourtant il flotte, aussi obstinément manifeste qu'absent.
 
Il ne cesse de disparaître tout en se montrant omniprésent. Il n'a plus ni queue ni tête.
 
Pour finir, il se résume à peu de chose et s'impose en une énormité faite de tonnes de plomb.
 
Il devient du sable, du vent, de la pure fumée après m'être apparu pareil à une montagne. Il me file définitivement entre les doigts. A force de suinter le long de ces quatre murs où je m'éternise, il s'accumule inutilement. Et m'étouffe, m'oppresse, s'attarde puis commence à me dépasser, et enfin s'éloigne.
 
C'est dans ces moments précisément qu'il s'évade. Là seulement, lorsqu'il a le dos tourné, je peux le semer, mettre une certaine distance entre lui et moi.
 
En somme, en lui faisant face en permanence du fond de ma geôle et en tentant quand même de l'oublier, je le perds totalement.

2400 - Les gens libres

Loin derrière la porte sempiternellement close de ma cellule, je les imagine légers et joyeux, les gens libres.
 
Eux les anges heureux, moi la bête en geôle.
 
Ils vont et viennent à leur guise hors des murs de leurs maisons, comme s'ils volaient de leurs ailes d'éther, aussi aériens que possible, eux qui n'ont nulle chaîne aux pieds et rien que du ciel dans leur tête !
 
A mes seuls yeux, ils incarnent l'évasion.
 
Ils représentent l'ailleurs sans limite, le fol azur, le grand large, l'immense espace des actions humaines. Tels des oiseaux ivres de vents nouveaux et d'horizons clairs, ils jouent sans entrave entre les nuages blancs du jour et les rêves éclatants de la nuit, insouciants dans leur innocence, ignorants tout de mon triste trou.
 
Avec leurs intentions dénuées de noirceurs, leur coeur exempt de vices et leur dégoût du crime, ils font le théâtre du monde, embellissent la Création par leur simple présence sous el soleil des justes, constituent la partie vivante de ce siècle, tandis qu'au fond de ma cage grise, je n'existe plus et ne compte pour rien. Même mon ombre semble ne plus me connaître.
 
Ces hommes debout du dehors, généralement des âmes ayant pris de la hauteur, sont autorisés à décoller. Pendant que moi le rat, moi le réprouvé, moi l'oublié je croupis plus bas que terre. Combien j'envie ces bipèdes jouissant de leur altitude !
 
Alors qu'ils palpitent dans la lumière, je soupire à n'en plus finir... Ils ont su rester intègres, en haut de toutes les estimes, cependant que je suis tombé. C'est de ma faute. Je n'ai pas suivi leur exemple, me croyant plus fort que la vertu. Me voilà à présent dans la fosse des perdants, moi qui voulus gagner en trichant.
 
J'en paie aujourd'hui le prix.
 
Et, lourd de regrets, je pense à cette humanité de purs papillons à laquelle j'aurais pu continuer d'appartenir...
 
Ici dans ma prison, désormais coupé de ce peuple d'ailés, je ne suis plus qu'un mortel de plomb.

jeudi 25 septembre 2025

2399 - Prière

Me voilà devenu, le temps de mon existence incarnée, un enfermé jusqu'à la mort, un oublié de la terre et du ciel, une ombre derrière des barreaux d'acier.
 
Je suis coupable et ne vaux plus grand-chose pour les hommes : je n'ai pas même la moindre once de clarté à leur apporter. De toute façon personne ne veut plus m'entendre à présent que je me suis soustrait à l'Humanité. Mon acte ignoble m'a rendu indigne d'avoir voix au chapitre. Ce n'est certainement pas au malfaiteur de donner des leçons de vertu aux honnêtes gens ! J'ai été condamné à perpétuité, tout est fini pour moi. Je ne sortirai jamais de cette tombe de rat où je pleure et gis.
 
Du fond de cette fosse amplement méritée, creusée de mes propres mains par mon péché, je prie.
 
Il ne me reste que ma misère pour finir tout seul le chemin. Tel est le prix exact de ma rédemption de criminel. Et peu importe si les apparences de cette expiation paraissent disproportionnées, inhumaines, impitoyables aux yeux de certains.
 
L'essentiel n'est pas de faire le jeu de ces quelques humanistes sensibles et frileux choqués par le triste sort réservé aux crapules de mon espèce, mais de sauver le déchu qui prend conscience de son état. Les valeurs temporelles de cette minorité de progressistes en vogue ne résistent guère à la force de l'immuable vérité qui réclame non ce qui plaît au siècle mais ce qui, pour toujours, demeure juste.
 
L'unique bonheur qui persiste encore en moi consiste en la certitude de mourir avec une âme lavée, blanchie.
 
Ce qui me fait tenir debout aujourd'hui, certes en larmes mais avant tout en vie, c'est l'idée d'être racheté après avoir enduré mon interminable calvaire ici-bas. Mon dernier soupir sera également celui de ma vraie libération. Depuis le point désolant de ma cellule, je vise non pas la liberté du citoyen mais la délivrance morale.
 
Je ne cherche nul allègement de ma peine, je ne demande rien d'autre que le pardon. Que l'on me prive de la lumière du Soleil, c'est d'accord. Mais que l'on m'accorde celle qui m'éclaire de l'intérieur. J'accepte de vivre dans le froid, loin de mes semblables, hors de tout, mais je refuse que l'on m'interdise d'espérer.
 
Et je m'adresse à une cause suprême, à ce qui dépasse les normes de ce monde, à ce qui souffle plus fort que les tempêtes passagères du coeur humain si fragile, si imparfait.

Par delà les murs infranchissables de ma geôle de pénitent, mes pensées les plus pures s'envolent comme des flammes vers l'infini.

mercredi 24 septembre 2025

2398 - Les heures

Elles ont des longueurs minutées, des langueurs calculées et de funestes lenteurs.
 
Avec leurs ailes de plomb, leurs pieds de pachydermes et leurs airs pétrifiés, la ronde monotone des heures autour des quatre murs de ma geôle prend des allures mortelles.
 
Chacune de ces images du vide ressemble à une vieille sorcière âgée de mille années.
 
Elles passent, repassent, reculent, reviennent, stagnent, s'éternisent...
 
Et ma vie file entre leurs doigts de sable. Ou bien se fige sous leurs regards de pierre.
 
Elles prennent le visage terne des jours mauvais pleins de pesanteurs. Douze fois entre le lever du Soleil et le crépuscule, elles m'assassinent à flamme douce, ne me laissant en paix que la nuit, lorsque je dors.
 
Je déteste m'attarder en leur compagnie. Ce sont mes pires ennemies en réalité. Et je pleure quand elles sont désespérément creuses. Et me désole tout autant parce qu'aucune d'entre elles ne semble dérisoire.
 
Au contraire, toutes s'imposent à moi, bêtes et inutiles. Aussi cruciales les unes que les autres par les tourments qu'elles m'apportent...
 
Cette douzaine de tristes numéros incarne la lourdeur de la mort carcérale, celle qui dure, dure, dure...
 
Cette exécution sur le long terme, c’est le temps.
 
Chronos, ce roi des siècles, s’amuse à me faire bouillir d’ennui.
 
D'abord ils se tient couché dans l'ombre, juste devant l'aube, inerte. Puis se réveille brutalement. Il va et vient à petites enjambées durant tout matin, ralentissant progressivement avant que midi ne se pointe. Là, il fait une pause. Et repart ensuite sur des bases plus solides.
 
Mais s'arrête net au beau milieu de la journée.
 
Il y demeure sans compter, s'y installe comme un tyran, s'y étend à loisir et s'y dilate à n'en plus finir... Pour mieux fuir à pas feutré vers la fin de l'après-midi... Quand le soir est enfin arrivé, il trépigne sur place avec insistance et fracas tant que je ne suis pas endormi. Et retourne finalement à sa position initiale d'inertie où il attendra la naissance d'un nouveau lendemain, identique en tous points au précédent...
 
Et ceci indéfiniment, dans une course folle et absurde vers un but éternellement statique.
 
Heureusement, j'utilise une partie de ces plombes perdues à mon profit.

Du fond de ma cellule, je tue parfois ces tortionnaires. 

Simplement en ne pensant plus du tout à elles.

2397 - La mouche

A l'heure du repas de midi, je n'ai pas été seul.
 
Une intruse a pénétré la bulle à la fois sacrée et honnie de ma cellule. Non il ne s'agissait pas d'une femme mais d'une mouche. Attirée par l'odeur de mort ou bien d'abondante misère du contenu de ma gamelle : carottes à l'eau accompagnées de semoule simple. Régime frugal bien mérité de gibier de potence !
 
Bref, l'importune m'a d'abord tourné autour avant de se poser sur mon festin de légumes. Au moins, ai-je pensé en la voyant se repaître de l'opulence de mon écuelle, cette mini merde volante vit libre, heureuse peut-être comme peuvent l'être les moindres créatures de son espèce. Et on aurait même dit qu'elle me narguait, une fois repue d'un infime fragment de ma tambouille, satisfaite d'avoir impunément piétiné ma pitance avant de s'envoler vers la liberté...
 
L'affreuse bête m'a immédiatement agacé.
 
Beaucoup à ma place auraient eu pitié de cette visiteuse de prison impromptue. Ces mêmes condamnés face à cette situation auraient joué les bons samaritains, accordant de grands sentiments et émettant de hautes pensées à l'égard de cette piètre chose, tout en se prenant pour de nobles âmes et des esprits pétris de romantisme... Du fond de leur désespérante solitude, certains de ces bandits se seraient volontiers ingéniés à composer des poèmes, j'en suis sûr, à la gloire de cet insecte infâme venu infecter leur nourriture de ses germes douteux.

Quelle classe ! 
 
Et ce, afin de bien montrer, tant à eux-mêmes qu'aux autres, que depuis leur abîme moral (ayant eu pour conséquence de les amener, comme c'est mon cas, à purger une longue peine), ils sont capables de faire preuve de prétendue hauteur de vue, de sensibilité, de compassion, de conscience solaire à l'endroit de ce minuscule diable ailé.
 
Comme pour tenter d'amoindrir leur crime, s'inventer une posture d'humanisme carcéral, faire croire qu'ils sont sagement devenus des initiés ayant compris le sens de la vie et servant d'estimables causes spirituelles...
 
S'ils ne s'étaient pas retrouvés en ce lieu de pénitence, ils auraient soit chassé, soit aplati purement et simplement n'importe quel ignoble diptère qui se serait aventuré à souiller leur plat, au lieu de leur ouvrir leur coeur avec de ridicules déférences.
 
Aveu indirect de bassesse en réalité... S'ils avaient été de vraies natures généreuses, ils auraient pas attendus d'être sous les barreaux pour honorer cette écoeurante bestiole.
 
D'ailleurs, quelles que soient les circonstances, il faut être une foutue saleté pour éprouver de la considération envers cette idolâtre des excréments !
 
Moi je n'ai pas succombé à cette hypocrisie. Je suis demeuré humain sur ce point. Non, je n’ai pas chanté d'hymne en hommage à cette hôte non désirée de ma pauvre table de détenu.
 
Au contraire, je l’ai punie d’avoir osé foutre ses sales pattes sur mes aliments en se moquant de ma captivité de ses ailes vrombissantes.

De ma paume rageuse et vengeresse, je l’ai promptement ratatinée contre le mur !

mardi 23 septembre 2025

2396 - La porte

Derrière, il y a tout.
 
Le reste de l'Univers, les vies, les histoires, les choses, le monde et les milliards d'hommes qui le peuplent.
 
La porte qui fait barrage à ma liberté n'est franchissable que pour les promenades, les douches et la morgue.
 
Elle se dresse devant moi de toute son épaisseur, aussi lourde qu'hermétique, mutique comme une stèle mortuaire. Un vrai marbre, en somme. Et ce, afin de bien me faire prendre conscience de sa métallique importance.
 
Sa fonction première consiste à demeurer close. Avec, à son pied, un criminel. Dans une société parfaite où tout serait prévu pour le détenu à l'intérieur de sa cellule, elle ne s'ouvrirait jamais durant tout le temps de sa peine.
 
Mais la réalité ici-bas étant imparfaite, les accès en acier des prisons se débloquent quand même pour y faire passer et repasser leurs otages... Y compris l'entrée de mon antre de sempiternel pénitent.
 
Les sorties à buts hygiéniques et les marches quotidiennes réglementaires, ainsi que les fouilles irrégulières, justifient que l'épaisse barrière de mon triste asile fasse chuinter ses gonds. Et ses grincements sont les seuls mots audibles qu'elle m'adresse.
 
Comme quoi rien n'est vraiment perdu pour moi. Je ne deviens pas encore fou de solitude puisqu'elle me parle un peu, à sa manière, et que je l'écoute avec attention...
 
Cela dit, hors des heures autorisées, elle ferme sa grande gueule de fer.

Mais que m'arrive-t-il donc ? Voilà à présent que je communique avec le portail de mon enfer !

2395 - Le plafond

Je ne recevrai plus jamais la caresse du Soleil sur mon front.
 
Le plafond de ma cellule forme désormais mon unique azur. Et la seule clarté sous laquelle je m'éveille le matin provient de l'ampoule électrique.
 
Mon âme cherche malgré tout une chaleur illusoire sous cet éclairage sécuritaire. La fenêtre de ma geôle renforcée de barreaux donne sur un angle restreint de la prison, une parcelle déserte de la cour cimentée, une vue sinistre et pétrifiée sur la mort du dehors.
 
Dans ces conditions regarder à l'extérieur ne m'apporte rien. Ce décor de béton ne présente pour moi  d'intérêt véritable que les jours de pluie où je peux jouir du spectacle de l'eau déversant quelques gouttes de vie à la sécheresse de cette maçonnerie désolante.
 
La nuit, ébloui par les projecteurs, je ne puis même pas percevoir les rares étoiles se situant dans mon champ de vision limité. Dès que vient le soir, le peu d'espace céleste auquel j'ai accès se trouve systématiquement bouché, cruauté de la chose, non par l'opacité et la hauteur des murs de l'enceinte, mais par les feux nocturnes. Aveuglants, ils effacent totalement le firmament, m'empêchant de plonger le regard vers l'infini.
 
Prisonnier de mon trou et en même temps piégé par la lumière, quelle ironie ! Dans ces moments où, omniprésente, envahissante, trop crue, trop laide, inhumainement réglementaire, purement artificielle,  douloureuse, cauchemardesque, j'aimerais la fuir pour mieux m'évader virtuellement, elle me rattrape et m'interdit de rêver sous les astres...
 
La pièce dans laquelle je dois passer le reste de mon existence demeure allumée en permanence, comme la reproduction miniature du vaste bloc pénitentiaire qui m'entoure.
 
Impossible d'échapper à la voûte de plomb de ma chambre de captif et à sa flamme invariable qui me surveille vingt-quatre heures sur vingt-quatre.

Ce ciel blanc au-dessus de mon lit est ma bête noire.

lundi 22 septembre 2025

2394 - Nulle compagnie

Je meurs dans une solitude absolue au creux de ma cellule.
 
Je suis livré au temps inutile qui passe. A petit feu, seconde après seconde, sans témoin ni personne avec qui partager ce sombre vertige. Je ne rencontre rien de plus palpitant que mon ombre sur les murs ou bien mon reflet dans la glace.
 
En dehors de la visite règlementaire des matons, je demeure séparé du reste de l'Humanité. A tout jamais. Je me retrouve aussi écarté des autres humains qu'une terre gelée ne captant plus la lumière de son soleil éteint.
 
Dans ma minuscule geôle, paradoxalement je me vois pareil à un grain de poussière sidéral entouré de l'immense vide spatial. Un point isolé qui tourne en rond au coeur de l'infini. Je ne suis pas différent de cette particule de matière égarée entre les étoiles : ici, statique dans ma prison, moi aussi je vogue vainement dans l'obscurité en direction d'un gouffre cosmique, loin des astres peuplant l'Univers.
 
La liberté essentielle, n'est-ce pas d'être en contact joyeux avec ses semblables ? Avec ou sans clôture, au fond d'un trou ou au centre de l'incommensurable, si l'on vit en l'absence de ses prochains de manière non choisie, ne porte-t-on pas d'invisibles barreaux en soi ?
 
Subir un tel sort sans un être physique avec qui communiquer, sans la chaleur d'un interlocuteur qui nous comprend, sans la présence d'un ami qui nous ressemble, sans la complicité d'un proche qui nous écoute, voilà le plus terrible des enfermements ! Etre ainsi coupé de ses frères bipèdes revient à enlacer la nuit, embrasser le froid, étreindre le néant.
 
L'ermite s'est volontairement retranché du monde, pas le détenu. Le premier jouit de sa situation, le second l'endure.
 
Je suis deux fois prisonnier : retenu dans ma pièce aux parois de béton et privé d'échanges.
 
Comme un hôte de misère arrivé au milieu de nulle part, je respire seul l’air de mon oubliette.
 
Abandonné et nu.
 
Heureusement, il me reste mon espace d'évasion : les pages blanches où j'écris et grâce auxquelles un jour, peut-être, ces mots voués à être perdus seront finalement lus. Si quelqu'un tombe sur ces lignes, j'ignore si ce sera dans vingt ans ou un siècle, il saura qu'une âme les a sorties des profondeurs.
 
Il est également possible que ce lecteur hypothétique croie à une fiction, à une histoire inventée par une plume en quête de succès, à une fable destinée à séduire un éditeur.

Qui sait ?

2393 - Bientôt fou ?

C'est le début de ma longue progression vers l'enlisement.
 
Les premières routines se sont installées. Je ne me projette déjà plus dans un avenir illusoire, ne me perds pas stérilement dans des considérations purement théoriques. Au contraire, je ne m'accroche qu'au seul réel encore à ma portée.
 
Je me laisse engloutir par les jours pétrifiants qui se succèdent. Le temps devient une entité à la fois vague et tangible, un sable incolore qui me recouvre peu à peu, une sorte de présence invisible qui s'impose à moi de plus en plus et m'enfonce la tête dans une nouvelle sphère. C'est une force floue, un vent doux et léthargique qui insidieusement m'entraîne vers un autre univers fait de lenteurs, d'attente, de vide et de silence.
 
J'entre dans cet espace vierge comme si j'étais un nouveau-né.
 
J'y découvre un monde étranger avec des formes singulières, des lois différentes. Ici rien n'est totalement désespérant : en fait j'ai le choix, je le sais, de subir cette réalité ainsi qu'un mauvais rêve ou bien d'interagir à mon bénéfice, avec ces éléments qui m'entourent. Aussi peu que ce soit certes, mais de manière certaine et concrète.
 
Même si cette liberté de faire bouger modestement les ombres, d'allonger ou de raccourcir les heures de quelques secondes ou de décider de la couleur que prendront les mirages reste parfaitement dérisoire, je puis à ma guise en user pleinement. Aussi, ivre de cette découverte, je remplis ces inutiles interstices de toute ma volonté d'action.
 
Cette possibilité de mouvement semble ridicule. Elle demeure, il est vrai, dans les limites restreintes de mes capacités mentales, psychologiques et spirituelles au sein de ma minuscule cellule. Cela suffit cependant pour m'ouvrir une porte insoupçonnée, dépasser une frontière, pénétrer dans un ailleurs qui m'allège et m'emmène vers une once de ciel bleu.
 
Mais conscient pourtant que ces insignifiances prennent des proportions démesurées, je m'interroge...

Je me demande si, au point où j'en suis, tout ce que je viens d'écrire sur cette feuille blanche qui me sert d'évasion ne serait finalement pas un pauvre délire.

dimanche 21 septembre 2025

2392 - Départ

Le grand voyage commence.
 
Me voici assis au bord d'une éternité, au pied d'une épreuve incommensurable, écrasé par des milliers de jours à venir, tous invariables, dont chacun sera une plaie.
 
Je me retrouve embarqué de force dans une aventure statique qui, à chaque instant, me mènera tragiquement à mon point de départ.

Jeté dans cette mer d'huile mortellement immobile,
accroché à mon radeau d'ennui, je vais désormais devoir naviguer sur les heures lourdes, interminables, innombrables et anonymes déferlant devant moi.
 
Le temps devenu torture me rongera, m'engloutira, et le monde extérieur pour moi s'éloignera d'année en année. La vie dehors restera définitivement hors de ma portée. Au-delà de la prison, tout m'apparaîtra aussi inaccessible qu'abstrait.
 
Je ferai de l'univers minuscule de ma cellule mon unique océan.
 
Je traverserai cet espace restreint en long et en large, en travers et en profondeur jusqu'à y découvrir des trésors dérisoires qui me sembleront sans prix.
 
Cependant rien n'est tout à fait perdu puisque je n'ai plus la moindre chose à perdre. La plus petite parcelle de nouveauté, d'action, de pensée, de réalité que je peux gagner dans ma situation, aussi insignifiante soit-elle, ajoutera fatalement du "beaucoup" au "peu".
 
Vaille que vaille, je me laisserai donc pousser des ailes, moi le captif des murs, moi l'âme pécheresse soumise aux fers des hommes, moi l'oiseau mis en cage, afin de prendre de la hauteur au-dessus de ce trou sans fin au lieu de m'y étaler platement.
 
Les rares prises qui demeurent encore possibles pour me faire tenir ne sont pas d'ordre physique, matériel, mais purement poétique. Au lieu de m'adosser bêtement aux barreaux, je m'agrippe à mes bulles mentales : une des plus légères manières de m'échapper.
 
Chaque seconde sacrifiée ici constituera pour moi une peine, une souffrance distillée goutte à goutte.
 
Mais ce purgatoire où je sentirai la brûlure des minutes sera aussi mon ciel.
 
Ce gouffre de neuf mètres carrés dans lequel mon coeur de criminel se videra de ses noirceurs miette après miette pour mieux se racheter, se chargera tout à la fois d'espérance.

Je suis en ce lieu pour y mourir : à mon dernier souffle, je serai totalement lavé de mon crime.

2391 - Mes geôliers

Ils forment le cinquième mur de ma cellule.
 
Impersonnels, froids et administratifs, mes gardiens se fondent dans le décor. Ces hommes secs aux gestes de robots sont payés ni pour me plaire ni pour adoucir ma peine, mais pour me chagriner au possible de leur présence comme de leur absence. Mais s'ils me tourmentent ainsi, c'est toujours dans les limites inhumaines les plus strictement réglementaires, bien entendu...
 
Mes geôliers se comportent avec moi en véritables barreaux.
 
Leur visage est un portail verrouillé, un masque impassible, un désert gelé. Et leur coeur, un coffre-fort scellé à la soudure.
 
Ils sont composés d'acier, de glace et d'obscurité.
 
Formés pour n'être que des uniformes ambulants, ils s'acquittent de leur tâche sans état d'âme. Et s'il faut qu'ils fassent parfois preuve à mon égard de ce que l'on pourrait appeler de la "méchanceté", ils le font avec rigueur, soin et efficacité.
 
D'ailleurs ils ne sont pas "méchants" mais simplement zélés.
 
Je n'ai rien à craindre d'eux en réalité : ils agissent en bons professionnels sur qui je peux compter. Leurs inévitables paroles blessantes et nécessaires oppressions sont scrupuleusement encadrées.
 
Sans broncher, je reçois de leur part un quota quotidien de mauvaise humeur et d'authentique férocité. Des fruits amers mérités certes, mais très précisément définis, conformément calibrés, finement pesés, mesurés avec justesse, parfaitement légaux. La dureté n'est pas falsifiée ici.
 
Et jamais un sourire. Toute fantaisie est interdite, ce que je peux comprendre dans mon cas.
 
Il n'y a dans l'attitude de mes cerbères nul excès, seulement la pure application d'un règlement de fer.
 
Leurs yeux qui se posent sur ma tête de criminel ressemblent à des fenêtres noires : les rares regards qu'ils m'adressent me pénètrent et me jugent en silence.
 
Ces fonctionnaires semblables à des automates implacablement réglés qui ne me montrent aucune indulgence sont mes seuls et définitifs contacts avec l'Humanité.
 
Il ne me reste qu'eux.

Et c'est exactement pour cette raison que je les aime.

samedi 20 septembre 2025

2390 - L'enfermement

Dans ma réclusion perpétuelle, le temps prisonnier des murs pèse autant qu'une montagne qui s'égrène. Les heures deviennent des pierres, les minutes des gouffres, les instants des rochers.
 
Tandis que les secondes, invariablement, demeurent des miettes : juste des particules incolores qui se succèdent. Tantôt elles sont faites d'un présent qui compte, tantôt elles ne sont rien du tout. Soit elles passent et se brisent dans l'air telles des bulles de mort, soit elles stagnent, s'attardent, s'éternisent stérilement devant moi, sans but ni aucun sens.
 
Et une journée est pareille à une autre : aussi énorme que dérisoire.
 
Chronos fait de grandes enjambées et des bonds immenses dans un ralenti qui n'en finit pas, et tout se meut au rythme déprimant d'une irréelle lenteur.
 
Et j'attends.
 
Je reste sur place, ne pouvant faire autrement, à contempler la durée des choses. Je me laisse progressivement emporter par le vide. Là, paradoxalement, lorsque je rejoins cette forme de néant, je me retrouve loin de ma cellule, hors des pesanteurs qui m'entourent et m'affligent tant. J'oublie mieux tout ce qui remplit mon existence de plomb et de ténèbres.
 
Je flotte dans un espace désempli, comme si j'avais des ailes.
 
Durant ces moments précis je n'ai volontairement plus de tête pour y faire tourner mes pensées en rond et souffrir inutilement : je la remplace par une cervelle d'oiseau, ce qui enlève toutes les épines de mon âme et me donne même de la plume.

Absent à tout, je suis alors aussi léger qu'une brute qui ne pense plus.

2389 - Quatre murs

Les murs qui m'entourent sont mes pires gardiens.
 
Et mes plus proches confidents.
 
Ils me surveillent jour et nuit, m'observent, m'épient, m'accompagnent dans le présent, le passé, le futur. Ils semblent mes amis et mes ennemis de toujours, ils seront mes chiens fidèles et mes poursuivants jusqu'à ma mort.
 
Ils m'encerclent en silence et fixent le vide. Ou peut-être l'éternité. Et je prends leur regard de béton pour un jugement : j'ai l'impression d'être leur jouet. Je sens le poids de leur sentence sur ma tête. Leur mutisme en dit long sur leur froide détermination à demeurer, perdurer, et même me survivre. Enracinés dans les siècles, immuables et quasi indestructibles, ils ont l'éloquence des tombes.
 
Ils se tiennent debout autour de moi, tantôt impassibles, tantôt réprobateurs. Ils m'écrasent, m'étouffent, prennent toute la place, me font de l'ombre.
 
Aussi austères soient-ils, ils me bercent également de leur immobilisme rassurant, ils me protègent et veulent me laisser vivre à leur pied cent longues années encore. Et même bien plus si cela leur était possible. Leur but n'est pas de me tuer mais au contraire de me tenir plus que jamais vivant. Et en bonne santé. C'est leur rôle, leur mission, leur promesse. Ils sont les socles, je suis leur hôte.
 
Tels des remparts contre les chocs de l'extérieur, ils me préservent de tout. Ils m'isolent du reste du monde et m'étreignent tout à la fois.
 
Je les hais et les aime, eux qui s'imposent avec tant d'insistance. Cependant je sais bien que s'ils s'acharnent à se dresser devant moi avec autant de force, c'est pour se faire mieux oublier, justement. C'est la règle du jeu, cruel et pourtant complaisant : ils sont là, je les vois et les chasse de mon esprit avant qu'ils ne reviennent. Il disparaissent de mes pensées puis réapparaissent dans mon champ de vision, indéfiniment. On se perd de vue, on se retrouve. Je les quitte, ils me rattrapent. Je les abandonne, ils me talonnent. Je les fuis, ils me courent après, me suivent à la trace, m'assiègent.
 
Ces quatre parois sont implantées au fond de mon âme. Je les frappe rageusement du poing ou leur parle calmement. Ambivalents, complexes et ambigus, ces obstacles me détruisent et me soutiennent. Comme des falaises infranchissables, ils me restreignent et m'enveloppent, me persécutent et veillent sur moi, m'assomment et me caressent. Je suis un captif qui palpite dans un berceau de ciment et sur lequel se penche un impassible chef de chantier.
 
Je ne reçois aucune tendresse, mais nulle haine non plus. On me prive de la lumière du Soleil c'est vrai, mais on ne m'inflige pas de ténèbres pour autant. Il m'est interdit de m'échapper, mais point de rêver.
 
Je suis enfermé d'un côté, par ailleurs on me permet d'accéder à une autre forme de liberté. On m'enchaîne physiquement et en même temps on m'offre l'opportunité de m'évader virtuellement. On m'emprisonne mais on me laisse le souffle de vie.

Non je ne suis pas devenu une pierre. Réduit à une minuscule flamme, je ne m'éteins pas tout à fait entre ces fantômes statiques.

vendredi 19 septembre 2025

2388 - Des mots en guise d'ailes

Dans ce gouffre où je gis à présent, l’administration pénitentiaire m’a toutefois accordé de quoi m’évader à peu de moyens : un stylo et du papier.
 
Elle a choisi en réalité d’acheter au rabais une paix perpétuelle sur les neuf mètres carrés où désormais je vais devoir passer le reste de mon existence. Un détenu s’accrochant à une plume étant une garantie d’ordre et de sécurité, j’ai eu droit à ce traitement de faveur.
 
En dépit de l’horreur de mon crime, je fais partie des privilégiés à qui l’on offre le minimum pour obtenir le maximum : quelques gouttes d’encre fraîche en échange d’un fleuve de tranquillité. Une carotte contre la promesse d’une montagne. Cela semble dérisoire mais ça me va.
 
L’écriture sera donc mon refuge, ma soupape, ma libération.
 
Des feuilles sans nombre à noircir régulièrement, pour mes geôliers ce sont des chaînes supplémentaires que je m’inflige à moi-même, mais surtout un allègement de leur travail. Pour moi ces modestes rectangles volants où je couche mes mots sont des voiles immenses qui me font voguer vers des horizons éclatants.
 
Donner au prisonnier qui le demande l’opportunité d’écrire permet de canaliser toutes sortes de flammes, d’amoindrir des douleurs, de dévier des larmes, de contenir des feux. Cette plongée dans le calme et l’introspection est l’assurance de plus de quiétude pour tous.
 
Mon sort est celui des damnés du monde, je suis un réprouvé du siècle et j’ai été condamné au pire. On m’a placé là afin que j’expie. Je n’ai par conséquent aucun écran dans ma cellule. Pas plus de radio. Rien qui puisse capter des ondes. Nul journal. Ni lucarne donnant sur l’extérieur ni trappe à travers laquelle recevoir le moindre cadeau.
 
Juste l’infini de la page blanche.
 
Autrement dit, j’ai tout. Le meilleur. L’inespéré : le ciel sans borne de l’imaginaire. Avec les nuages et les oiseaux qui le peuplent, mêmes s’ils ne sont que des rêves.
 
Là, sur ma table, sous mes yeux, sur cette surface immaculée où vont se figer mes pensées, je vois de la lumière. Une fenêtre s’ouvre, remplaçant tout ce qui me manque.
 
Sur cet espace minuscule où s’alignent mes phrases, je peux prendre de la hauteur, quitter mes fers et vous raconter mon enfer.
 
J’accepte certes de souffrir, mais réclame également de continuer à vivre. Qu’on m’enferme c’est entendu, mais qu’on me laisse respirer.
 
Ces feuillets où ma vie confinée trouvera un prolongement, de la profondeur, un écho, une invisible écoute constitueront mon coin de verdure, ma sphère d’azur, mon envol carcéral.

Je suis seul et je m’adresse à mon ombre. Pourtant j’ai l’impression, étrangement, que l’Univers entier m’entend.

2387 - Mon trou

J'ai failli et les hommes m'ont maudit.

Aussi terrible que soit mon sort, à partir de maintenant je n'ai plus le choix. J'approuve la sentence et la signe.

Je préfère regarder la vérité frontalement. Elle me brûle et m'éclaire en même temps. Elle est un feu implacable qui de toute façon ne m'épargnera pas. Dès lors que ses flammes sont inévitables, autant me jeter dedans.

Me voici face à une sinistre immensité, prêt à m'enfoncer dans la fosse insondable des années annulées : la simple conséquence de mes actes. 

Ma vie est désormais vouée au châtiment. Je n'appartiens plus au monde des vivants. Même le Soleil m'a chassé de sa vue. Privé de la lumière des justes, j'affronte dès aujourd'hui une éternité d'ombre, de vide et d'ennui.
 
Je me retrouve dans un espace triste et étroit qui s'appelle la prison. Enfermé dans une cellule en compagnie du néant.

Puisque j'ai plongé dans les ténèbres du crime et que le glaive de la loi m'a rattrapé, je ne suis plus digne que de ces murs rédempteurs qui m'entourent.
 
Il est tard, je suis épuisé et m'effondre. Je dors d'une traite jusqu'au matin.
 
C'est ma première journée de réclusion.
 
Je viens de me réveiller au fond d'un trou et vais devoir traverser un océan de jours et de nuits en direction de la mort. Un voyage immobile sans fin, sans but, sans surprise.
 
Le prix de mes méfaits.
 
La seule issue que je puisse espérer est la tombe
 
Effroyable perspective !
 
Une peine non dénuée de sens cependant : au bout de l'épreuve, le rachat. Paradoxalement, j'ai tout à gagner à tout perdre. J'accepte donc le jeu.
 
Payer mes malfaisances est l'unique liberté qui me reste. Cette possibilité de me laver de mes fautes suffit d'ailleurs à faire fructifier la dernière parcelle de clarté en mon âme.
 
Dure certitude à la hauteur de ma prise de conscience... Mais le salut se mérite.
 
Tandis que je demeure étendu sur mon lit depuis seulement une heure, voilà que deux spectres viennent de s'asseoir à mes côtés : le silence et la solitude.
 
C'est ici que commence mon odyssée.

Liste des textes

2445 - Les étoiles s’éloignent de moi
2444 - Eclats de joie
2443 - Je parle aux murs
2442 - La marche des matons
2441 - Sainte à l’air
2440 - À l’ombre de ma vie
2439 - Ma geôle sans sucre d’orge
2438 - Des ombres
2437 - Les feuilles
2436 - Quelle issue à mon chemin ?
2435 - Des ailes dans la nuit
2434 - Éclat d’ange
2433 - Le temps me tue
2432 - Les flammes du silence
2431 - Plus de Lune
2430 - Un jour de plus
2429 - Mes rêves
2428 - Une journée ordinaire
2427 - Reine d’un monde
2426 - La pluie
2425 - Je perds pied
2424 - Un oiseau à ma fenêtre
2423 - L’évadé
2422 - Les barreaux
2421 - Eclats et monotonie de la prison
2420 - Les clés
2419 - Espérance
2418 - A travers la fenêtre
2417 - Les années passent
2416 - Une lettre mystérieuse
2415 - Le psychologue
2414 - La douche
2413 - Je tourne en rond
2412 - L’anniversaire
2411 - Quelques visites
2410 - Insomnies
2409 - La promenade
2408 - Mes repas
2407 - Mon lit
2406 - Les printemps
2405 - Solitude de fer
2404 - L’ennui
2403 - Tête de taulard
2402 - La fouille
2401 - Passe-temp
2400 - Les gens libres
2399 - Prière
2398 - Les heures
2397 - La mouche
2396 - La porte
2395 - Le plafond
2394 - Nulle compagnie
2393 - Bientôt fou ?
2392 - Départ
2391 - Mes geôliers
2390 - L’enfermement
2389 - Quatre murs
2388 - Des mots en guise d’ailes
2387 - Mon trou
2386 - Connexion céleste
2385 - Une flamme de l’azur
2384 - Seigneur cinglant
2383 - L’âme en l’air
2382 - Flamme verte
2381 - Au feu les plumes sombres !
2380 - Sombre forêt
2379 - Emportés par le vent
2378 - Un homme des nues
2377 - Courage de Bayrou
2376 - Un chemin sans fin
2375 - Mon univers infini
2374 - Je ne suis pas de la ville !
2373 - Seul parmi les arbres
2372 - Au bout des chemins
2371 - Mon trésor
2370 - Les cumulus
2369 - Qui donc m’observe ?
2368 - Le loup
2367 - Cauchemar
2366 - Un peu de foin
2365 - Bain de crépuscule
2364 - Voyage sous un arbre
2363 - Ma solitude de roi
2362 - Le silence
2361 - Aubes de plomb
2360 - Mes anges les corbeaux
2359 - Vertueuse verdure
2358 - Le parachute
2357 - Au bord de l’eau
2356 - J’y suis et j’y reste !
2355 - Ma soupe
2354 - Les fées n’existent pas !
2353 - Le bon air de mon exil
2352 - Un jour ordinaire
2351 - Vie de rêve
2350 - Ma solitude
2349 - Je découvre une tombe
2348 - Le randonneur
2347 - La nuit
2346 - Le braconnier
2345 - A l’ombre des arbres
2344 - Une belle journée
2343 - L’intruse
2342 - La chasse à courre
2341 - Les vers luisants
2340 - L’hôte qui pique
2339 - Dans la pénombre
2338 - Le ballon
2337 - Ma lanterne
2336 - La barque
2335 - Le chemin creux
2334 - Les deux chasseurs
2333 - Flamme noire
2332 - Deux corbeaux dans un arbre
2331 - Insomnie
2330 - Cris des corbeaux
2329 - Papillons de nuit
2328 - Froid et pluies
2327 - Les ronces
2326 - Chemins de boue
2325 - Tristesse de la forêt
2324 - Provisions de bois
2323 - Dans les buissons
2322 - Pluie matinale
2321 - Les grands arbres
2320 - Terribles crépuscules
2319 - Les rats
2318 - Un ami frappe à ma porte
2317 - Entouré de rusticité
2316 - Le sanglier
2315 - Mon sac
2314 - Le renard
2313 - Ma marmite
2312 - Des bruits dans la nuit
2311 - Les lapins
2310 - Un signe sous le ciel
2309 - La Lune vue de mon toit
2308 - Une gauchiste explosive
2307 - Sortie nocturne
2306 - Le vent sur la forêt
2305 - Un air de feu
2304 - Rêve dans les branches
2303 - L’écolo
2302 - Les papillons
2301 - La corneille
2300 - Les patates
2299 - L’escorte des souches
2298 - Un orage au dessert
2297 - Nulle femme dans ma forêt
2296 - Indispensables pommes de pin
2295 - Promenade
2294 - La pluie sur mon toit
2293 - A la chandelle
2292 - Un soir de brume
2291 - Vie de feu
2290 - La rosée matinale
2289 - Dans l’herbe
2288 - Par la fenêtre
2287 - Ma cheminée
2286 - Mes chemins d’ermite
2285 - Au réveil
2284 - Les cailloux sur mes chemins
2283 - Mes sentiments de bûche
2282 - Nuit de pleine lune en forêt
2281 - Ivresse de femme
2280 - Loin de ma grotte
2279 - Tempête dans mon trou
2278 - Baignades d'ermite
2277 - Un hibou dans la nuit
2276 - Mes ennemis les frileux
2275 - Ermite aux pieds sur terre
2274 - Mon jardin d’ermite
2273 - La récolte des fagots
2272 - Un étrange visiteur
2271 - Ma demeure d’ermite
2270 - Un homme clair
2269 - Un foyer au fond de la forêt
2268 - Les raisons du peintre
2267 - La célibataire
2266 - Les femmes
2265 - Une femme
2264 - France sous les étoiles
2263 - Un homme hors du monde
2262 - Homme de feu
2261 - Rencontre du troisième type
2260 - Voyage
2259 - Déprime
2258 - Fiers de leur race
2257 - La fille lointaine
2256 - Le Noir méchant
2255 - L’attente
2254 - J’ai entendu une musique de l’an 3000
2253 - Le modèle
2252 - Blonde ordinaire
2251 - Mâle archaïque mais authentique
2250 - La femme et la flamme
2249 - Voyages au bout de la terre
2248 - Ma chambre
2247 - Le vieil homme entre ses murs
2246 - L'ovin
2245 - Vous les mous, les mouches, les mouchards
2244 - Mon humanisme fracassant
2243 - Ma cabane sur la Lune
2242 - Les marques rouges du ciel
2241 - Je reviens !
2240 - Une fille de toque
2239 - La légèreté de la Lune
2238 - Janvier
2237 - Elena Yerevan
2236 - Oiseaux de rêve ?
2235 - J’irai vivre à la campagne
2234 - Fiers de leurs péchés
2233 - Deux faces
2232 - Le soleil de la jeunesse
2231 - Dans les bois
2230 - Nuit de vents
2229 - Mon fauteuil de lune
2228 - Le sourire d’une marguerite
2227 - Je ne suis pas antiraciste
2226 - Qui est-elle ?
2225 - L’arc-en-ciel
2224 - Je suis parti dormir sur la Lune
2223 - La sotte intelligence
2222 - Leurre ou lueur ?
2221 - Clinchamp, cet ailleurs sans fin
2220 - La tempête Trump
2219 - Femme de lune
2218 - Une plume de poids
2217 - Douches glacées
2216 - Les arbres et moi
2215 - Je pulvérise le féminisme !
2214 - J’aime les vieux “fachos”
2213 - La surprise
2212 - Promenade en forêt
2211 - Je vis dans une cabane
2210 - Plouc
2209 - Je suis un mâle primaire
2208 - Musique triste
2207 - Ma cabane au fond des bois
2206 - Hommage à Christian FROUIN
2205 - Installation sur la Lune
2204 - Barreaux brisés
2203 - Affaire Pélicot : juste retour de bâton du féminisme
2202 - L’abbé Pierre, bouc-émissaire des féministes
2201 - Par tous les flots
2200 - Votre incroyable aventure !
2199 - Je ne suis pas en vogue
2198 - Jadis, je rencontrai un extraterrestre
2197 - Dernière pitrerie
2196 - Alain Delon
2195 - Je déteste les livres !
2194 - L’esprit de la poire
2193 - Je ne suis pas citoyen du monde
2192 - Ma cabane dans la prairie
2191 - Devant l’âtre
2190 - Plus haut que tout
2189 - Pourquoi la femme vieillit si mal ?
2188 - Je prends l’avion
2187 - Sous la Lune
2186 - La pourriture de gauche
2185 - Je dors à la belle étoile
2184 - L’obèse et l’aristocrate
2183 - Le hippy et moi
2182 - Croyant de feu
2181 - Les gens importants
2180 - Le Beau
2179 - Michel Onfray
2178 - J’irai cracher sur leurs charentaises !
2177 - Clodo
2176 - Corbeaux et corneilles
2175 - Un dimanche plat atomique
2174 - Promenade en barque
2173 - Juan Asensio, ce rat lumineux
2172 - Il va pleuvoir bientôt
2171 - Au bord de la lumière
2170 - Dans mes nuages
2169 - J’ai dormi dehors
2168 - Les roses
2167 - Perdu en mer
2166 - Un jeune heureux
2165 - Le vagabond
2164 - Un ogre
2163 - Brigitte
2162 - Les gens simples
2161 - L’azur de Warloy-Baillon
2160 - Cause majeure
2159 - Je n’ai aucune élégance
2158 - La rivière
2157 - Il n’est pas raciste
2156 - Elle me fait peur
2155 - L’horloge
2154 - A la boulangerie de Mont-Saint-Jean
2153 - L’écologiste, ce primitif
2152 - Madame Junon
2151 - Chemins de pluie à Clinchamp
2150 - Voyage vers Mars
2149 - Galaxies
2148 - Je suis de la droite honteuse
2147 - Les écrivains sont des poids morts
2146 - L’héritage de Clinchamp
2145 - Clinchamp, une histoire sans fin
2144 - Vent de mystère à Clinchamp
2143 - Ma cachette à Clinchamp
2142 - Randonnée à Clinchamp
2141 - Eclipse de Lune à Clinchamp
2140 - Un arc-en-Ciel à Clinchamp
2139 - Clinchamp sous l’orage
2138 - J’ai rêvé de Clinchamp
2137 - Jour de l’An à Clinchamp
2136 - Vacances d’été à Clinchamp
2135 - Attente à Clinchamp
2134 - Un jour ordinaire à Clinchamp
2133 - Or de France
2132 - La compagne des esseulés
2131 - Loup de lumière
2130 - Spleen
2129 - Le pitre
2128 - Les corbeaux de Clinchamp
2127 - Un homme heureux à Clinchamp
2126 - Le mouton
2125 - Des lutins à Clinchamp ?
2124 - Je suis fort !
2123 - Paroles prophétiques
2122 - L’égalité entre les hommes est injuste !
2121 - L’idéaliste de gauche
2120 - La femme est la monture de l’homme
2119 - Clinchamp sous la neige
2118 - Le Nord et le Sud
2117 - Pourquoi j’aime Clinchamp ?
2116 - Convaincre Blandine
2115 - Un couple de vieillards à Clinchamp
2114 - Le facteur de Clinchamp
2113 - Tristesse et beauté à Clinchamp
2112 - L’Art
2111 - Botte à l’oeuf
2110 - Les bûcherons de Clinchamp
2109 - Le coucou de Clinchamp
2108 - BFMTV : l’écran de la vérité
2107 - Lettre anonyme
2106 - Je ne suis pas amoureux de Paris !
2105 - Un jour d’hiver à Warloy-Baillon
2104 - La femme soumise brille comme une casserole
2103 - Les chouettes de Clinchamp
2102 - Quand la tempête s’abat sur Clinchamp...
2101 - L’aile et la pierre
2100 - Mes amis les maudits
2099 - Le brouillard de Clinchamp
2098 - Artiste de gauche
2097 - L’éternité dans la tête
2096 - Toussaint à Clinchamp
2095 - Chagrin échappé
2094 - Clinchamp-sur-Mystère
2093 - Les cafards
2092 - Loup des airs
2091 - Le loup de Clinchamp
2090 - En latin, c’est plus beau !
2089 - Les patates de Clinchamp
2088 - L’enfant des airs
2087 - Ciel de France
2086 - Thaïs d’Escufon
2085 - Les tomates de Clinchamp
2084 - Jérôme Bourbon
2083 - Les chats de Clinchamp
2082 - Poupée d’ailleurs
2081 - Pierre de feu
2080 - Les champs de Clinchamp
2079 - L’éclosion
2078 - Vacuité des bouquinistes
2077 - Les toits
2076 - Freud
2075 - Sport
2074 - Le simplet de Clinchamp
2073 - Les oiseaux de Clinchamp
2072 - Je ne suis pas cartésien
2071 - Au cimetière de Clinchamp
2070 - Le Panthéon pour Hugo, l’évasion pour Izarra
2069 - Les rats de la France
2068 - Le curé de Clinchamp
2067 - Mon trou à Clinchamp
2066 - Saint-Léonard-des-Bois
2065 - Les cloches de Clinchamp
2064 - Un épouvantail à Clinchamp
2063 - Les rêves de Clinchamp
2062 - Je suis raciste
2061 - L’injustice sociale ne me choque pas
2060 - Les femmes de Clinchamp
2059 - Les jours vides de Clinchamp
2058 - Une grand-mère
2057 - Clinchamp vers 1970
2056 - La femme de soixante ans
2055 - Sale temps à Clinchamp
2054 - Un grand voyage en forêt
2053 - L’ailé et l’aliéné
2052 - Souvenirs lointains
2051 - Domestication d’une greluche
2050 - Déprime à Clinchamp
2049 - L’amour à Clinchamp
2048 - Les Droits de l'Homme, c'est la négation de l'homme !
2047 - Les hivers de Clinchamp
2046 - Les chemins de Clinchamp
2045 - Seul au monde
2044 - Ne me parlez pas d’amour
2043 - Tristesse de l’été
2042 - Jour de fête à Clinchamp
2041 - Monsieur Lecon
2040 - Châtelain
2039 - Les ailes de Clinchamp
2038 - Tremblement de terre
2037 - Nuit d’amour
2036 - Pluie de joie à Clinchamp
2035 - Les gauchistes
2034 - Clinchamp sous les clartés lunaires
2033 - Henri d’Anselme, héros hétéro rétro
2032 - Les hirondelles
2031 - Retraite dans la forêt
2030 - Mon bosquet
2029 - L’or de Clinchamp
2028 - Sur le chemin
2027 - La souche
2026 - Clinchamp, ce voyage sans fin
2025 - Sardines à l’huile
2024 - Les fantômes
2023 - Le silence de la forêt
2022 - Les arbres
2021 - Les joies de Clinchamp
2020 - La merde républicaine
2019 - Les ailés
2018 - Les soirées de Clinchamp
2017 - Parasite
2016 - Clinchamp, les routes de l’ennui
2015 - Moi français, je déteste les migrants !
2014 - Répugnante
2013 - Les complotistes
2012 - Je déteste les livres de philosophie !
2011 - Le bossu de Clinchamp
2010 - La lumière de Clinchamp
2009 - Les crépuscules de Clinchamp
2008 - Les nuits à Clinchamp
2007 - Les aubes de Clinchamp
2006 - Je suis un oiseau à Clinchamp
2005 - Les rats de Clinchamp
2004 - Les papillons de Clinchamp
2003 - Les richesses de la normalité
2002 - Le Rimbaud des bobos
2001 - Les vaches de Clinchamp
2000 - La folle de Clinchamp
1999 - Mon ego solaire
1998 - Vague Lune
1997 - Ma cabane à Clinchamp
1996 - Moi, IZARRA
1995 - Mais qui donc est Dardinel ?
1994 - La Dame Blanche de Clinchamp
1993 - Le Dalaï-Lama
1992 - Pluie à Clinchamp
1991 - Je suis sexiste
1990 - Les flammes du printemps
1989 - Le rustaud de Clinchamp
1988 - Les larmes d’Amsterdam
1987 - Clinchamp, terre d’envol
1986 - La Joconde de Clinchamp
1985 - Face cachée de Clinchamp
1984 - La clocharde de Clinchamp
1983 - Je suis un extraterrestre
1982 - Clinchamp sous les éclats de novembre
1981 - Clinchamp au bord des larmes
1980 - Les fantômes de Clinchamp
1979 - Les pissenlits de Clinchamp
1978 - Clinchamp : fin et commencement de tout
1977 - Amsterdam
1976 - J’habite sur la Lune
1975 - Secret de Lune
1974 - Les ailes de la Lune
1973 - Voir Clinchamp et sourire
1972 - La pierre et l’éther
1971 - Clinchamp, au bonheur des larmes
1970 - Clinchamp, mon dernier refuge
1969 - Croissant de Lune
1968 - Mais d’où vient donc la Lune ?
1967 - Lune lointaine
1966 - Lune éternelle
1965 - Sandrine, notre voisine
1964 - Rêve de Lune
1963 - Lune des rêves
1962 - La Lune dans le bleu
1961 - Lune ultime
1960 - Les tourmentés
1959 - Clinchamp, paradis des ombres
1958 - Lune absente
1957 - Je raffole des commérages !
1956 - Clinchamp : royaume des humbles
1955 - La Dame dans le ciel
1954 - Palmade : de la gloire au gouffre
1953 - Evasion
1952 - Tatouages, ces marques de faiblesse
1951 - L’égalité est un enfer !
1950 - Repas sur l’herbe à Clinchamp
1949 - Escale à Clinchamp
1948 - Beauté morbide de la Lune
1947 - J’ai dormi dehors à Clinchamp
1946 - Les humanitaires sont des parasites !
1945 - Sur les routes de Clinchamp
1944 - Une année à Clinchamp
1943 - Tristesse du printemps
1942 - Bulle de Terre
1941 - Jour de joie à Clinchamp
1940 - L’inconnu de Clinchamp
1939 - Le ciel de Clinchamp
1938 - Les éclats de Clinchamp
1937 - Le voyageur
1936 - Fête triste
1935 - Les antiracistes
1934 - Jean Messiha
1933 - Coeur gelé
1932 - Romantisme de pierre
1931 - La femme est sous mes pieds
1930 - Burcu Güneş, un air léger
1929 - Je déteste les pauvres !
1928 - Quand mon coeur s’allume
1927 - Intègre, entier, râpeux
1926 - Le cheval
1925 - Homme mauvais
1924 - Un trou sous le ciel
1923 - Hauteur de la Lune
1922 - Nulle part, là-bas, ailleurs
1921 - Belle Lune
1920 - Salades lunaires
1919 - Lettre à Reynouard
1918 - MARGUERITE OU L’HISTOIRE D’UNE VIEILLE FILLE
1917 - Récoltes lunaires
1916 - Je suis français de souche
1915 - Lune mortuaire
1914 - Clinchamp, cité des oubliés
1913 - Clinchamp, l’air de rien
1912 - Clinchamp, sommet du monde
1911 - La pollution, c’est la vie !
1910 - Seule au monde ?
1909 - Le Ciel et la Terre
1908 - Lune de haut vol
1907 - La Lune s’allume
1906 - Nuit sombre
1905 - Soupe de Lune
1904 - Puretés raciales
1903 - Lune-pizza
1902 - La grande question
1901 - Amiens
1900 - Pleur de Lune
1899 - Rêve d’amour
1898 - Vive le patriarcat !
1897 - La libellule
1896 - L’eau qui m’éclaire
1895 - Une question de clarté
1894 - La Lune dort
1893 - Les artifices du spirituel
1892 - Lune normale
1891 - Ni chauffage ni travail
1890 - Lune de fer
1889 - Molle Lune
1888 - Insensible aux malheurs des autres
1887 - Mon visage de vérité
1886 - Amante russe
1885 - J’écris
1884 - Lune martiale
1883 - Je suis un incapable
1882 - Lune creuse
1881 - 1975
1880 - L’éclat d’un fard
1879 - Amour impossible
1878 - Femme au foyer
1877 - L’esprit de la Lune
1876 - Ingérence féministe
1875 - Cratères lunaires
1874 - Lune d’effroi
1873 - Lune des chats
1872 - Les athées
1871 - Lune d’or
1870 - Lune carrée
1869 - Lune de miel
1868 - Folle lune
1867 - Jour de joie
1866 - SMARPHONES : abrutissement des masses
1865 - Sombre lune
1864 - Les mouches
1863 - Ma vie simple
1862 - Clinchamp, terre lointaine
1861 - Je suis un conservateur
1860 - Lune de glace
1859 - Le lac
1858 - Qu’est-ce que la beauté ?
1857 - Lune blanche
1856 - Lune de mer
1855 - Lune de feu
1854 - Présence immortelle
1853 - Surprenante Lune !
1852 - L’éclat de la Lune
1851 - Epis lunaires
1850 - L’autre Lune
1849 - L’amie des cheminées
1848 - Lune morte
1847 - Lune Parmentier
1846 - Lune fatale
1845 - Amour céleste
1844 - Grâces et disgrâces
1843 - Ma maison, c'est la Lune
1842 - Poids de la Lune
1841 - La morte visiteuse
1840 - Ma cabane sous la Lune
1839 - Bleu ciel
1838 - Histoire de lune
1837 - Suc de Turque
1836 - Stéphane Blet
1835 - Ciel bleu
1834 - Bonheur de rat
1833 - Redneck
1832 - Sur le rivage
1831 - Attraction lunaire
1830 - Je suis anti-féministe radical
1829 - Mais qui est-il ?
1828 - Je veux des frontières !
1827 - Les francs-maçons
1826 - Folies lunaires
1825 - Alunir, en un mot
1824 - “Comme ils disent”, chanson d’Aznavour
1823 - Lune tiède
1822 - Globe de rêve
1821 - Effroi
1820 - Vangelis
1819 - L’air de la Lune
1818 - La campagne
1817 - Lune tombale
1816 - Les cailloux
1815 - Je déteste Paris !
1814 - Boules de neige
1813 - Je n’ai pas peur
1812 - Parler vrai
1811 - Les hommes simples
1810 - Quand la Lune panse
1809 - Régine : extinction d’un feu
1808 - Morte veilleuse
1807 - Coeur de pierre
1806 - Noir
1805 - Mystère de la Lune
1804 - Jackson Pollock
1803 - En pleine lumière
1802 - Harmonie des sexes
1801 - Dix ans dans l’azur
1800 - Pluie d’avril
1799 - Le gueux
1798 - Les pommes de pin
1797 - Voyage vers la Lune
1796 - Mystère d’une nuit
1795 - Une lumière turque
1794 - Sans coeur et avec écorce
1793 - Envolé !
1792 - Galante ou l’abcès crevé
1791 - La lumière du Bosphore
1790 - Claude Monet
1789 - Rat aristocrate
1788 - Ukraine : sortez de vos ornières mentales !
1787 - Tranche de ciel et plumes de la Terre
1786 - Les sots écolos
1785 - L’astre turc
1784 - L’Ukraine, je m’en fous totalement !
1783 - Vive la guerre !
1782 - Réponses à un coatch
1781 - Droite pure
1780 - Vains hypersensibles
1779 - Mes valeurs vives
1778 - Le secret
1777 - Force et lumière
1776 - De l’herbe à l’aiguillon
1775 - Jusqu’à la mort
1774 - Zemmour et les journalistes de gauche
1773 - Dur et juste
1772 - La flamme et le marbre
1771 - Mon chat est mort
1770 - Les frères Bogdanoff
1769 - J’ai rêvé de Natacha
1768 - Technologie
1767 - Vers la Lune
1766 - C’était la guerre
1765 - La “tondue de Chartres”
1764 - Dans le métro
1763 - Naissance d’un virus
1762 - Zemmour est-il un de Gaulle ?
1761 - Je suis grand
1760 - Jour de gloire
1758 - Une muse du Bosphore
1758 - Je suis un extrémiste
1757 - Les éoliennes
1756 - Femme terminale
1755 - Autoportrait
1754 - Je suis un sanglier
1753 - Faux fou
1752 - Les affaires
1751 - Octobre
1750 - Le fantôme
1749 - Les écrivains
1748 - Sauvez la France !
1747 - Mes sentiments de pierre
1746 - Une araignée raconte
1745 - Un coeur clair
1744 - Phallocrate
1743 - Les vaches
1742 - Les faibles sont mauvais
1741 - Les sans-visage
1740 - Le trouillard de gauche
1739 - Léonard de Vinci enfant
1738 - Mes froideurs sublimes
1737 - Le romantisme, c’est la décadence
1736 - La Joconde
1735 - La tour Eiffel
1734 - Le Soleil
1733 - Une boule de mystère
1732 - Les masqués
1731 - Burcu Günes, l’or turc
1730 - Léa Désandre
1729 - Le père Dédé
1728 - “Blanc lumière” de Pollock
1727 - Les kikis et les cocos
1726 - Les funérailles de Belmondo
1725 - Pôle Sud
1724 - Vierge au mariage
1723 - La forêt
1722 - Le réveil des clochers
1721 - En septembre
1720 - Extraterrestre
1719 - Ni cagoule ni sérum
1718 - L’astre des morts
1717 - L’idéaliste
1716 - Un ange noir pour les Blancs ?
1715 - Trois heures du matin
1714 - Dur et vivant
1713 - Homme des bois
1712 - De flamme et de sang
1711 - Mes bas potentiels
1710 - Je suis un anti-progressiste
1709 - Eléonore et les Noirs
1708 - Eléonore et les Juifs
1707 - Une française
1706 - Femme d’idées
1705 - Joie de vivre
1704 - Auteur de rêves
1703 - Raison féminine
1702 - Vieillard
1701 - Face de France
1700 - 1789
1699 - Adieu, France
1698 - Célibataire
1697 - L’envers vert
1696 - Avant la chute
1695 - L’aube d’Ève
1694 - Amour raté
1693 - À vue d’homme
1692 - Le loup et l’agnelle
1691 - Têtes à corps
1690 - Trêve de la nuit
1689 - L’été
1688 - L’hiver
1687 - Les âmes de la forêt
1686 - Enfin libre !
1685 - Je vis sans masque
1684 - Enfants du monde
1328 - Je suis apolitique
115 - Le cygne
114 - Le spleen de Warloy-Baillon
113 - Les visiteurs
112 - La Lune
111 - L’amant des laides
110 - Mémoires d’un libertin
109 - Une existence de pompiste
108 - Lettre à mes amis des listes sur Internet