Cheminant sans but mais non sans fruit dans les rues paisibles de la petite
ville sarthoise, je me sens seul au monde. Plongé dans mes songes abstraits, je
ne vois que les nuages de mes pensées élevées.
Arrivé au bord du gouffre de mes méditations essentielles et bientôt
pétrifié par le vertige des mes interrogations ultimes, je stoppe le pas.
Qu’est-ce que la vie ? Son but ? La mort ? L’infini ? La raison et la cause
des choses ?
Au même moment dans la rue de cette cité si calme nommée Sillé-le-Guillaume
où je me trouve, madame Michelard, imposante, pragmatique et résolue ménagère
présentement préoccupée par la confection de la soupe du soir, tranche tout net
la tête d’une grosse truite sur sa planche de cuisine dans un fracas gras et
spongieux ! Ceci fait elle éventre la bête d’un coup ajusté afin de l’éviscérer
dans les règles de l’art. Pas d’état d’âme, l’heure du repas approche et il y a
encore la soupe à préparer. D’ailleurs quelques ingrédients manquent, ce qui la
soucie franchement.
Absorbé par mes fumées philosophiques, je ne perçois rien de ces énormités
domestiques, alors que je me situe non loin de la demeure aux fenêtres ouvertes
où se déroulent ces faits anodins mais crus.
Que fait l’Homme dans cet Univers plein de mystère ? Partout où se porte
mon regard, tout n’est qu’énigme... Naître, chercher, mourir... Poids de la
condition humaine, quête de sens...
- Ha ben tiens te v’la enfin fainéasse ! C’est à c’t’heure là
que t’arrives ? Ousque t’as encore été boire ? Dis, tu pues la gnôle à vingt
mètres à la ronde espèce d’ivrogne ! Tu sais que c’est un vrai chantier près des
cabinets, qu’est-ce que t’attends pour aller débordeliser tout ça ? C’est-y pas
honteux ! Tu crois quand même pas que tu vas aller cuver dans ton fauteuil
pendant que je fais la popote ! Allez ! Va nettoyer les saloperies près des
cabinets depuis le temps que tu devais le faire !
Echanges ordinaires entre notre brave cuisinière -au giron aussi
développé que son sens pratique- et son tendre époux quelque peu oublieux
de ses devoirs communs.
Cette fois les échos de ces témoignages de vie épaisse me
parviennent.
Et me sortent de ma profonde rêverie spéculative...
Des manifestations rudes, frustes, perçantes, outrancières et bien réelles
de ce monde sur lequel précisément je suis en train de me poser des questions
sans réponse.
Intrigué, je m’approche de la fenêtre et aperçois madame Michelard, son
grand couteau de cuisine à la main, affairée entre la truite étêtée aux
entrailles ouvertes étalée sur la table et son époux imbibé d’alcool titubant
vers les cabinets, à ses oeuvres...
Alors dans un élan insensé de vérité, de franchise et de colère mêlées je
m’adresse à l’ogresse en des termes radicaux, ne m’embarrassant nullement de
précautions verbales dans l‘état de questionnement fondamental où je
suis :
- Madame, à vous voir et vous entendre votre existence semble
se réduire à de vulgaires activités ménagères dignes de l’impératrice des
concierges de province que vous êtes !
Sa réponse, prompte, claquante, désarmante, aussi dénuée de fioritures
que ma métaphysique :
- Tu tombes à pic mon coco ! Il me manquait justement un petit
cornichon, une grosse tomate et une bonne patate pour ma soupe... Tu fais les
trois en un à ce que je vois, ben tu feras vite l’affaire avec moi !
VOIR LES DEUX VIDEOS :
https://youtu.be/fAipAsXHFnU
https://rutube.ru/video/9fb88029240e12f7cd6d1c6153edcd5e/
http://www.dailymotion.com/video/x1jepwd_la-pensee-a-la-sauce-tomate-raphael-zacharie-de-izarra_webcam
VOIR LES DEUX VIDEOS :
https://youtu.be/fAipAsXHFnU
https://rutube.ru/video/9fb88029240e12f7cd6d1c6153edcd5e/
http://www.dailymotion.com/video/x1jepwd_la-pensee-a-la-sauce-tomate-raphael-zacharie-de-izarra_webcam