Je suis engagé dans un voyage d'une lenteur monacale aux promesses
tombales.
Je séjourne dans l'ombre de jours d'ennui, m’enlise dans la lourdeur des
mois sombres et mornes, suis plongé dans l'enfer d'une vie vouée à l'impasse, me
dirige vers la mort d'années totalement stériles. C'est une marche sur une route
de néant bordée par des montagnes de grisaille.
Jusqu'à ce que mon dernier souffle me délivre de ces chaînes de ma
condition carcérale, aussi oppressantes que l'acier, je n'ai rien d'autre à
espérer que le malheur. Tant dans les détails de mon quotidien banal de captif
que dans les grandes lignes de mon sort inconcevable de condamné à perpétuité.
Cela dit, il m'est tout de même possible, dans une certaine mesure, de remodeler
un tant soit peu cette misère à ma convenance. Je puis produire quelques vagues
de légèreté, de folie, d'évasion dans cette mer plate de cauchemar.
Ici dans ma cellule je vogue dans un gouffre, certes. Mais il me suffit
d'avoir le courage et la force de prendre de la hauteur dans mon âme, d'arranger
avantageusement mes pensées, de préparer mon coeur à de meilleures perspectives,
pour que cette fosse noire devienne un sommet lumineux, un promontoire vers un
monde qui s'ouvre au lieu de se fermer.
Ce n'est pas la simple et bête imagination qui m'aide à accéder à ces
nuages de l'esprit, non. C'est bien mieux. Cet azur s'appelle la poésie.
Avec ce ciel que je porte dans ma tête, le trou de ce tombeau où je gis et
respire tout à la fois ressemble alors pour moi à un vaste espace sidéral, à une
immensité non pas d'enfermement mais de liberté.
Le vide, la solitude et le silence de la prison, à mes yeux prennent des
allures d'expérience astronautique, comme une aventure spatiale idéale, aussi
fabuleuse que vertigineuse... Et je m'enfonce loin dans les profondeurs
cosmiques. Heureux. Oui, heureux. Ou du moins, ivre. Troublé non pas par des
illusions, mais par de nouvelles réalités, par d'autres certitudes.
Même si l'escapade ne dure que le temps d'un rêve, je parviens à voir des
étoiles dans ma nuit de reclus.
Avant de me réveiller ceint par les murs immuables de ma geôle.
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