Je n'ai plus droit au grand théâtre des étoiles. Les nuits pour moi sont devenues des trous noirs, des ciels bouchés, des horizons de pures ténèbres. Seuls les projecteurs du pénitencier s'allument le soir pour m'éblouir. Mais pour me faire rêver, il ne me reste que mes souvenirs des constellations.
La vue sur l'infini, c'est terminé ! Depuis toutes ces années où je suis détenu, mon regard ne porte guère au-delà des épaisses parois qui m'encerclent. Et lorsque je veux prendre la mesure exacte de mon espace visuel, pour ne pas dire de mon supplice carcéral, il me suffit de m'approcher de la fenêtre de ma cellule afin de contempler les coulisses de ma misère.
Spectacle piteux d'une aire plane, vide, austère, cimentée de toutes parts que la pluie vient arroser de temps à autre.
Alors je me rends compte qu'une partie de la cour que j'entrevois entre les barreaux forme une seconde prison pour les yeux, au lieu d'une évasion pour l'âme. Quant aux "promenades", terme que je trouve tellement ironique, elles m'enferment plus qu'elles ne me font souffler véritablement. En réalité, sous une apparence ludique elles ne font que prolonger mon incarcération. Dans ces conditions tout prisonnier considère le strict minimum ou la moindre respiration pour un luxe. Et ma piètre liberté de cafard emmuré se résume à faire les cent pas sur le béton et à danser tristement sous les astres électriques qui éclairent les couloirs.
Si je souhaite réellement changer d'air, atteindre de vraies hauteurs, quitter la Terre, je le fais en m'échappant vers l'intérieur de moi-même. Je ne voyage loin qu'en traversant les murs, le corps statique mais l'esprit fulgurant, étendu sur mon lit, aux commandes de ma fusée cérébrale.
Je vogue dans les abysses du silence, parcours les étendues sans fin de mes pensées idéales, découvre des mondes merveilleux, étranges et incompréhensibles aux beautés inexprimables. Je m'enfonce progressivement dans les profondeurs invisibles enfouies en moi. Je me perds dans d'autres galaxies.
Lorsque mes paupières se rouvrent, je m'aperçois plus cruellement encore de la distance qui sépare ma geôle du firmament.
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