L'été je dors là où me mènent mes semelles de croquemitaine. En général
quand le soir est aux étoiles je me couche en pleine cambrousse, loin de tout,
au milieu de la friche, au bord des mares oubliées ou en fond de vagues fossés.
Ne faisant guère le difficile, je m'accommode de ce que m'offre la nature : lit
de paille ou d'épines, tapis d'herbes ou de cailloux, oreillers de bois ou de
mousse, couvertures de rêves ou de crapauds, tout me va ! Avec durant mon
sommeil deux ou trois têtes de rats qui passent ou quelques plumes qui volent,
pour moi la fête demeure enchanteresse : je roupille comme un roi.
Entouré de ronces, étendu sur mon matelas de verdure, je n'ai pas à me
soucier de grand-chose. Je me sens protégé des loups derrière ce rideau de
piquants, même si ces adorables bêtes ont disparu depuis belle lurette...
Là, dans ma chambre aussi vaste que les champs de constellations, j'écoute
les cris de la faune et le chant des astres. Je me repose ainsi dans les
broussailles, tel un renard. Autour de moi tout pique et flamboie dans la paix
nocturne. Ma carcasse ressemble à une flamme sombre assoupie dans son trou de
feuilles et de branchages. Encerclé par tant de barbelés végétaux, ma nuit est
légère et mon âme s'envole sans attendre vers le royaume des fables et des
fantômes.
Dans cet espace sauvage, je suis dans mon élément naturel.
Lorsque l'aube me caresse de ses doigts frais et humides, je me réveille en
frissonnant, encore plongé dans les limbes de mon voyage peuplé de mystères et
de folies. En guise de salutation, les plantes m'égratignent et me percent.
Et je suis heureux de vivre à la mode des campagnols et des hiboux.
La rosée se montre âpre à mon égard et les buissons acérés que j'effleure
sont beaucoup moins aimables que des hérissons, mais le matin n'en devient que
plus éclatant à mesure que les dernières brumes se dissipent... Le jour promet
des gloires brûlantes.
Bientôt le vent sèchera ce plumard de foin et le Soleil y mettra le feu.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire