Elle était normale.
Deux yeux clairs, une bouche comme une fraise des bois, deux mamelles pareilles à deux lunes, une matrice, dix doigts, une belle âme, un charmant accent russe, ce qui est encore plus normal étant donné que cette créature bipède était une russe, précisément.
Grande, élancée, en âge de procréer, aussi parfaite qu’une statue de marbre et même plus éclatante encore, Natacha, c’était son nom de naissance et non un vulgaire pseudonyme comme pourraient le penser les esprits tordus issus des pays de l’Ouest, Natacha disais-je m’avait particulièrement charmé ce jour-là avec ses féroces désirs de demeurer russe, de la tête aux pieds.
Je lui offris des épis de blé en lui déclarant ma flamme.
Elle en fut chrétiennement émue. En effet, elle était chrétienne. Russe et chrétienne. Splendide et mamelue. Grande et aimable, enragée sur le plan patriotique. Par rapport à son pays la Russie.
La Russie, des terres immenses et des espaces grandioses, des paysages rudes et lumineux, vastes comme jamais on n’en voit ailleurs qu’en Russie.
Idéale, vivante, debout, cette femme strictement hétérosexuelle, singulièrement belle, éminemment russe était typiquement une enfant de la Russie, la fille d’un dieu nommé Sainte Russie.
Eternelle devrais-je ajouter.
Avec son ventre voué à l’enfantement, ses suaves pommettes slaves, ses cuisses robustes, saines, fortes de teutonne (bien qu’elle ne fût nullement allemande), Natacha faisait durcir ma chair de taureau macho.
Elle était parfaitement optimale dans sa normalité et moi aussi.
Mamelue, russe, raisonnable.
Et moi, mâle, rêche, classique. Âpre, dur et brûlant, comme tous les cerfs honnêtes de la Terre.
Ce n’était qu’une femme russe, mais quelle femme russe ! Et cependant tout ce qu’il y a de plus normal.