Moi je suis un “no-life”.
Ma réalité tranchée aux horizons d’une pure cérébralité hautement aseptisée se borne prudemment aux quatre angles nets de mon écran d’ordinateur connecté en permanence avec l’espace des esprits en orbite autour d’eux-mêmes.
Les gens, je les préfère en deux dimensions plutôt qu’en odeur et postillons.
Sur INTERNET je vis un rêve dont je ne me réveillerai jamais. En deux ou trois clics je voyage à l’autre bout de l’Univers sans ôter mes pantoufles. Je me promène dans les rues de Calcutta sans le moindre risque de trébucher sur des remises en questions dérangeantes.
Je gravis des Everest idéologiques sans me compromettre, conquiers des Himalaya de vérités insensées sans me mouiller, élabore des théories audacieuses devant ma tasse de thé.
Mon monde est une fumée brillante. Un songe rectangle sur plasma à la luminosité réglable à souhait, une belle histoire sans début ni terme en haut-débit et à bas prix.
J’étais fait pour cette existence glacée, dématérialisée, impalpable et inodore.
La “no-life”, c’est mon dada, ma raison de vivre, ma respiration artificielle d’esthète sophistiqué et exigeant allergique aux échanges directs anti-hygiéniques.
Voir le monde avec les couleurs réarrangées de ma machine informatique, c’est le sublimer.
C’est le confort des dieux, le plaisir des âmes contemplatives, l’ivresse des cerveaux bercés dans le formol stérilisé, réconfortant et inoffensif de la divine virtualité.
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