Je veux quitter la ville et m'envoler vers un ciel champêtre, remplacer
l'agitation de la cité par le muet tourbillon de la verdure, m'éloigner du
fracas stérile des jours remplis de vacuité pour venir m'échouer dans les
rigueurs bienfaisantes de la nature pleine de fleurs et d'épines, de boue et de
friche, d'herbes folles et de cailloux rêches.
L'agglomération urbaine est confortable, rassurante, chaude et opulente.
Ses habitants sont flasques, plats, proprets, aseptisés.
Moi je préfère la rudesse de la cambrousse peuplée de bêtes sauvages et
d'hommes bourrus, ses odeurs de bois et ses dimanches sans artifices, ses arbres
comme des spectres et ses paysages bibliques.
La vie moderne est pleine d'écrans, de sécurité, de restrictions et de
technologie stupide. L'existence y est fade, pauvre, grégaire. Les êtres nés
entre les murs surchauffés de la civilisation sont faibles, pâles, frileux.
Enfants et vieillards y sont fragiles et émotifs. Les néons citadins fabriquent
des humains anémiés, des destins insignifiants, des âmes prudentes.
Loin de ces mollesses, le rustique des champs sait apprécier la dureté de
la grêle sur son front, l'austère beauté des éléments bruts, la profondeur des
choses simples, l'immensité des plus minuscules évènements de ses journées en
contact avec l'essentiel.
Oui je rêve de partir rejoindre ce paradis des rustauds si aisément
accessible ! Je brûle de me dépouiller de mes habitudes policées pour jouir des rigueurs et délices des activités et léthargies pastorales...
M'imaginant réfugié au fin fond de la campagne, un feu de cheminée m'apparaît alors
infiniment plus chaleureux et indispensable que les lueurs criardes et vulgaires
d'un smarphone.
La flamme de l'âtre a plus de sens, plus de poids, contient plus de
richesses que cet objet aliénant débitant les intarissables fumées de ce
siècle.
Je souhaite rompre avec les flatteuses et mensongères obscurités de la
métropole pour m'engager dans les lumières éclatantes, authentiques des chemins de
terre ancestraux et des horizons aux promesses de chants de corbeaux.