Né avec une flûte en or -au son fort aigu- dans le bec et des
certitudes de marbre dans mon esprit de roc, nourri avec des biberons
étincelants aux tétines ciselées, élevé dans la gloire de moi-même, gavé de
préjugés précieux et immodestes, je grandis dans une exquise impopularité.
Incompris, mal-aimé, condamné par la rumeur, je passai une enfance
radieuse.
Joliment perché sur mes nuages, je fus préservé des vulgarités du monde. La
seule souffrance que je connus, c’était celle des autres et elle ne me touchait
guère. Enfin pour être honnête, elle me distrayait plutôt.
Bien à l’abri entre ma chambre feutrée et ma cave dorée, de la vie je n’ai
expérimenté que les facilités, légèretés et suavités.
Fruits délicieux aux saveurs célestes qui enivrent mon âme d’esthète.
Affinent ma sensibilité poétique. Conservent ma peau laiteuse.
Et m’éloignent de la boue dans laquelle se vautrent avec
complaisance les autres mortels... Je laisse les épluchures, patates pourries et
pommes aigres de l’infortune à ces spécialistes de la transpiration
“turbinatoires” que je considère comme des porcs.
Bref, mon bonheur de vivre passe pour un outrage, et même un crime. C’est
ainsi que ma misanthropie s’est alimentée à la source de cette porcine engeance
que j’ai toutes les raisons de mépriser.
Indisposé par la rugosité du prolétariat, mais également par la tiédeur
écoeurante des classes moyennes, j’ai toujours refusé le contact avec ces mains
calleuses, ou simplement molles, que leurs représentants me tendent parfois. Moi
le délicat aux doigts de pianiste et au coeur glacé comme le diamant, eux les
grogneurs à la pensée épaisse et au corps ruisselant de sueur.
De fait je réponds invariablement à leur détestable amabilité par des
crachats.
On me regarde de travers, m’évite, me cite en contre-exemple. Certains
médisent même sur mes dentelles, ma perruque, le bout de taffetas collé à ma
pommette et même sur la poudre de riz qui blanchit mon front hautain... Dieu !
Que le monde est mesquin !
La cause de toutes ces méchancetés ? Pour rien : juste pour ma différence,
ma naissance, ma hauteur. Pour mes paumes lisses et mes joues pâles peut-être
bien aussi, je crois... C’est par ces raffinements que je déplais aux
cochons.
Il est vrai que je ne mange pas à la même table qu’eux ni ne vois passer les
mêmes mets sous mes lustres. Chose qui répugne tant à ces hurleurs de l’ombre m’accusant de ne pas adopter leur régime plébéien. Pourtant il suffirait
qu’une de ces bêtes semi-affamées vienne frapper à ma porte pour que je ne la
lui ouvre pas. Ou que je lui fasse pénétrer le seuil et que je la bastonne avec
justification. Mais jamais ces animaux ne prennent la peine de me juger sur
pièce. Au lieu de cela, ils me font des procès d’intention. Ces dévoreurs
d’ordure n’ont pas le sens de la justice.
Aujourd’hui que j’ai l’âge de ne plus rendre de comptes à personne, je peux
bien le dire : je sais que je suis imbuvable.
Mais est-ce de ma faute si de fats censeurs et odieux creveurs de rêves m’enferment dans un imbrisable carcan de préjugés comme une bulle d’air dans une ampoule ?
VOIR LA VIDEO :
https://rutube.ru/video/737ccf17625af6d6ddcf22d355a557e8/
https://rutube.ru/video/3e4410f31aaf4a4cd4d5f2e127a06792/
http://www.dailymotion.com/video/x5ci79q_imbuvable-raphael-zacharie-de-izarra_travel
Mais est-ce de ma faute si de fats censeurs et odieux creveurs de rêves m’enferment dans un imbrisable carcan de préjugés comme une bulle d’air dans une ampoule ?
VOIR LA VIDEO :
https://rutube.ru/video/737ccf17625af6d6ddcf22d355a557e8/
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