L'injustice de classe ne m'a jamais révolté.
Les inégalités dans la société, c'est même une richesse, un état de fait
très juste, très sain, très souhaitable à mes yeux.
Chacun devrait se contenter, sans broncher, d'être à la place où il est. Et
souhaiter y demeurer. Pour le bien de tous.
Les uns en haut, les autres en bas. C'est l'ordre normal des affaires
terrestres, selon moi.
Pour qu'une maison tienne debout, il faut des murs, un toit, et surtout de
bonnes fondations. Comment voulez-vous édifier cette indispensable structure en
négligeant le soubassement ? Pour qu'un château s'élève sur la civilisation, il
est nécessaire qu'il s'appuie sur un sol commun, pragmatique, quelconque. Afin
que son sommet puisse côtoyer les oiseaux du ciel, ses pieds doivent être
enracinés dans l'ombre, au niveau des rats.
Autrement dit, chaque brique de l'humanité doit accepter de jouer son rôle.
La beauté des oeuvres collectives en dépend.
La cave dans le fumier, le dernier étage dans la soie. Le larbin chaussé
comme un larbin, le seigneur botté comme un seigneur. Le meunier à son moulin,
le boulanger à son four. Le prolétaire au turbin, le patron sur son fauteuil.
Telles sont la cohérence et l'harmonie d'un monde basé sur le simple bon sens.
Et non sur l'absurde parité à tout prix.
Quelle vertu y aurait-il à mettre du lustre de semblable valeur depuis les
semelles du domestique jusqu'à la perruque poudrée du châtelain ? Si au nom de
l'équité universelle le serviteur singe son maître, usurpe son statut, s'assied
sur son trône, alors dites-moi où elle est, cette fameuse équité qui met en
ébullition les cervelles délirantes de ce siècle ? Ces progressistes sont
tellement épris de chimères, obsédés de laïcité, d'égalitarisme,
d'indifférenciations génétiques, culturelles, humaines, qu'ils y sacrifient leur
joie de vivre.
Il est sot de croire que l'égalité rend les hommes heureux. Le bonheur
individuel n'a rien à voir avec le fait de jouir des mêmes bienfaits de la vie que
son voisin. Bien au contraire, si nos têtes étaient toutes à hauteur identique,
nous ne pourrions plus respirer. Certains courbent l'échine de la naissance à la
mort, d'autres marchent de manière innée sur le chapeau de leur prochain, et
c'est fort bien ainsi !
Pour qu’un bateau avance, il faut tantôt une voile, tantôt un moteur, et
d’autres fois des rameurs. L’essentiel est qu’au final tous accostent des îles
nouvelles.
La félicité de l'ouvrier d'usine n'est pas l'ivresse du milliardaire et la satisfaction du paysan n'a rien à voir avec l'allégresse du chanteur d'opéra. L'éclat du puissant n'aura jamais la saveur de l'humilité du modeste, tandis que le sel du pauvre n'est pas le sucre du riche. Le coeur du smicard bat pour une cause qui n'est pas celle du bourgeois fortuné, tout comme ce qui fait rêver celui qui est dans la boue fera mourir d'ennui celui qui vole dans les airs. La flamme des petits et l'azur des grands produisent des effets différents.
Le Soleil pour tous. Mais la pluie et la grêle, en supplément, pour ceux qui les reçoivent en pleine face ! C'est ainsi. Il y a des gros et des petits, des beaux et des ingrats, des infirmes et des bien-portants, des chanceux et des infortunés.
Bref, la lumière ici-bas projette fatalement des ombres, créant le chaud et le froid. Ce qui donne du
relief aux choses et ajoute du charme aux destins.
Malheureusement ceux qui associent l'arbitraire au "mauvais sort", prenant la grâce pour de l'iniquité, ne savent pas l'apprécier.
Ce feu de la vérité brûle sans se soucier de nos positions, faveurs ou défaveurs sociales.
Il aveugle les ânes, éclaire les aigles.
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