Limpidité textuelle, sujets familiers, tel est mon credo.
Ma conception de la littérature est saine, nette, franche.
Loin des abstractions confuses et des concepts flottants des approches
littéraires complexes et ambiguës en vogue chez bien des auteurs, j’oppose
l’éclat virgilien de ma plume : clarté, simplicité, accessibilité,
proximité.
Je refuse de succomber aux chants frelatés de l’hermétisme, aux fards
outranciers de l’intellectualisme, aux modes clinquantes qui font naître des
éléphants éphémères, phénomènes d’édition à but strictement mercantile. Moi je
veux demeurer une pierre sur la terre, non un mensonge sur le trône.
Hugo nous fait tous accéder au sublime avec des mots ordinaires, c’est un
modèle. L’eau pure de la prose commune a fait ses preuves dans les Lettres. Les
livres qui racontent les histoires de manière simple et vraie sont
indémodables.
Certes de temps à autre je me suis amusé à évoquer moi aussi des choses
extraordinaires d’une écriture immodeste. Mais c’est pour mieux revenir vers les
vérités les plus humbles... Après avoir moi-même expérimenté ce que j’appelle
“l’imposture de l’Art”, j’aime retourner à la source fraîche des écrits chastes
et dépouillés. Les affaires banales de l’existence valent plus que les ors
célestes des imaginaires grandioses car elles touchent l’Homme en surface mais
aussi en profondeur.
Il est facile pour tout écrivain de se fabriquer d’indéchiffrables et
flatteuses légendes de cendre et de soufre. Edifice de papiers et de
vent, abscons donc prestigieux, apportant un lustre indéniable à
l’oeuvre nécessairement perçue comme dense, âpre, engagée...
Pour cela il suffit d’invoquer des tourments de l’âme, je ne sais quelles
éblouissantes contorsions de la pensée et surtout d’adopter une posture
intellectuelle qui en impose. Au besoin quelques tangibles artifices
(chapeau, pipe, briquet, manteau, foulard, barbe,
lunettes) ajoutent une crédibilité supplémentaire à la farce conceptuelle
et finissent par introniser l’auteur illisible chez les plus illustres éditeurs
de Paris. Les obscurités livresques ont toujours séduit les imbéciles.
Beaucoup moins aisé est de faire triompher le jour.
Les beautés du quotidien, les paroles authentiques, les exactitudes de
l’esprit, les habitudes humaines, les secrets de la vie, les mystères à portée
de vue, les petits pas des gens qui passent et regardent les astres... Voilà des
réalités sans façon, des certitudes sensibles, des évocations essentielles,
voilà de la poésie honnête, intelligible, universelle, naturelle, un théâtre à
hauteur de bipède.
C’est cette arène vivante où vont et viennent, vivent et meurent les êtres,
parfois avec platitude, parfois avec étrangeté, que je propose de dépeindre à
mes lecteurs.
En toute spontanéité artistique et en termes lumineux. Et non en stériles
et ridicules complications cérébrales et boursouflures linguistiques.
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